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Clinquant

Paris
Salle Pleyel
05/17/2010 -  et 21 (Luxembourg), 22 (Praha) mai 2010
Johannes Brahms : Concerto pour violon, opus 77
Dimitri Chostakovitch : Symphonie n° 5, opus 47

Anne-Sophie Mutter (violon)
Pittsburgh Symphony Orchestra, Manfred Honeck (direction)


M. Honeck (© Toshiyuki Urano)


Bien que ne faisant pas partie des «Big Five», l’Orchestre symphonique de Pittsburgh a toujours joui d’une excellente réputation: le même soir que la Staatskapelle de Dresde au Théâtre des Champs-Elysées, il y avait d’autant plus de raisons de privilégier sa venue salle Pleyel que ses visites dans la capitale sont autrement plus rares, puisque la dernière remonte à l’hiver 1996 avec Lorin Maazel, dans le cadre de la tournée qui marquait alors le centenaire de l’orchestre. Avec Manfred Honeck, qui en est le music director depuis septembre 2008, succédant à une troïka qui associait Andrew Davis, Yan Pascal Tortelier et Marek Janowski, il parcourt à nouveau l’Europe du 15 au 29 mai: un programme chargé, puisqu’il ne comporte pas moins de douze concerts dans huit pays (Suisse, Allemagne, France, Luxembourg, République Tchèque, Autriche, Hongrie, Slovénie). S’il a accompli, à ce jour, une carrière moins flamboyante que certains de ses huit prédécesseurs à ce poste, tels Fritz Reiner (1938-1948), André Previn (1976-1984), Lorin Maazel (1988-1996) ou même William Steinberg (1952-1976) et Mariss Jansons (1997-2004), le chef autrichien (né en 1958), qui s’est produit à plusieurs reprises avec le Philharmonique de Radio France (voir notamment ici et ici), est par ailleurs Generalmusikdirektor à Stuttgart depuis 2007 et premier chef invité de la Philharmonie tchèque depuis 2008.


Pour le public, la principale raison de se déplacer résidait sans doute davantage dans la notoriété de la soliste. Belle comme un Soulages dans son fourreau noir, Anne-Sophie Mutter (née en 1963) ne faillit pas à sa réputation dans le Concerto (1878) de Brahms: son violon toujours aussi puissant et somptueux en offre une exécution irréprochable, hormis un petit flottement dans le Finale. Mais il est permis de concevoir et d’apprécier d’autres visions de cette musique, qui échapperaient à ces excès de sauvagerie et de langueur, à ces œillades tziganes et à ces glissades glamour, à ce jeu caressant et onctueux, à ces portamenti longs comme le bras, à cet hédonisme envahissant, où même les crissements de l’archet semblent soigneusement mis en scène. Un jeu «à l’américaine», en quelque sorte, avec lequel l’orchestre se montre parfaitement en phase, déployant une sonorité massive, assise sur soixante cordes (dont neuf contrebasses) d’une force impressionnante, sous la direction volontiers monumentale et appuyée de Honeck. Très longuement ovationnée, la violoniste allemande n’évite pas... l’inévitable Sarabande de la Deuxième partita de Bach, dans un style étrangement hybride, faisant alterner vibrato restreint et grands élans romantiques. A l’issue de ce bis attendu, elle prend une initiative en revanche nettement plus inhabituelle, faisant lever l’orchestre à deux reprises pour le remercier et l’associer ainsi à son succès.


En octobre dernier au Théâtre des Champs-Elysées, la Cinquième symphonie (1937) de Chostakovitch était déjà à l’affiche de l’Orchestre de Cleveland (voir ici), autre phalange américaine qui n’était pas venue à Paris depuis fort longtemps, et, quelques semaines plus tard, le National avait lui aussi donné cette Cinquième (voir ici). Si l’interprétation de Manfred Honeck paraît moins convaincante que celles de Franz Welser-Möst et Daniele Gatti, ce n’est pas à cause des musiciens, car l’Orchestre symphonique de Pittsburgh possède les qualités typiques de la plupart des formations d’outre-Atlantique, cette épatante cohésion, ce professionnalisme instrumental, ce son à la fois éclatant et gras, à l’image de ces cuivres rutilants et veloutés: une armée en ordre de marche, qu’un chef prend certainement grand plaisir à commander. Mais Honeck, qui, dans un avant-propos inséré dans le programme de salle, fait pourtant référence à Mahler, s’en tient plutôt à une certaine idée de Tchaïkovski. Il demeure prisonnier d’un premier degré qui réduit la partition à un showcase destiné à rouler des mécaniques. A cet égard, le début du deuxième mouvement est tout à fait emblématique: vrombissements des cordes graves, vocifération des cors et moqueries de la petite clarinette, tout est surjoué. Rien d’étonnant, dès lors, après un Largo beaucoup plus abouti, à ce que la péroraison, apothéose triomphale et clinquante, ne laisse aucune place à l’ambiguïté.


Avalanche de bis à la grande satisfaction des spectateurs: après Chostakovitch, «Au matin» de Grieg, extrait de la Première suite de Peer Gynt (1876/1888), tombe un peu comme des cheveux sur la soupe, mais le Galop extrait de Mascarade (1940/1944) de Khatchatourian s’avère d’autant plus opportun que l’excellent clarinettiste complète son solo par des citations de la Cinquième symphonie de Chostakovitch. C’est la Cinquième des Danses hongroises (1869) de Brahms qui conclut, tout à tour ronflante et précipitée.


Le site de l’Orchestre symphonique de Pittsburgh
Le site d’Anne-Sophie Mutter



Simon Corley

 

 

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