About us / Contact

The Classical Music Network

Vézelay

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

«L’oreille entend le palais»

Vézelay
Basilique
07/24/2012 -  
Max Bruch : Romance pour alto et orchestre, opus 85
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 1, opus 21
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Concerto pour violon, opus 35 (*)

Régis Pasquier (*) (violon et direction), Bruno Pasquier (alto)
Orchestre de l’Académie Régis Pasquier, Pierre Cao (direction)


R. Pasquier (© Alvaro Yanez)


Etre à table au souper à L’Espérance qui a suivi le concert à la Basilique, avec les solistes, le chef d’orchestre et Marc Meneau comme représentant de la gastronomie constitue certainement une expérience vivifiante. La soirée, organisée par l’Association des amis de Marc Meneau, commence par un «ambigu», cocktail-apéritif dans les jardins de L’Espérance, où l’on a le plaisir de goûter quelques «inventions» culinaires, comme l’aspic d’œuf de caille en gelée de concombre, arrosées de champagne.


Suit un concert à la Basilique qui commence par la Romance de Bruch, pièce anachronique mais si belle et si chantante qui rappelle l’inspiration du deuxième mouvement de son Premier Concerto pour violon et nous permet de retrouver Bruno Pasquier, qui sait faire chanter son alto. Pierre Cao est au pupitre pour cette Romance et pour la Première Symphonie de Beethoven, transition entre Mozart et le début du romantisme, avec son Menuet qui est déjà un scherzo. Bonne idée que d’adopter un rythme pas trop lent pour le deuxième mouvement, ce qui lui donne vie et qui prouve à quel point le rythme est si important dans l’exécution des Symphonies de Beethoven.


Arrive le sommet de la soirée, le Concerto de Tchaïkovski joué et dirigé par Régis Pasquier. Nous le connaissons depuis longtemps et n’oublions pas les années où il fut premier violon solo du National. Une découverte ou un oubli réparé: son timbre, sa sonorité. Beaucoup de bons violonistes de la jeune génération, dotés une technique parfaite et d’une musicalité correcte, oublient de travailler le timbre, alors qu’il faisait la singularité des grands violonistes du passé comme Heifetz ou Milstein, permettant de les reconnaître immédiatement: une seule note unique et c’était eux. Régis Pasquier nous enchante par cela justement qui, ajouté à sa technique parfaite et à sa compréhension de l’œuvre, fait les grands moments de la musique. L’enthousiasme de l’orchestre, dirigé par lui et formé de jeunes musiciens de son Académie, permet au premier mouvement de se terminer dans une apothéose entraînant des applaudissements justifiés et prolongés d’un public ému et enchanté. Que dire de la beauté de la Canzonetta, ce deuxième mouvement écrit en hommage à un enfant mort prématurément, où ce timbre prend toute sa plénitude. Standing ovation qui amène un Caprice de Paganini, le Dix-septième, qui clôt ce concert exceptionnel dans ce cadre exceptionnel qu’offre la Basilique de Vézelay.


De quoi a-t-on parlé pendant le souper qui a suivi? De musique évidemment, de l’histoire de la musique avec l’évolution du modal au tonal, du tonal à l’atonal, de l’atonal au dodécaphonique, de l’importance du timbre, de la couleur, des problèmes posés par le rythme à travers les temps. Mais on a aussi beaucoup parlé des rapports entre la musique et la gastronomie. J’ai toujours pensé que cet art du «bien manger» touchait à quatre de nos sens mais qu’il oubliait le cinquième, l’ouïe. Marc Meneau m’a détrompé en nous faisant comprendre la présence du son dans son œuvre: du bruit du couteau coupant l’oignon sur la planche avec son rythme particulier, lent chez le débutant, rapide chez l’expert, au «chant» du feu dans la cheminée et jusqu’au bruit des couverts dans les assiettes. Ajouter à cela une explication sur la différence entre la cuisine d’Extrême-Orient ; qui divise ; et celle d’Occident, la nôtre, qui compose. Une formule incisive de Marc Meneau pour terminer – «L’oreille qui écoute le palais» – fera sentir notre enchantement d’une soirée exceptionnelle avec l’impression de bonheur devant notre capacité d’être comblés par notre culture sous toutes ses formes. En ce temps de crise, un moment de grande élévation.



Benjamin Duvshani

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com