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Insubmersible

Paris
Théâtre du Châtelet
05/04/1998 -  
Lieder de Johannes Brahms, Gustav Mahler
Deborah Polaski (soprano), Charles Spencer (piano)

Pour ce dernier midi musical, la soprano américaine Deborah Polaski proposait un programme de Lieder de Brahms et Mahler. Des spécificités des deux compositeurs, rien ne sera retenu : Deborah Polaski chante Brahms et Mahler comme elle chante Wagner et Strauss : en force, sans profondeur, sans voile. Son chant est presque brutal, trop franc, sans faux-semblants. Timbre et vibrato sont uniformes. L’essentiel de sa performance - le terme est ici de rigueur - repose sur sa puissance sonore, qui lui permet de jouer d’une palette d’intensités très large. Deborah Polaski est une machine que rien ne peut arrêter, conçue en vue de l’efficacité la plus grande au moindre coût. Sa marche inéluctable est sans surprises, sans déceptions, elle abandonne l’auditeur, lassé et sans attentes, sur le bord de la route. A l’image de son expressivité vocale, son jeu corporel est rudimentaire. Quel que soit le ton du Lied chanté, son visage est comme tendu vers sa voix, elle-même tendue vers le volume maximum.

Si la qualité d’une chanteuse se mesure - terme encore une fois de rigueur - à sa puissance, sa fermeté, sa présence sonore, Deborah Polaski est une gigantesque chanteuse, à qui il ne manque que la musicalité. Quelques efforts se font cependant sentir en de rares instants de musique : la chanteuse s’assouplira peut-être avec le temps, elle apprendra peut-être le jeu, l’expression, l’art de la défaillance. Elle serait alors enfin à la hauteur de ses engagements.
Pour le salut des auditeurs, Charles Spencer est un interprète de Lied exceptionnel. Son jeu très musical, tout de finesse et de nuances, se tenait prêt à voler la vedette à la soprano. Si la mécanique était du côté des lumières, l’ombre, elle, chantait.



Gaëlle Plasseraud

 

 

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