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D’un public l’autre

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
01/27/2014 -  et 25 (Bruxelles), 29 (Birmingham), 31 (London) janvier 2014
Antonio Vivaldi : Stabat Mater en fa mineur, RV 621 – Salve Regina, RV 617
Unico Wilhelm van Wassenaer : Concerti armonici n° 2 et n° 3
Giovanni Battista Pergolesi : Stabat Mater en fa mineur

Andreas Scholl (contre-ténor), Klara Ek (soprano)
The Academy of Ancient Music, Pavlo Beznosiuk (premier violon et direction)


A. Scholl (© Decca/James McMillan)


Un an après son concert doublement anniversaire (45 ans dont 20 de carrière) fêté à la salle Gaveau en 2013, Andreas Scholl revient à Paris au plus vaste Théâtre des Champs-Elysées dans la série «Les Grandes Voix» pour un concert de musique religieuse. Où est passé le public de Gaveau, fidèle, connaisseur et respectueux qui, comme nous, suit Andreas Scholl depuis ses débuts en France ou qui ont pris en route sa magnifique carrière? Pas avenue Montaigne, certainement, où il ne s’agissait pas d’un récital consacré à la musique de la Renaissance anglaise ni au répertoire de musique élisabéthaine et de la cour des premiers Stuart, mais d’un programme bien plus alléchant pour un public élargi, en quelque sorte deux Stabat Mater pour le prix d’un...


Du fait de la diversité de sa programmation, le Théâtre des Champs-Elysées attire d’un soir à l’autre des publics assez différents. Celui réuni pour écouter ce concert donné à guichets fermés était le pire possible: tousseur, bruyant, bavard, peu respectueux de la musique, capable d’applaudir au milieu d’une œuvre après un trait de virtuosité. On voyait des portables se rallumer entre deux morceaux et même des adolescents maussades, furieux d’avoir été traînés là, vautrés dans les fauteuils des loges de corbeille comme sur un sofa devant la télévision. Bref, le public des soirées sponsorisées pour qui le champagne de l’entracte est le moment le plus important du concert. A ce public on ne reprochera cependant pas son enthousiasme, parfois un certain manque de discernement dans l’objet de ses effusions.


Le programme comportait trois œuvres-phares de la musique religieuse baroque italienne entre lesquelles s’intercalaient deux courtes œuvres pour orchestre de chambre du compositeur Unico Wilhelm van Wassenaer (1692-1766), que l’on dirait aujourd’hui néerlandais mais à l’époque un aristocrate de Leyde des Provinces-Unies, dont il fut un ambassadeur à l’étranger. Il est tout à fait de mission pour l’Academy of Ancient Music de défendre, et de le faire aussi suprêmement, cette musique publiée en 1970 (anonymement, au point d’avoir longtemps été attribuée à Pergolesi), mais ces Concerti armonici dans le style de Corelli sont de la musique de circonstance qui, dans le contexte de ce concert, jouaient un rôle de remplissage entre les morceaux de résistance qu’étaient les deux Stabat Mater et le Salve Regina.


Après vingt ans d’une carrière bien remplie, la voix d’Andreas Scholl possède toujours le même pouvoir de séduction immédiate grâce à une rigueur et un contrôle absolus et un instinct artistique infaillible. Le souffle est devenu un peu plus court et le volume qui n’a jamais été énorme ainsi que la projection diminuent cruellement comme on a pu en juger à Gaveau il y a quelques mois, a fortiori dans le plus grand Théâtre des Champs-Elysées Mais les couleurs sont toujours là et la maturité aidant, le chanteur est beaucoup plus à l’aise sur scène aujourd’hui et parfaitement décontracté. On n’en dira pas autant du soprano suédois Klara Ek, dont la biographie nous apprend qu’elle chante au Danemark Susanna des Noces de Figaro dont elle devrait être prochainement la Comtesse pour ses débuts au Japon. Avec quel volume, quel timbre et quelles couleurs vocales? – on est bien curieux de la savoir. Certainement rompue à la technique baroque, Klara Ek n’aura ni vocalement, ni par l’interprétation éclipsé Andreas Scholl qui méritait, même et surtout à ce stade de sa carrière, une partenaire mieux appariée. Cela se sentait cruellement dans les duos comme le plein d’embûches «Inflammatus et accensus» et dans «Quando corpo morietur», qui demande une fusion des timbres quasi surnaturelle. Mais pour quelques moments en solo du grand artiste qu’est Scholl, la solennité de «Fac ut portem Christi mortem» surtout, on gardera un souvenir ému de ce Stabat Mater de Pergolèse.


Si la vedette a été volée à Scholl, tête d’affiche de ce concert, c’est certainement par l’Academy of Ancient Music, ensemble d’une rare cohésion alliant à la virtuosité la plus impeccable un grand sens de la religiosité et qui, sous la direction de son premier violon, Pavlo Beznosiuk, a sauvé plus d’une fois ce concert d’un flottement dans la qualité de ses solistes.


Le site de l’Academy of Ancient Music



Olivier Brunel

 

 

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