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De la maison des morts

Paris
Opéra Bastille
09/09/2010 -  et 14, 21, 24, 27, 30 septembre, 3, 6, 9 octobre 2010
Richard Wagner : Der fliegende Holländer
James Morris (Le Hollandais), Adrianne Pieczonka (Senta), Klaus Florian Vogt (Erik), Matti Salminen (Daland), Marie-Ange Todorovitch (Mary), Bernard Richter (Der Steuermann)
Orchestre et Chœur de l’Opéra National de Paris, Peter Schneider (direction)
Willy Decker (mise en scène)


A. Pieczonka (© Opéra national de Paris/Frédérique Toulet)


Si la nouvelle saison de l’Opéra National de Paris verra s’achever le Ring (lire ici), c’est Le Vaisseau fantôme (1843) du même Richard Wagner (1813-1883) qui lance les festivités bastillaises, mettant à l’affiche la production – maintenant bien rodée – de Willy Decker (également à l’honneur en septembre avec la reprise de son Eugène Onéguine de 1995). On ne présente plus cette mise en scène créée en 2000 (lire ici) et remontée notamment en 2002 (lire ici), tout autant psychanalytique que dramatique, qui fait de Senta le centre d’un ouvrage se déroulant moins sur scène que dans son imaginaire névrosé. Dans cette maison des esprits qu’est la demeure de Daland, où la ballade de Senta se transforme en séance de spiritisme, l’apparition de l’ombre des marins du Hollandais sur la toile de fond fait l’effet d’un ballet des morts-vivants – qui s’animent comme des flammes lugubres dans un fond rouge-sang. Faisant le choix de l’intimité du drame familial lors du suicide de Senta – une mort sans rédemption –, cette production a pour elle l’efficacité de la cohérence.


Plus efficaces encore: les matelots robustes et sémillants du chœur de l’Opéra – excellemment préparés par Patrick Marie Aubert, dont le travail sur l’homogénéité et la maîtrise de la ligne de chant porte des fruits qui promettent beaucoup pour le reste de la saison (on pense surtout au Crépuscule des Dieux de juin prochain). Si l’on est plus réservé sur la qualité des voix féminines de l’ensemble parisien, l’orchestre fait une rentrée en fanfare – les cordes étant vives et souples dès l’ouverture, les cuivres respirant vaillance et vigueur (malgré de petits accrocs), les pupitres sachant se contenir pour mieux se déchaîner sous la baguette experte (bien que sans surprise) de Peter Schneider. Côté solistes, une équipe de grande qualité a été réunie par Nicolas Joel – nouvelle illustration des qualités qu’on lui prête pour composer ses distributions –, qui convie deux immenses wagnériens, deux artistes débutant sur la scène de l’Opéra de Paris et deux seconds rôles. On n’épiloguera pas sur ces derniers – honorables mais sans relief –, Bernard Richter faisant bonne figure en Steuermann (malgré un manque de projection et de moelleux dans la voix), la voix trop étouffée de Marie-Ange Todorovitch convenant en définitive assez bien au personnage de la nourrice.


La deuxième paire était particulièrement engageante, vu l’expérience wagnérienne presque sans équivalent qu’affichent les curriculum vitae de James Morris et Matti Salminen. L’épreuve des années a malheureusement davantage atteint la voix du premier: et pourtant, si le temps a passé sur ce Hollandais à l’intonation un peu basse, au vibrato prononcé, au souffle parfois court, l’autorité de James Morris reste intacte et, une fois l’organe bien chauffé (comme dans le trio conclusif avec Senta et Erik), c’est vraiment un Wanderer qu’on admire sur la scène. Quant au Daland de Matti Salminen – un rôle qu’il chantait déjà à Bayreuth en 1978 et qu’il n’a cessé d’interpréter de par le monde (lire par exemple ici) –, c’est peu dire qu’il est tout aussi exemplaire dans sa caractérisation vocale et dramatique.


Pour leurs débuts à l’Opéra de Paris, ce sont pourtant Adrianne Pieczonka et Klaus Florian Vogt qui recueillent l’accueil le plus chaleureux. Avec son physique à la Varnay, la soprano canadienne offre d’emblée une présence dans Senta. Si sa ballade laisse plutôt froid, la voix s’épanouit par la suite – dominant aisément celle de James Morris dans le premier échange – et, sans être impérissable, l’incarnation vocale est réussie (des aigus maîtrisés, une belle souplesse d’émission). Attraction de la soirée: l’Erik du ténor allemand Klaus Florian Vogt, à la voix claire et sans vibrato, facile dans tous les registres, mozartienne dans son style: un luxe dans ce rôle plutôt mineur pour un chanteur désormais acclamé comme un Lohengrin, un Parsifal, un Walther (lire ici ou ici) de premier plan et présenté comme un «Heldencrooner» par Pierre Flinois dans le numéro de rentrée du magazine de l’Opéra, où l’on apprend incidemment – et l’on s’en réjouit – que Vogt reviendra sur la scène parisienne lors des saisons futures.


Le site de l’Opéra National de Paris
Le site d’Adrianne Pieczonka
Le site de Klaus Florian Vogt



Gilles d’Heyres

 

 

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