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Aida au pays des hommes bleus

Orange
Théâtre Antique
07/09/2011 -  & 12 juillet 2011
Giuseppe Verdi: Aida
Indra Thomas (Aida), Ekaterina Gubanova (Amnéris), Ludivine Gombert (La sacerdotessa), Carlo Ventre (Radamès), Andrezj Dobber (Amonasro), Giacomo Prestia (Ramfis), Mikhail Kolelishvili (Il Rè di Egitto), Julien Dran (Un messagero)
Chœurs de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse, des Opéras d’Angers-Nantes, Nice et Tours, Ensemble vocal des Chorégies d’Orange, Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev (direction musicale)
Charles Roubaud (mise en scène), Emmanuelle Favre (scénographie), Katia Duflot (costumes), Avi-Yona Bueno (lumières), Jean-Charles Gil (chorégraphie), Nicola Topor (vidéaste)


(© Philippe Gromelle)


Aida revient à Orange après une absence de seulement cinq ans. Il faut dire que la pompe de cette œuvre se prête au gigantisme de lieux comme le Théâtre Antique, les Arènes de Vérone ou le Sferisterio de Macerata où cette œuvre est un pilier incontournable de la programmation. L'emphase de certains passages fait souvent l'objet d'un traitement quasi hollywoodien, même si les Chorégies d’Orange ne vont pas jusqu’à l’utilisation extravagante de chameaux ou d’éléphants, comme c’est parfois le cas à Vérone.


Charles Roubaud est un metteur en scène chevronné et respecté. Sa liste de succès, notamment à l’Opéra de Marseille, est déjà longue. Il signe ici sa troisième mise en scène d’Aida à Orange, après 1995 et 2006. Roubaud place l’action à l’époque de la création de l’œuvre dans une Egypte résolument musulmane, où seuls quatre sphinx trônant côté cour et côté jardin évoquent celle des pharaons. Discrètes aussi, les allusions à la main mise européenne sous forme de quelques uniformes britanniques dans l’entourage du souverain. Même si cette évocation est parfois un peu hétéroclite on ne s’étonnera pas de voir le Roi en grand uniforme de sultan européanisé, coiffé d’une chechia rouge, hommes et femmes portant sarouels et pantalons bouffants, et les soldats égyptiens parés du costume bleu des touareg. La scène du premier acte qui se déroule dans le harem et voit l’affrontement des deux rivales est particulièrement réussie. Les rites du purdah sont évoqués avec un soin méticuleux. L’effet, renforcé par les luxueux costumes de Katia Duflot coupés dans des tissus vaporeux aux teintes safranées, ainsi que les superbes projections d’architecture mauresque, de mosaïques et de moucharabieh, dues à Nicola Topor, est des plus évocateurs. Odeurs d’encens et eunuques serviles viennent compléter un tableau qui ne manque pas d’allure. Au deuxième acte, la scène du triomphe de Radamès est abordée avec une ampleur qui reste dans les limites du bon goût. Les mouvements de la soldatesque égyptienne et des prisonniers éthiopiens, en tout environ deux cents personnes, sont réglés avec précision. Ce tableau présente un ballet africain - ici encore avec de magnifiques costumes aux couleurs vives - dont la chorégraphie spectaculaire est signée Jean-Charles Gil. Curieusement, c’est l’acte du Nil, pourtant le plus beau musicalement, qui est le moins réussi. Dans les deux duos, la scène est réduite à sa plus simple expression et les chanteurs, livrés à eux-mêmes, se perdent dans l’immense espace scénique.



I. Thomas & E. Gubanova (© Philippe Gromelle)



Musicalement, ce cru 2011 est tout juste satisfaisant. L'Aida de l’Américaine Indra Thomas offre quelques jolis moments, mais la voix est inégale et manque de puissance pour un lieu aussi vaste. Le chant se perd dans les ensembles et disparaît carrément dans les forte de l’orchestre. Sans être franchement répréhensibles, son « Ritorna vincitor » du premier acte et son « O patria mia » dans le troisième souffrent d’une projection insuffisante. Dans un espace plus restreint, Thomas pourrait peut-être donner satisfaction. Le Radamès de Carlo Ventre est sans éclat particulier. Certes la voix ne manque pas de vaillance mais l’incarnation du personnage reste sommaire. Son « Celeste Aida » n’est ni fait, ni à faire. La seule à tirer son épingle du jeu est sans aucun doute la mezzo-soprano russe Ekaterina Gubanova dans le rôle d’Amnéris: voix puissante, charnue, égale dans tous les registres. Son personnage est autoritaire sans tomber dans la caricature. Andrezj Dobber est à la hauteur de la tâche dans le rôle d’Amonasro, tandis que Giacomo Prestia (Ramfis) et Mikhail Kolelishvili (Il Rè di Egitto) se distinguent par la puissance de leur voix, plus que par la beauté du chant. Les chœurs font un travail remarquable de cohésion et de musicalité. Ce n’est pas une mince affaire que d’obtenir une telle qualité avec presque deux cents choristes. Chaleureuses félicitations à leurs chefs : Sandrine Abello, Aurore Marchand, Giulo Magnanini, et Emmanuel Trenque.


L’autre triomphateur de la soirée, c’est Tugan Sokhiev, directeur musical du très bon Orchestre national du Capitole de Toulouse. A peine âgé de trente-trois ans, ce chef est pétri de talent. Sa baguette, tantôt enflammée, tantôt lyrique, est toujours rigoureuse et précise. Sokhiev ne se laisse pas damer le pion par le plateau: la partition de l’orchestre est superbe et il entend bien le montrer.


En co-production avec le Festival de Massada, cette Aida a été donnée le mois dernier en Israël.


Le site des Chorégies d’Orange
Le site du Festival de Massada



Christian Dalzon

 

 

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