About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

L’apothéose de l’année Chopin

Paris
Salle Pleyel
12/07/2010 -  
Frédéric Chopin : Vingt-quatre Préludes, opus 28 – Prélude, opus 45 – Deux Nocturnes, opus 27 – Scherzo n° 1, opus 20 – Etudes, opus 25 n° 1, 2, 3, 4, 7, 10, 11 et 12

Maurizio Pollini (piano)


M. Pollini (© Philippe Gontier/DG)


Assister à un récital de Maurizio Pollini est un privilège. Les spectateurs de Pleyel l’ont bien compris – en tout cas ceux (l’immense majorité) capables de se concentrer davantage sur la musique que sur le gratouillement de leur gorge ou le tintinnabulement de leur mobile –, investissant massivement la salle jusque sur scène (où quatre-vingt chaises supplémentaires entourent l’instrument). Image saisissante, d’ailleurs, que celle du vieux lion transalpin (né en 1942), éclairé par une unique et intense lumière jaune, au milieu de son public, évoquant irrésistiblement la célèbre pochette du disque du retour d’Horowitz à Moscou. «Live in Paris»: ce sera peut-être le titre de l’enregistrement qui sortira – un jour (un micro trônant solennellement au-dessus du piano) – pour documenter le Pollini tardif, celui de la pleine maturité, conciliant puissance digitale (ce ne sont pas les quelques fausses notes qui pourraient contredire cette évidence, maintes fois vérifiée en cinquante ans de carrière) et émotion du jeu. Oubliée... la supposée «froideur» qui lui collait à la peau au siècle dernier (ConcertoNet ayant pu écrire, aussi tard qu’en 1998, «que perdure le mythe injustifié d’un jeu froid et sec [expliquant] que soit difficilement accordée à Maurizio Pollini la place qu’il mérite parmi les plus grands de ce siècle»).


Retour aux fondamentaux, donc, avec ce récital entièrement consacré au compositeur qui lui donna son titre de gloire lors du concours Chopin en 1960. Le risque, pour le critique, est évidemment de se répéter. Car, reprenant exactement le même programme que celui donné en début d’année au Carnegie Hall de New York (lire ici) et achevant de satisfaire le gourmand appétit ouvert l’an dernier, salle Pleyel, dans un demi-récital Chopin (lire ici), Maurizio Pollini mérite, dans ce répertoire, les mêmes compliments que ceux que la communauté des mélomanes ne cesse de lui adresser depuis sa victoire varsovienne. Aucune œuvre rare dans le répertoire chopinien du pianiste, mais des interprétations incontestables, à l’image de ces Vingt-quatre Préludes joués d’une traite – dont ConcertoNet a déjà dit qu’ils constituaient «a performance for the ages, as golden as any from the fabled past» (lire ici). Un Opus 28 où les accords implacables laissent place à une grande variété d’émotions, où la virtuosité s’immobilise d’un coup dans des paysages dévastés ou poignants, où la concentration et la cohérence du propos se manifestent davantage encore dans les enchaînements entre préludes que dans leur développement individuel.


Alors que l’artiste italien fait la révolution du rythme dans un Opus 27 déployé comme un étendard de liberté (alternant cris de bonheur et murmures de souffrance), le Premier Scherzo et, au-delà, la sélection d’Etudes respirent l’impatience jubilatoire, presque juvénile par moments (dans l’ivresse de la cavalcade, le frisson de la mélodie ou la rage fougueuse de vivre) – comme pour combattre la fatigue des poignets et des muscles qu’un récital aussi long et intense ne peut évidemment faire taire chez un presque septuagénaire. La reconnaissance de l’interprète envers son public s’exprime – comme à chaque fois – jusque dans la générosité des bis, offrant comme en 2007 au public parisien l’Etude «Révolutionnaire», la Première Ballade et la Berceuse, avant de prendre congé sur l’Etude opus 10 n° 4, acclamé debout par une salle comblée. Parvenu au terme de l’année 2010 – celle du bicentenaire de la naissance de Frédéric Chopin –, on a en quelque sorte l’impression d’en avoir connu l’apothéose.



Gilles d’Heyres

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com