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Bob Wilson tel qu’en lui-même

Paris
Opéra Bastille
01/16/2011 -  et 19, 22, 27, 29 janvier, 1er, 4, 7, 10, 14 février 2011
Giacomo Puccini : Madama Butterfly
Micaela Carosi (Cio-Cio San), Enkeledja Shkosa (Suzuki), Anna Wall (Kate Pinkerton), James Valenti (F.B. Pinkerton), Anthony Michaels-Moore (Sharpless), Carlo Bosi (Goro), Vladimir Kapshuk (Principe Yamadori), Scott Wilde (Lo Zio Bonzo), Jian-Hong Zhao (Yakuside), Slawomir Szychowiak (Il Commissario Imperiale), Andrea Nelli (L’Ufficiale del Registro), Ilona Krzywicka (La Madre di Cio-Cio San), Vania Boneva (La Zia), Catherine Hirt-André (La Cugina), Théo Vandecasteele/Randi Razafijaonimanana (Il Figlio di Cio-Cio San)
Orchestre et Chœur de l’Opéra national de Paris, Maurizio Benini (direction)
Robert Wilson (mise en scène)


M. Carosi (© Elisa Haberer/Opéra national de Paris)


Maintes fois reprise, la production est connue depuis presque vingt ans. Du pur Bob Wilson, qu’on vénère ou qu’on déteste. Une froideur, un minimalisme ne correspondant guère à la musique, à sa sensualité surtout, mais excellant à souligner combien les personnages restent étrangers les uns aux autres, pas seulement parce qu’ils appartiennent à des mondes différents – l’enfant, lui aussi, semble étranger à ce qui se déroule autour de lui. Ainsi se justifie le statisme hiératique des gestes, où s’inscrit d’emblée la tragédie - on ne croit guère, au premier acte, à la possibilité du bonheur, tant il semble artificiel dans ce décor abstrait. La mise en scène, comme toujours chez Bob Wilson, réside de toute façon autant dans la subtilité des lumières que dans celle de la direction d’acteurs : ces bleus crus ou irisés, ces rouges incendiés, ces ocres, nous en disent plus que tout sur l’histoire, à travers une sorte de narration chromatique. Voilà décidément une des meilleures réussites du Texan – à condition d’adhérer à son esthétique. On ne lui reprochera d’ailleurs pas d’oublier l’Orient : il le revisite, l’épure, le débarrasse de ce pittoresque qui alimentait les fantasmes occidentaux, en préserve l’étrangeté lointaine et inaccessible – un plancher, une allée de gravier suffisent à évoquer la maison de Cio-Cio-San. Oui, il y a là, décidément, de quoi fasciner ou agacer... essence ou négation du théâtre...


Micaela Carosi avait plutôt séduit en Madeleine d’André Chénier ; elle n’apparaît pas ici au meilleur de sa forme : il faut un moment pour que la voix trouve son assise, les aigus resteront toujours incertains et bas, le médium modeste. La caractérisation, elle aussi, ne s’affirme que peu à peu, l’héroïne semblant trop lisse au début et ne variant guère les couleurs – héroïne vériste, Cio-Cio-San est un rôle belcantiste. C’est finalement au dernier acte que Butterfly est vraiment devant nous, déchirée et déchirante, avec une voix enfin déployée. James Valenti, lui, reste très en deçà de ce qu’on attend d’un Pinkerton : une voix dépourvue de charme et d’éclat, qui peine à se projeter et se tend perpétuellement sous l’effort, là où l’on attend un timbre solaire, une émission aisée et un chant irradiant – le public l’a d’ailleurs un peu chahuté. Le Sharpless d’Anthony Michaels-Moore, en revanche, est nuancé et subtilement campé - on doit cependant toujours passer sur une émission engorgée. Autour d’eux, des seconds rôles bien tenus, malgré une Suzuki assez pâle d’Enkelejda Shkosa, en particulier le Goro de Carlo Bosi, obséquieux et hypocrite.


Maurizio Benini, comme dans L’Italienne à Alger, témoigne d’un métier sûr, plus efficace qu’inventif, bon chef de répertoire, qui sait faire avancer le drame, sans s’alanguir ni se précipiter, sans non plus révéler pleinement les séductions capiteuses et les raffinements quasi impressionnistes de l’orchestre puccinien.


Nicolas Joel veut faire un opéra de répertoire, dont les reprises constituent une sorte de fonds de roulement, portées par les meilleurs chanteurs. Ce n’est pas tout à fait le cas ici.



Didier van Moere

 

 

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