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Inimitable Felicity

Strasbourg
Opéra National du Rhin
04/17/2012 -  
Airs et Mélodies de Purcell, Elgar, Vaughan Williams, Bridge, Warlock, Gurney, Quilter, Britten et Coward.
Dame Felicity Lott (soprano), Graham Johnson (piano)


F. Lott (© Trevor Leighton)


Felicity Lott bénéficie partout en France d’un capital de sympathie inépuisable et son apparition sur la scène de l’Opéra du Rhin ne fait pas exception. Drapée dans une somptueuse robe rose fuchsia, la diva est accueillie par une ovation qui dépasse de loin en volume et en durée les applaudissement polis d’usage. Une mise en confiance immédiate pour cette grande dame du chant dont on va retrouver ici, après une période d’échauffement et d’apprivoisement de l’instrument certes plus longue et plus difficile que par le passé, tout le charme et la musicalité. Un climat propice entretenu aussi par Graham Johnson, toujours respectueux (dès l’entrée en scène : à plusieurs pas de distance, pour éviter de marcher sur la robe de la chanteuse, ce qui est toujours plus prudent, mais aussi au clavier ensuite, posant à chaque accord un jeu merveilleusement sûr et attentif). Après quelques phrases difficiles où le timbre semble un peu rétif à s’arrondir, Dame Felicity nous prouve très vite qu’elle reste capable de polir les mots et les inflexions d’une mélodie comme personne, avec ce mélange de naturel et de subtilité sophistiquée qu’elle sait si bien doser.


Seulement voilà, le programme, lui, est peu habituel. Le pari de s’en tenir strictement à des mélodies anglaises est audacieux et correspond aussi à un effort diplomatique de circonstance (ce concert s’inscrit dans le cadre de la présidence britannique du Conseil de l'Europe). Belle occasion de découvrir ce répertoire que Felicity Lott connaît bien pour l’avoir interprété souvent, y compris au disque. Cela dit, mises bout à bout, toutes ces Mélodies où il beaucoup question de doux paysages, de jardins mouillés et d’émotions subtilement délavées par la pluie, finissent par manquer d’aspérités et de caractère. L’interprète, d’ailleurs, paraît en avoir pleinement conscience et tente d’équilibrer son programme afin de limiter cette impression : pas plus de trois mélodies pour chaque compositeur, une bonne disposition des pièces les plus solides à la fin de chaque partie… Et puis, de toute façon, elle peut compter sur un charme « old fashioned » évident qui opère à chaque mesure. Reste cependant à dépasser cette impression tenace de désuétude, et même le souffle inépuisable de Felicity Lott ne parvient pas toujours à chasser l’impressionnante couche de poussière qui semble s’être accumulée ici ou là. Les Purcell liminaires font évidemment exception, encore que l’accompagnement au piano rende l’expérience elle aussi curieusement exotique, mais par d’autres voies.


Un récital spécialisé, là où on aurait peut-être préféré retrouver l’interprète plus universelle que l’on aime tant. Mais tant pis. Mieux vaut apprécier ces beaux instants qui passent et dont certains ne marqueront pas durablement la mémoire. On se souviendra surtout des Mélodies d’Elgar, dans lesquelles passent quelques parfums quintessenciés qui semblent échappés de Lieder de Brahms, et bien sûr des très beaux Britten qui couronnent la seconde partie du récital, avec enfin là l’apparition de textes poétiques autrement plus intéressants.


En extrême fin de parcours Felicity Lott peut davantage se libérer avec quelques-uns de ces instants farceurs dont elle détient le secret, ici tous butinés chez Noel Coward, sorte de Sacha Guitry en version britannique doté, contrairement à son homologue français, de vrais talents musicaux complémentaires. A Bar in the Piccola Marina, chanson très longue et bourrée de clins d’œil, met cependant Felicity Lott à rude épreuve, en l’égarant souvent dans une tessiture grave qui la fatigue notablement. Mais en tout cas on rit beaucoup.


« Merci. Vous avez été très indulgents pour la musique anglaise ! », déclare la diva, avant trois bis empruntés au même domaine à l'exception près d’une mélodie de Poulenc, Fancy, écrite sur un texte de Shakespeare il est vrai. Ultime remerciement avec d’ineffables Roses of Picardy (Haydn Wood) qui exhalent leur doux parfum sur le souffle d’une voix au charme toujours exceptionnel.



Laurent Barthel

 

 

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