About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Romantique à souhait

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
05/10/2011 -  et 6 (Wien), 8 (Luxembourg), 11 (Bruxelles) mai 2011
Robert Schumann : Ouverture «Die Braut von Messina», opus 100 – Concerto pour violon en ré mineur
Johannes Brahms : Symphonie n° 1 en ut mineur, opus 68

Gidon Kremer (violon)
Sächsische Staatskapelle Dresden, Christoph Eschenbach (direction)


C. Eschenbach (© Eric Brissaud)


Faible affluence ce soir avenue Montaigne alors que Paris accueillait pourtant un orchestre de renom, celui de la Staatskapelle de Dresde. Cette formation, qui brille «comme l’éclat du vieil or» (Herbert von Karajan) et qui plonge ses racines dans l’ancien ensemble créé par un décret pris le 22 septembre 1548 par le prince-électeur Moritz de Saxe, reste célèbre pour avoir notamment créé plusieurs œuvres majeures de Richard Strauss et pour avoir connu des directeurs musicaux aussi charismatiques que, par exemple, Ernst von Schuch (nommé directeur de l’«opéra de la Cour» en 1880, il meurt en fonction en 1914), Joseph Keilberth (de 1945 à 1950), Giuseppe Sinopoli, Bernard Haitink («chef principal» de 2002 à 2007) et, prochainement, Christian Thielemann, qui prendra la tête de l’orchestre en 2012. Il n’était donc pas étonnant que, lors de ses dernières venues au Théâtre des Champs-Elysées sous la baguette de Georges Prêtre dans un programme à dominante viennoise puis, plus récemment encore, de Vladimir Jurowski dans un programme russe, on ait pu entendre un orchestre d’une exceptionnelle qualité.


Aussi est-on quelque peu surpris de s’engager ce soir dans un concert qui, cinquième prestation au cours d’une tournée européenne marathon de quelques jours, débutait mollement par une rare ouverture de Robert Schumann (1810-1856), celle de La Fiancée de Messine, moins connue que celles de Genoveva, Manfred ou, même, Hermann et Dorothée. Rappelant par son caractère ouvertement dramatique et conquérant certaines ouvertures de Félix Mendelssohn (on pense inévitablement à celle des Hébrides), dotée d’une rythmique complexe, elle permet certes à Christoph Eschenbach de faire briller les cordes de la Staatskapelle, mais la clarinette solo manque pour sa part d’un évident velouté qui rend ses interventions fort peu séduisantes.


Un mois plus tôt, Philippe Herreweghe et Thomas Zehetmair donnaient déjà le Concerto pour violon de Schumann dans une interprétation peu convaincante, en raison principalement d’un soliste très en deçà des exigences de la partition. Rien de cela ce soir, Gidon Kremer ayant véritablement rendu ses lettres de noblesse à une œuvre qu’il connaît bien pour l’avoir enregistrée avec succès à au moins deux reprises sous la direction de Riccardo Muti (EMI) puis, plus récemment, sous celle de Nikolaus Harnoncourt (Teldec). Aidé il est vrai par six magnifiques contrebasses, Eschenbach donne immédiatement une robustesse et une dynamique orchestrales qui faisaient défaut au premier mouvement sous la direction de Herreweghe, les cordes de Dresde se montrant véritablement sous leur meilleur jour. Dans ce contexte, Kremer, se jouant de la moindre difficulté technique, se plaît à simplement faire de la musique là où Zehetmair peinait à s’approprier la partition. Abordant le deuxième mouvement avec légèreté, rejoint, outre le cor et le basson, par les délicates interventions du violoncelliste solo Isang Enders, Gidon Kremer ménage avec adresse la transition avec le troisième mouvement, parfaitement enlevé à la manière du Rondo en la majeur de Schubert dont il a d’ailleurs laissé une magnifique gravure. Très légitimement salué par le public, Kremer revient à ses «véritables» amours en donnant en bis une pièce aux sonorités étonnamment contemporaines alors qu’elle a pourtant été composée en 1942, la première pièce («Ménétrier») des Impressions d’enfance de Georges Enesco.


Après l’entracte, retour au répertoire romantique, avec l’emblématique Première Symphonie de Johannes Brahms (1833-1897). Cet homme d’âge mûr, dont Schumann disait à propos de ses premières pièces destinées au piano qu’elles étaient des «symphonies voilées», réalisait enfin son ambition après avoir porté l’œuvre en lui pendant plus de vingt ans, la composition s’étant étalée de 1854 à 1876. Les premiers martèlements des timbales alliés au puissant legato des cordes donnent au premier mouvement une force tellurique impressionnante malheureusement entrecoupée par quelques césures imposées par Eschenbach. Le deuxième mouvement met à l’honneur le premier violon solo Kai Vogler même si c’est véritablement l’ensemble de l’orchestre qui doit être salué ici, tant pour sa délicatesse que pour son sens de l’équilibre. Après un troisième mouvement prosaïque, Christoph Eschenbach aborde avec vitalité le dernier mouvement où, tout spécialement dans le Più andante, s’illustre un somptueux pupitre de cors. Sans être exempt de quelques faiblesses et, surtout, de quelques facilités (ralentis excessifs, dynamique des nuances parfois artificielle), force est de constater que le chef et son orchestre emportent la conviction du public qui ovationne l’ensemble des interprètes sitôt le dernier accord tombé.


Lors de la première viennoise de cette symphonie le 17 décembre 1876, le redoutable et redouté critique Eduard Hanslick y avait vu l’«étroite affinité de Brahms avec l’art de Beethoven»: peut-être est-ce la raison pour laquelle Eschenbach et la Staatskapelle donnent en bis l’Ouverture des Créatures de Prométhée. La boucle était ainsi bouclée...


Le site de l’Orchestre de la Staatskapelle de Dresde
Le site de Christoph Eschenbach



Sébastien Gauthier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com