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Senta ou le Hollandais volant

Liège
Palais Opéra
11/25/2011 -  et 27*, 29 novembre, 1er, 3 décembre 2011
Richard Wagner : Der fliegende Holländer
Mark Rucker (Der Holländer), Manuela Uhl (Senta), Alastair Miles (Daland), Corby Welch (Erik), Joëlle Charlier (Mary), Yuri Gorodetski (Der Steuermann)
Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie et d’Opéra de Namur, Marcel Seminara (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Paolo Arrivabeni (direction)
Petrika Ionesco (mise en scènes décors et lumières), Lili Kendaka (costumes), Christophe Vallaux (vidéo)


(© Jacky Croisier)


L’Opéra royal de Wallonie programme pour cinq représentations une nouvelle production du Vaisseau fantôme (1843) confiée à Petrika Ionesco. Concevoir une mise en scène en plaçant Senta au centre de gravité de l’ouvrage ne constitue pas une idée neuve (voir ici) mais elle tient la route. Dans ses notes d’intention, exposant et situant dans le contexte chacun des personnages principaux, le metteur en scène présente l’héroïne en premier, au contraire du Hollandais qu’il aborde à la fin, juste avant de toucher un mot d’Erik. De fait, au lever de rideau, Senta se trouve dans un cimetière et à la fin, la jeune femme meurt gelée parmi les tombes en serrant contre elle la représentation de l’être aimé. Cimetière, fabrique (de toute évidence de vêtements) et, bien sûr, navire : les décors, transformables à vue, bénéficient d’un éclairage judicieux qui confère aux trois actes une atmosphère évocatrice, tandis que le recours habile à la vidéo sur plusieurs écrans (frontal et latéraux) facilite la représentation de la mer, des icebergs et de la tempête.


Quand surgit le Hollandais, adossé contre une ancre se déplaçant dans l’air, le fantastique, voire la science-fiction, s’invite sur scène tandis que le cinéma d’épouvante vient ensuite à l’esprit lorsqu’une partie du plateau se lève à deux reprises pour dévoiler des squelettes et des lambeaux de chair humaine – Senta, dans un état second, vient d’ailleurs s’y agripper, ce qui prête d’ailleurs à sourire. Seuls quelques tremblements et crissements dans les mécanismes compromettent le réalisme de ce dispositif malgré tout épatant. Le jeu scénique s’avère pour le moins classique, voire caricatural, par exemple lorsque l’équipage évolue en état d’ivresse, mais le metteur en scène restitue le mythe sans s’égarer. Bref, sur ce point, une production solide et grand public, conforme en cela à la politique artistique de l’institution liégeoise.



(© Jacky Croisier)


Il serait intéressant de la revoir sur une scène de plus vastes dimensions que celle du Palais Opéra où se tiennent les représentations durant les travaux de rénovation, à moins qu’il ne s’agisse d’une illusion d’optique tellement la fosse s’étale démesurément en longueur. L’Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie s’en accommode comme il peut : la mise en place s’avère soignée dans l’ensemble mais, dans les détails, quelques dialogues et interventions solistes, notamment parmi les vents, n’atteignent pas un niveau de finition optimal. Abordant Wagner pour la première fois depuis le début de son mandat de directeur musical en 2008, Paolo Arrivabeni obtient de ses troupes une sonorité remarquable, un dynamisme aussi contrasté que nuancé et une tension dramatique qui ne fléchit pas, et ce dès l’Ouverture, houleuse comme il se doit. Renforcés par le Chœur d’Opéra de Namur, les choristes de la maison réalisent une prestation honorable dans les nombreuses pages que leur a réservées le compositeur.


Les chanteurs possèdent l’étoffe requis par leur rôle, à commencer par Manuela Uhl qui figure pour la première fois à l’affiche de l’Opéra royal de Wallonie. La soprano allemande, qui incarne une Senta charmante et convaincante, exploite un timbre véritablement séduisant et tisse une ligne vocale stable et nette, même dans les aigus. Elle témoigne d’une réelle aisance, tant en solo qu’avec ses partenaires au nombre desquels l’excellent Alastair Miles, baryton-basse consistant qui campe un Daland distingué et, en fin de compte, plus crédible dans une usine textile que sur un bateau. Corby Welch interprète pour sa part un Erik passionné, brutal et survenant – quelle originalité – un fusil à la main. Mark Rucker se glisse pour la première fois dans la peau du Hollandais: ni exceptionnelle, ni décevante, sa touchante prestation nécessite encore quelques rodages mais il s’agit sans aucun doute d’un futur grand titulaire du rôle si d’autres institutions lui permettent de le creuser davantage. Figurent également dans la distribution Joëlle Charlier, Mary pincée telle une gouvernante anglaise, et Yuri Haradzetski – Gorodetski dans le programme, les deux orthographes étant possibles –, cinquième prix au Concours Reine Elisabeth il y a trois ans et dont la voix fine et modérément puissante convient idéalement au pilote.



Sébastien Foucart

 

 

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