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Un beau Wozzeck on ne sait où

Madrid
Teatro Real
06/03/2013 -  et 3, 5, 8, 10*, 13, 15, 18, 20 juin 2013
Alban Berg: Wozzeck, opus 7
Simon Keenlyside (Wozzeck), Nadja Michael (Marie), Gerhard Siegel (Le capitaine), Franz Hawlata (Le docteur), Roger Padullés (Andrés), Jon Villar (Le tambour-major), Scott Wilde & Tomeu Bibiloni (Les apprentis), Francisco Vas (Le fou), Katarina Bradic (Margret)
Pequenos Cantores de la JORCAM, Ana González (chef de chœur), Coro del Teatro Real, Andrés Máspero (chef de chœur), Orquesta del Teatro Real, Sylvain Cambreling (directon musicale)
Christoph Marthaler (mise en scène), Anna Viebrock (décors et costumes), Joachim Rathke (co-metteur en scène), Olaf Winter (lumières)


S. Keenlyside (© Javier del Real/Teatro Real)


Une direction d’acteurs très soignée nous restitue un réseau très riche de rapports entre les personnages. Dommage que tout soit un peu trop forcé à cause de l’unicité du lieu: une sorte de cantine sous une tente, dans un parc de recréation pour enfants accompagnés de leurs parents où Wozzeck est un garçon de café un peu flic, tout à la fois. Certaines scènes fonctionnent plus ou moins bien dans un décor unique tel que celui-là, mais il manque de nécessaires variations (la rue, les chambres, le champ, le village, la caserne), tout se passe devant tout le monde, sans intimité, sans clandestinité (pour l’adultère, pour le sadisme du capitaine et du docteur, pour les remords de Marie...), comme si les deux tableaux de l’auberge s’imposaient comme critère général pour la mise en scène dans sa totalité. Et il y a des moments où cela ne marche pas du tout, malgré les formidables prestations de comédiens de Keenlyside, Nadja Michael, Siegel, Hawlata, Villars, Bradic et Padullés. De toute façon, le public était finalement un peu soulagé, après le massacre scénique de Wozzeck voici quelques années au Teatro Real et, auparavant, au Gran Teatre del Liceu de Barcelone. La mise en scène de Marthaler provient quant à elle de l’Opéra de Paris (voir ici et ici).


On voit le décor et on trouve qu’il serait très approprié... pour un autre opéra, peut-être, mais pas pour Wozzeck: à tout le moins, il y a peu d’adéquation entre la proposition présentée sur scène, d’une part, le développement de l’action et le chant, d’autre part. Cette inadéquation marquait la froideur de la représentation, toujours en dépit des acteurs, et la fosse ne procurait pas beaucoup de chaleur non plus, malgré la profonde connaissance qu’a Cambreling de cet opéra et le travail insistant et intelligent du maestro avec un orchestre avec lequel il semble qu’il se trouve déjà très à l’aise.


Keenlyside, déjà à l’affiche du Teatro Real en Pelléas et dans d’autres rôles, est un Wozzeck bien dirigé vers la folie, dans une tension permanente, peut-être plus à voir qu’à entendre – une véritable création quand même. Nadja Michael a laissé un beau souvenir l’an dernier in loco avec sa Poppea: sa ligne est belle, pleine de force, aux graves étonnants, une Marie extraordinaire dans son équilibre voix-actrice-présence scénique. Il y a quelque magie chez Nadja Michael pour le théâtre lyrique, elle y est chez elle, très à l’aise. Gerhard Siegel sait bien forcer la dimension vocale adéquate et l’histrionisme obligatoire pour le rôle de cette marionnette à la voix d’eunuque qu’est le capitaine. Franz Hawlata est un docteur formidable dans son côté comédien, mais ne rend pas pleinement justice à la dimension vocale du personnage, surtout dans l’extrême grave de la tessiture, un peu diabolique, il est vrai. Dans la logique de la mise en scène de Marthaler, Jon Villars incarne un tambour-major punk, insurpassable en voix comme en comédien. Une surprise: la très jeune mezzo serbe Katarina Bradic, déjà vue au Teatro Real, presque toujours en scène dans la version de Marthaler malgré le peu de présence vocale du rôle de Margret; l’équilibre complet entre sa tessiture centrale et grave, sans failles apparentes, et ses talents de comédienne constituent sans doute des atouts pour un futur prometteur. Le ténor Tomeu Bibiloni complète la série des sept personnages principaux avec une ligne plus proche de celle du capitaine que d’un ténor lyrique, un bon choix.


Du très bon théâtre côté comédiens et direction d’acteurs. Un seul décor qui constitue une erreur, à notre avis, parce qu’il force des situations sans les résoudre, affaiblissant du même coup le drame. Des voix d’un bon niveau général, malgré tout. Un orchestre, un chœur, un petit chœur d’enfants et un maestro en très bonne forme, sans pour autant rendre tout le drame de cet opéra, Wozzeck, un titre déjà devenu classique, bien connu dans notre pays et pas du tout contesté, malgré quelques mauvaises mines et l’absence de certains abonnés, compensées par l’amour que ceux qui étaient là éprouvent pour ce chef-d’œuvre.


Voir le spectacle sur le site d’Arte Live Web



Santiago Martín Bermúdez

 

 

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