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Et vogue le navire

London
Royal Opera House
09/20/2000 -  et les 22, 25, 28 septembre, 3 octobre
Benjamin Britten : Billy Budd
Simon Keenlyside (Billy Budd), Kim Begley (Capitaine Vere), Eric Halfvarson (John Claggart), Stephen Richardson (Mr Flint), Alan Opie (Mr Redburn), Conald Coat (Dansker), Keel Watson (Bosun), Adrian Clarke (Donald), Peter Auty (Maintop), Adrian Clarke (Donald), Timothy Robinson (Novice), Richard Coxon (Squeak), Graeme Broadbent (Lieutenant Ratcliffe), Francis Egerton (Red Whiskers), Jonathan Coad (Arthur Jones), Quentin Hayes (L’ami du Novice), Alex Knox (Le garcon de cabine), Christopher Keyte et Bryan Secombe (Premier et second camarades)
Orchestre et Choeur du Royal Opera House
Richard Hickox (direction)
Francesca Zambello (mise en scène)

La production de Francesca Zambelo pour Covent Garden et l’Opéra-Bastille (1995) vieillit sans se rider, et, du fait de son succès retentissant, parcourt même le monde (Los Angeles, Dallas, Seattle). L’une des forces des productions de Zambello à l’opéra Bastille vient d’une utilisation de tout l’espace de la scène, en hauteur comme en largeur, qui permet d’éviter la sensation que les chanteurs s’y sont égaré. Quoique de grande taille, la scène de Covent Garden ne pose pas le même problème, et la simplicité de la disposition scénique (un plan incliné sur lequel se trouve un mât-croix, où la lumière vient parfois isoler des espaces) semble d’abord quelque peu étique - même si, dès le départ, elle fait bien ressortir le caractère claustrophobique de l’espace du navire. Plus mouvementé, le décor prend toute sa force dans le second acte, nous donnant une vue en tranche des plus convaincantes du navire, avec ses deux niveaux (pont et soutes) et ses gréements, brille dans la scène de guerre, et réussit à intégrer les personnages principaux dans le groupe (l’équipage) avec le plus grand naturel.


La distribution vocale de cette reprise fut remarquable et assez homogène. Eric Halfvarson incarna, avec sa voix profonde et noire, un extraordinaire Claggart, d’une présence et d’une vérité de tous les instants : tranchant, méchant, sa raide détermination laissait sentir son trouble, son refus de la différence, ou, peut-être, le désir refoulé pour Billy Budd. Interpréter avec insistance et assurance le comportement de Claggart par du désir homosexuel dans la nouvelle de Melville relève quelque peu de la fabulation (contrairement à son désir de la mort de Billy), mais cet élément indicible est bien plus présent dans le livret de E. M. Forster. Simon Keenlyside a le physique de Billy Budd (de loin, il n’est pas sans évoquer Terence Stamp dans l’adaptation cinématographique de la nouvelle de Melville tournée par Peter Ustinov). Son Billy Budd est un peu simplet et sûr de lui, enfant plutôt que saint, lui qui non seulement aime tout le monde mais se croit aimé de tous. Peut-être aurait-il pu être plus christique… Sa voix claire manque parfois de projection, mais il chante assurément bien, et sa ballade du second acte est magnifique de rondeur de timbre et d’intelligence. Enfin, le Vere de Kim Begley faisait bien sentir le déchirement intérieur du capitaine, écartelé entre son admiration privée pour Billy Budd et ses responsabilités sociales en temps de guerre. Les rôles secondaires et les chœurs furent également remarquables. L’excellente diction des chanteurs put être d’autant mieux appréciée que le Royal Opera House avait surtitré le spectacle (bien qu’il soit en anglais), une pratique très bienvenue.


L’orchestre est parfois à la limite de couvrir les chanteurs, mais rien de plus normal dans la partition de Britten. Explosive, la scène de la bataille possède une énergie enthousiasmante. Et quoique l’on pourrait parfois attendre plus de « romantisme » ou de pathos, Richard Hickox dirige l’opéra à la perfection, faisant ressortir la noirceur d’une musique qui donne, tout autant que l’action, son caractère étouffant (et émouvant) au spectacle.


Beau travail.




Stéphan Vincent-Lancrin

 

 

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