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Les trois coups

Paris
Orangerie du Domaine de Sceaux
07/09/2011 -  
Gaetano Donizetti : Rita, ou Le Mari battu

Amira Selim (Rita), Christophe Crapez (Peppe), Paul-Alexandre Dubois (Gasparo)
Caroline Dubost (piano)
Mireille Larroche (mise en scène), Valentine Solé (costumes), Mathieu Courtailler (lumières)




Mille quatre cent quarante. Peu de festivals ont à leur actif autant de concerts que de minutes en une journée: c’est que celui de l’Orangerie de Sceaux en est à sa quarante-deuxième édition, toujours sous la direction de Jacqueline Loewenguth. La principale oasis permettant d’apaiser la soif du mélomane parisien dans le désert musical que devient la capitale en juillet et en août n’a pas changé de formule: du 9 juillet au 4 septembre, deux concerts par semaine, le samedi et le dimanche après-midi. Comme de coutume, c’est la musique instrumentale qui constitue l’atout majeur d’une visite scéenne, avec cette année Khatia Buniatishvili, Jean-Philippe Collard, Claire Désert, Augustin Dumay, Cyprien Katsaris, Alain Meunier, Jean-Claude Pennetier, Nemanja Radulovic, le Trio Guarneri de Prague, les Quatuors Belcea, Modigliani, Parisii et Zemlinsky, ...


Cette année, la programmation consent toutefois deux exceptions: avant Jean-Pierre Marielle et Pascal Rogé pour «Dialogue avec mon jardinier» le 31 juillet, l’inauguration se fait avec la reprise d’une production de La Péniche Opéra, avec Rita, ou Le Mari battu (1841) – les trois coups ne sont donc pas frappés qu’au sens figuré. A en juger par de trop nombreuses chaises vides, le public reste peut-être attaché à une programmation plus traditionnelle, mais ceux qui sont venus ont visiblement passé un excellent moment, confirmant le succès que connaît, depuis sa redécouverte dans les années 1960, cet opéra comique en un acte de Donizetti créé à titre posthume salle Favart un siècle plus tôt.


Il est vrai que le Belge Jean-Nicolas-Gustave Van Nieuwen-Huysen, alias Gustave Vaëz (1812-1862), qui venait de collaborer à La Favorite avec Alphonse Royer, a réussi le tour de force consistant à trousser un livret (en français) loufoque sur un sujet qui, pourtant, ne prête guère à rire, encore moins aujourd’hui qu’alors: l’aubergiste Rita (soprano) n’hésite pas à battre de temps à autre son second mari, Peppe (ténor), car elle a elle-même été battue par son précédent époux, Gasparo (baryton), qu’elle croit désormais mort (et qu’il croit morte). Aussi prometteur en quiproquos qu’en misogynie, ce canevas conduit les deux maris, dans le désopilant duo «Il me vient une idée», à déterminer en jouant à la morra lequel d’entre eux gardera sa femme: et de tricher à qui mieux mieux... pour éviter à tout prix de gagner.


Donizetti parodie à l’avenant, saluant le vainqueur en... mineur et faisant triompher le vaincu en majeur. En une heure, les huit numéros épuisent toutes les combinaisons , de l’air (un chacun) au trio (à deux reprises) en passant par les trois duos mathématiquement possibles entre les trois personnages, avec une verve, un charme et une légèreté qui portent certes la marque italienne, mais qui s’apparentent en même temps sans peine aux canons français du genre. Les bis, donnés par les deux hommes, s’intègrent parfaitement au spectacle en confirmant cette double filiation: La danza (1835) de Rossini et un air ainsi qu’un duo tirés respectivement de Pépito (1853) et Ba-ta-clan (1855) d’Offenbach. Après tout, l’auberge de Rita n’est-elle pas située quelque part entre Gênes et Chambéry?


Adaptée aux contraintes de l’Orangerie, la mise en scène de Mireille Larroche fait mouche, sans vulgarité, avec un minimum d’accessoires d’un réalisme modeste (tables, nappes à carreaux, assiettes en plastique, verres Duralex, couverts, ...) et le couvercle du piano réquisitionné comme comptoir. Le vélo de Peppe détonne un peu, mais l’action est transposée dans les années 1960, grâce aux costumes vintage de Valentine Solé – Rita, son chemisier noué en vichy, sa jupe bouffante, ses lunettes noires et son foulard, Peppe en baba cool. Les tubes des Chats sauvages (Twist à Saint-Tropez) et des Chaussettes noires (Chérie, oh chérie), qu’on imagine diffusés par un juke-box, révèlent en outre des talents cachés de Paul-Alexandre Dubois: non content de chanter fort bien, il campe un Gasparo bondissant dans ses chaussures bicolores et se déhanchant sur ces rythmes yéyés avec juste ce qu’il faut de caricature. Avec Christophe Crapez, toujours aussi excellent dans le burlesque comme dans le lyrique, les rôles masculins sont décidément à la fête. Amira Selim monte facilement dans l’aigu et son colorature tend même à vriller le tympan avec l’aide de l’acoustique de l’Orangerie; sa diction est moyenne, son timbre ordinaire et son vibrato un peu étonnant pour une jeune cantatrice, mais elle est une actrice piquante, qui ne manque pas de chien. Au piano, Caroline Dubost apporte un soutien remarquable, qui fait presque oublier l’orchestre de la version originale.


Le site du festival de l’Orangerie de Sceaux
Le site de La Péniche Opéra
Le site de Christophe Crapez



Simon Corley

 

 

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