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Tassis Christoyannis, éblouissant Don Giovanni

Tours
Grand Théâtre
10/11/2013 -  et 13, 15* octobre 2013
Wolfgang Amadeus Mozart : Don Giovanni, K. 527

Tassis Christoyannis (Don Giovanni), Tomislav Lavoie (Leporello), Omo Bello (Donna Anna), Marianne Fiset (Donna Elvira), Yves Saelens (Don Ottavio), Albane Carrère (Zerlina), Nicolas Certenais (Masetto), Nika Guliashvili (Le Commandeur)
Chœur de l’Opéra de Tours, Emmanuel Trenque (chef de chœur), Orchestre symphonique Région Centre-Tours, Jean-Yves Ossonce (direction)
Oriol Tomas (mise en scène), Laurence Mongeau (décors et costumes), Marc Delamézière (lumières)


T. Christoyannis, A. Carrère (© François Berthon)


A la fois ferme et souple, légère et puissante, la direction du maître des lieux Jean-Yves Ossonce – il possède la double casquette de directeur général et musical – domine ce Don Giovanni, qui inaugure la saison tourangelle 2013-2014. Elle parvient à un équilibre parfait entre dramma et giocoso, entre ce qui tire l’œuvre vers le romantisme naissant et ce qui la rattache au XVIIIe siècle. Le trait y est ample, intense, vibrant, tout en restant vif, nerveux, voire même incisif. A ce titre, la ligne est parfaitement mozartienne, c’est à dire ambiguë et double et, en dépit de quelques menus décalages, met en valeur les différents détails de l’orchestration.


Pour ses débuts en France, le metteur en scène québécois Oriol Tomas propose une régie plutôt épurée – réduite à un décor unique et géométrique, essentiellement composé d’un escalier et d’une passerelle –, mais dénuée de réel esthétisme, et dont le principal atout est de convenir pour toutes les scènes. Sa conception est placée sous le signe de la dissolution, et dessine un Don Giovanni qui se moque de la morale: son rire éclatant et libératoire traverse toute l’œuvre; le personnage est impulsif et communicatif, jouisseur et hautain, ne croyant pas à la punition finale du mal. Déception néanmoins quant au dernier tableau, où il sera simplement englouti, ce qui n’est guère original, ni impressionnant. Il faut dire que la direction d’acteurs n’est pas le point fort de l’homme de théâtre, au mieux conventionnelle, au pire maladroite, quand elle n’est pas, dans certaines scènes, inexistante.


Nous n’en finissons pas d’admirer les qualités du chant et les extraordinaires dons d’acteur du baryton grec Tassis Cristoyannis, qui nous ont été révélées ces deux dernières saisons dans des incarnations magistrales, tels son Macbeth bordelais, son Germont angevin ou encore, in loco, son Renato dans Un bal masqué. Il incarne ainsi avec beaucoup de plénitude et d’intelligence le personnage équivoque de Don Giovanni, tel que le voit Oriol Tomas, avec un physique idéal pour le rôle, et une voix qui s’élance de façon claire et homogène; il est un modèle de musicalité, parfait de goût et de style (superbe demi-teintes dans la sérénade «Deh, vieni alla finestra»), et le moindre de ses récitatifs relève d’un travail d’horloger: il est sans conteste un des chanteurs parmi les plus accomplis de notre temps.


On est également séduit par le Don Ottavio du ténor belge Yves Saelens, tout de tendresse et de poésie: il distille le fameux «Il mio tesoro» – qu’il attaque piano, puis pianissimo – avec une élégance et une tenue admirables. Nicolas Certenais, en revanche, ne convainc pas en Masetto: présence scénique limitée, timbre banal et émission peu stable. L’instabilité de la ligne est aussi le principal reproche que l’on fera à la basse québécoise Tomislav Lavoie, dont les talents d’acteur s’avèrent également bien limités pour le personnage de Leporello, qui en requiert beaucoup. Quant au Géorgien Nika Guliashvili, il apporte au Commandeur la voix profonde qui lui sied.


Côté féminin, la soprano franco-nigériane Omo Bello confère à Donna Anna une sensualité, une émotion et une force tragique, avec sa belle voix corsée, qui emportent l’adhésion, pour ne pas dire l’admiration. Elle donne de superbes accents – tout en se jouant des vocalises – à l’air «Or sai chi l’onore». Elle est un grand espoir, et nous attendons avec impatience sa Traviata, rôle qu’elle chantera à l’Opéra de Montpellier en juin prochain. Dans le rôle d’Elvira, la soprano québécoise Marianne Fiset a quelques problèmes d’intonation, mais son Elvira brûle les planches, notamment dans l’air «In quali eccessi», couronné d’aigus sûrs et percutants. Enfin, pétulante et fragile, la mezzo française Albane Carrère prête sa fraîcheur et sa musicalité à Zerlina.



Emmanuel Andrieu

 

 

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