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Anniversaire stravinskien pour Sir John Eliot

Paris
Salle Pleyel
04/23/2013 -  
Igor Stravinsky : Apollon Musagète – Œdipus Rex

Jennifer Johnston (Jocaste), Stuart Skelton (Œdipe), Gidon Saks (Créon), Fanny Ardant (récitante)
Monteverdi Choir, London Symphony Orchestra, Sir John Eliot Gardiner (direction)


J. E. Gardiner (© Sheila Rock/Decca)


Laurent Bayle le rappelle d’abord, avant de lui souhaiter un bon anniversaire : entre sir John Eliot, la Cité de la musique et la salle Pleyel, c’est une longue histoire, qui se prolongera à la future Philharmonie de Paris. Et de souligner à juste titre l’éclectisme du chef britannique : le baroqueux d’hier a adopté les romantiques, puis Debussy ou Stravinsky. Rien d’étonnant donc si ce concert de ses soixante-dix ans était dédié au compositeur du Sacre ; on connaissait d’ailleurs, par le disque, sa Symphonie de psaumes et son Rake’s Progress, par le concert, son Petrouchka. Tout laissait penser qu’Apollon Musagète (1928) et Œdipus Rex (1927), deux œuvres phares de la période néoclassique, lui iraient comme un gant.


Ce n’est pas tout à fait le cas. On apprécie, dans le ballet, la clarté, la verdeur, la souplesse chambristes, le refus de toute récupération romantique – les violons jouent d’ailleurs debout : voici bien le « ballet blanc ». Et quel beau violon de Tomo Keller pendant le solo de « Apollon et les Muses » ! Mais la musique ne respire pas assez, comme si la direction oubliait la danse au profit de la seule plasticité d’une musique pure, trop désincarnée. « Ballet blanc », mais ballet quand même, que l’on ne sent pas ici.


Œdipus Rex convient mieux au chef : un « opéra oratorio », cette fois, où Stravinsky ressuscite une tradition qui n’a guère de secrets pour ce familier de Bach, de Haendel ou de Mozart. La solennité grandiose du rituel antique va de pair avec l’urgence propre à l’opéra, notamment dans un impressionnant « Mulier in vestibulo ». La direction parvient à unifier des parties chargées – voire surchargées – de références aussi hétéroclites que possible : aria da capo du seria, fanfares hollywoodiennes, clins d’œil à Verdi ou à Moussorgski... Mais cela ne va pas sans raideur, la musique, ici aussi, pourrait respirer plus librement ; il manque cette distance ambiguë par rapport aux modèles pastichés qui constitue l’esprit même de l’œuvre. Gardiner se laisse prendre aussi au piège de l’acoustique trop sonore de Pleyel. Si son superbe Chœur Monteverdi n’en pâtit pas, cela ne flatte pas les solistes, dont il ne semble guère se soucier – une raison supplémentaire de ne pas confier à des choristes, fussent-ils les meilleurs, Tirésias, le Berger ou Le Messager. Même le Créon de Gidon Saks est à la peine. Quant à Stuart Skelton, malgré quelques jolies nuances, il s’époumone dans une partie où il faut un belcantiste, un mozartien à l’émission haute et souple, surtout du côté du haut médium, partie totalement incompatible avec le chant engorgé du Siegmund de Bastille. Seule émerge la Jocaste de Jennifer Johnston, opulent mezzo d’opéra, très à l’aise dans son grand air du début du second acte. Aussi à l’aise que Fanny Ardant, sobre et noble speaker de l’antique tragédie – contrairement à beaucoup de récitants, elle ne lit pas son texte... On a, pour rappeler les masques de la création, enfariné les visages des chanteurs : cela n’ajoute rien.


Didier van Moere

 

 

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