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Lyrismes slaves

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
12/16/2010 -  et 17 décembre 2010
Igor Stravinsky :Concerto pour cordes en ré
Franz Liszt : Concerto pour piano N° 1
Jan Sibelius : Symphonie N° 1

Jean-Yves Thibaudet (piano)
Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Kirill Karabits (direction)


Kirill Karabits a souvent dirigé l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg pendant la période d’intérim entre les mandats de Jan Latham Koenig et Marc Albrecht, concerts de transition où l’orchestre bataillait avec beaucoup de failles d’ensemble et d’écoute mutuelle. Aujourd’hui la situation a bien changé et ce retour d’un Kirill Karabits qui a mûri, à la tête d’une formation qui elle aussi a beaucoup évolué, nous vaut une soirée d’un niveau magistral. On apprécie en particulier la belle lisibilité d’une gestique originale, qui semble inventer à l’instant les effusions mélodiques de musiques choisies pour leur potentiel expressif. Aujourd’hui chef permanent de l’Orchestre de Bournemouth et musicien chevronné, Karabits nous convainc sans peine de sa valeur, au moins dans la plupart des musiques post-romantiques où la technicité orchestrale joue un rôle majeur. Pour les grandes symphonies du répertoire l’évolution sera peut-être plus lente, mais ce n’est pas pour l’instant ce type de programmation que Karabits privilégie, et sans doute avec raison.


Au sein d’un programme d’un accès aisé on peut être surpris de trouver le Concerto pour cordes dit « de Bâle » d’Igor Stravinsky, d’un néo-classicisme qui peut vite sonner sec et désincarné. Grâce à l’engagement du chef, à son art d’aller solliciter les thèmes au fond des pupitres et à les faire vivre sans raideur, on découvre pourtant une œuvre chaleureuse, attirante même, comme on la connaissait peu auparavant sous des baguettes d’obédience boulézienne, voire sous la direction naguère de Paul Sacher, son commanditaire et premier exécutant.


Pour la Première Symphonie de Sibelius les difficultés sont inverses, dans une oeuvre où le compositeur scandinave paraît encore en recherche d’identité et cultive une effusion mélodique qui semble tout droit sortie du grand répertoire russe, avec quelques ruptures de discours abruptes déjà annonciatrices d’un style plus rugueux. Karabits sculpte ici les masses et conduit les phrases avec une sûreté et un goût qui paraissent parfaitement en situation. Et l’orchestre le suit avec un très bel ensemble et des premiers pupitres remarquablement sûrs. Au nombre de ceux-ci on a d’ailleurs la surprise de reconnaître la haute silhouette de Christian Ostertag, le Konzermeister de l’Orchestre du SWR de Baden-Baden et Freiburg, invité pour deux concerts à occuper le poste de premier violon super-soliste actuellement vacant à Strasbourg.


En milieu de programme l’arrivée sur scène de Jean-Yves Thibaudet dans l’une de ces tenues de concert originales qu’il affectionne produit son petit effet. On peut signaler au passage que la mode de la veste taillée une ou même deux tailles en dessous du nécessaire sévit ce soir là autant chez le pianiste que chez le chef, mais sans paraître trop entraver la liberté de mouvement ni de l’un ni de l’autre… C’est en tout cas tout le confort qu’on leur souhaite, en n’arrivant cependant pas à imaginer que des tenues aussi étriquées puissent offrir la même aisance que les bons vieux fracs traditionnels. Heureusement rien dans le Premier Concerto de Liszt ne sonne corseté ni incertain, avec au contraire une démarche continuellement flamboyante, à peine perturbée ici ou là par quelques coquetteries. Pianistiquement toutes les embûches physiques de l’ouvrage paraissent négociées quasiment sans accident, la vision des mains du soliste animées de trémolos frénétiques produisant évidemment l'effet de vertige attendu. Mais surtout ce Concerto est traité comme un vrai poème symphonique avec piano principal et non comme une représentation de cirque, une pondération et une musicalité dont on sait gré autant au chef qu’au pianiste.


En bis un Intermezzo Op. 118 N° 2 de Brahms parfaitement équilibré, au tempo allant et à la partie médiane chantée sans pathos, complète harmonieusement la performance d’un pianiste souvent réinvité à Strasbourg, et à juste titre.



Laurent Barthel

 

 

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