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Histoires florentines

Lyon
Opéra
01/29/2012 -  et 30 janvier, 6, 8 février 2012
Alexander Zemlinsky : Eine florentinische Tragödie
Martin Winkler (Simone), Gun-Brit Barkmin (Bianca), Thomas Piffka (Guido Bardi)
Orchestre de l’Opéra de Lyon, Bernhard Kontarsky (direction musicale)
Georges Lavaudant (mise en scène et lumières), Jean-Romain Vesperini (réalisation de la mise en scène), Jean-Pierre Vergier (décors et costumes), Fabrice Kebour (réalisation des éclairages)
Giacomo Puccini : Gianni Schicchi
Werner Van Mechelen (Gianni Schicchi), Ivana Rusko (Lauretta), Natascha Petrinsky (Zita), Samir Pirgu (Rinuccio), Wynne Evans (Gherardo), Agnes Selma Weiland (Nella), Tom Nermel (Gherardino), Lynton Black (Betto), Paolo Battaglia (Simone), Wolfgang Newerla (Marco), Kathleen Wilkinson (La Ciesca), Paolo Stupenengo (Maître Spinelloccio), Maxim Kuzmin-Karavaev (Amantio di Nicolao), Kim Kwang Soun (Pinellino), Dominique Beneforti (Guccio)
Orchestre de l’Opéra de Lyon, Gaetano d’Espinosa (direction musicale)
David Pountney (mise en scène), Johan Engels (décors), Marie-Jeanne Lecca (costumes), Fabrice Kebour (lumières), Ian Galloway (vidéos)


(© Bertrand Stofleth)


Le dernier diptyque du festival «Pucinni plus» associe à la truculence de Gianni Schicchi un envoûtant ouvrage de Zemlinsky, Une tragédie florentine, qui avait été présenté il y a quelques saisons avec une création de Salvatore Sciarrino. L’intrigue condense jusqu’à sa plus simple expression les caractéristiques du livret d’opéra selon George Bernard Shaw: un baryton (le mari) qui veut empêcher la soprano (sa femme) de coucher (sic) avec le ténor (l’amant). Point de chœurs ni de figuration vocale supplémentaire: dans cet opus, le compositeur autrichien a resserré la répartition dramatique, comme pour mieux mettre en valeur la richesse opulente et enivrante de la partie qu’il confie à l’orchestre – sorte de synthèse très originale entre Mahler, Berg et Strauss. On y entend plus d’une fois des échos wagnériens, que Bernhard Kontarsky ne dissimule point, confiant qu’il est dans l’identité de la partition. La lutte verbale et vocale entre Simone et Guido Bardi se manifeste avec efficacité dans les compositions respectives de Martin Winkler et Thomas Piffka. Le masque de duplicité derrière lequel le baryton contient sa jalousie se fracture avec un remarquable sens de la gradation expressive, tandis que le second manifeste une vaillance héroïque idiomatique. La relative tension dans l’instrument de Gun-Brit Barkmin n’obère pas cependant son impact théâtral. Condensée également est la mise en scène de Georges Lavaudant, qui réussit à merveille à suggérer l’intérieur de la demeure du marchand florentin, avec ces murs déformés par la perspective du désir. La subtilité des lumières épouse celles des timbres de l’orchestre, et contribue avec bonheur à la fascination exercée par cette Tragédie florentine.


On reste donc à Florence, Ariane géographique de ce dernier diptyque, avec le Gianni Schicchi de Puccini. On retrouve le container du Tabarro pour domicile et chambre de Buoso Donati – David Pountney a visiblement procédé à un écologique recyclage d’inspiration. Les cassettes et boîtes de tomates, stéréotypes de l’Italie en sa gastronomique réduction, emplissent les meubles que les déshérités fouillent pour trouver le testament, puis pillent pour se venger de Gianni Schicchi. Une carte postale timbrée de Florence étalée au-dessus du cube domestique sert d’arrière-plan aux amours de Lauretta et Rinuccio tandis que les Donati déversent leur bile. La production a au moins de mérite de suivre fidèlement les indications du livret, avec une direction d’acteurs qui tire parti de sa vis comica.


Autant performance vocale que théâtrale, le héros éponyme revient à un Werner Van Mechelen fort honnête, mais pas assez acéré. Significativement, l’avertissement en contrepoint des protestations de la famille alors qu’il s’attribue la maison, les moulins et la mule de Signa, sonne avec placidité. Sensiblement moins à l’aise en Zita qu’en Tante Princesse (dans Suor Angelica), Natascha Petrinsky accentue l’acrimonie du personnage. Le passage d’un opus à l’autre s’avère également défavorable à Ivana Rusko, Lauretta à la juvénilité acidulée – les couettes dont elle est affublée ne l’aident guère il est vrai à la rendre authentiquement émouvante. Remplaçant au pied levé Benjamin Bernheim, déclaré souffrant, Samir Pirgu traverse le rôle de Rinuccio avec un naturel bienvenu, affirmé sans être caricatural. On relève la récurrence de certains interprètes sur les trois soirs, tels Wolgang Newerla en Marco, Wynne Evans (Gherardo), Agnes Selma Weiland (Nella) ou encore Kathleen Wilkinson, La Ciesca. Si Paolo Stupenengo exagère passablement la nasalité du médecin, Maxim Kuzmin-Karavaev surprend agréablement par l’assurance de son incarnation. Peu de choses à dire de la polissonnerie anecdotique de Gherardino, pâle Tom Nermel. Les ensembles se révèlent d’une efficacité certaine, tandis que la direction de Gaetano d’Espinosa distille généreusement l’humour de l’ouvrage, même si l’on pourrait espérer ça et là une pincée supplémentaire de finesse. Le succès rencontré auprès du public confirme l’avance du dernier volet du Triptyque dans l’échelle de la popularité – et rend d’autant plus précieuse l’initiative de Serge Dorny, à même de corriger les aveuglements de la postérité.



Gilles Charlassier

 

 

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