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Fougue et léthargie beethovéniennes

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
02/04/2010 -  et 2 février 2010 (Bristol)
Ludwig van Beethoven : Ouverture de «Coriolan», en ut mineur, opus 62 –Symphonies n° 4 en si bémol majeur, opus 60, et n° 7 en la majeur, opus 92

Orchestra of the Age of Enlightenment, Vladimir Jurowski (direction)


V. Jurowski (© Roman Gontcharov)



Concert on ne peut plus «classique» avec un programme exclusivement consacré à Ludwig van Beethoven (1770-1827): peut-être est-ce la raison pour laquelle le Théâtre des Champs-Elysées était moyennement rempli, la concurrence des autres salles parisiennes ayant vraisemblablement aussi sa part de responsabilité de cette relative désaffection. L’affiche était pourtant prometteuse puisqu’elle associait un jeune chef déjà bien en vue, Vladimir Jurowski, avec un ensemble d’époque sans être baroque, le superbe Orchestre de l’Age des Lumières. Il est d’ailleurs à noter que ce programme, donné pour la seconde fois, s’inscrivait dans le cadre d’une quasi-intégrale des Symphonies de Beethoven (la Pastorale ne figurant pas dans le cycle) qui seront respectivement dirigées par Iván Fischer (à Londres et à New York en mars) et par Sir Charles Mackerras (pour la seule Neuvième à Londres, en avril). Malheureusement, pour le concert de ce soir, en dépit d’applaudissements chaleureux et de quelques «bravos», il donne une sérieuse impression d’inachevé, les marges de progression s’avérant en fin de compte assez nombreuses.


Contrairement à ce que l’on peut parfois penser, c’est au Coriolan de Joseph von Collin (1771-1811), juriste et dramaturge qui avait aidé le compositeur sur son opéra Leonore, et non à celui de William Shakespeare qu’est destinée la célèbre ouverture (1807). Le thème, celui de l’homme angoissé condamné à disparaître s’il ne peut vivre en société, est illustré par une même pulsation mélodique et rythmique qui inaugure et termine l’œuvre tout à la fois, portée par un orchestre dramatique à souhait. C’est peut-être ce qui fait défaut ce soir: le drame n’est pas assez présent, Jurowski en donnant une interprétation à la fois sèche et précipitée, gommant le côté haletant de l’œuvre qui perd ainsi son caractère à la fois sombre et désolé (qu’illustrent pourtant magnifiquement les derniers pizzicati).


Pas davantage de mystère au début de la Quatrième symphonie, composée en 1806 et coincée entre ses deux immenses sœurs que sont l’Héroïque et la trop fameuse Cinquième. L’Adagio liminaire est de nouveau caractérisé par une grande sécheresse (renforcée à la fois par l’acoustique du Théâtre des Champs-Elysées et les timbres des instruments d’époque), les arêtes se font tranchantes et la transition avec l’Allegro vivace perd ainsi de son importance, l’appréhension des deux séquences étant de la même veine. Ajoutons-y quelques imperfections instrumentales (l’entrée en retard du basson, le timbre mal défini de la clarinette du pourtant excellent Antony Pay) et l’on se dit que la suite va être quelque peu hasardeuse. En réalité, elle est surtout mitigée. Si le deuxième mouvement (Adagio) manque de poésie, on admire néanmoins la finesse de l’interprétation qui se caractérise notamment par la tenue des phrases sans que l’on ait à déplorer une quelconque baisse de tension. Le troisième mouvement («Menuetto. Allegro vivace») est pris à une allure très modérée, la folie des tempi précédemment adoptés ayant ici totalement disparu: la lourdeur gagne alors la partition, faisant perdre au mouvement son côté dansant et bucolique. Quant au finale, on regrette la trop forte implication des timbales qui, en plus d’une occasion, s’avèrent assourdissantes au point de couvrir les autres instruments.


La seconde partie du concert était consacrée à la Septième symphonie que Beethoven qualifiait lui-même d’«une [de ses œuvres] les plus importantes». La douce atmosphère du concert (venant notamment du fait que les musiciens étaient éclairés non par les habituels projecteurs mais seulement par des lumières posées sur leurs pupitres tels qu’ils peuvent en bénéficier dans une fosse d’opéra) est de nouveau brisée par Jurowski qui, n’omettant aucune reprise, adopte une conception certes pleine de verve mais qui fait fi de tout lyrisme. Le deuxième mouvement, le célèbre Allegretto, illustre la parfaite entente entre le chef et son orchestre (dont il est un des principal artists depuis 2006) qui répond avec exactitude aux indications d’une gestique pourtant assez peu idiomatique. Ensuite, qu’il s’agisse du Presto assai ou de l’Allegro con brio final, on regrette une fois encore l’importance sonore des timbales et, plus surprenant au regard de l’énergie dégagée par Vladimir Jurowski, les tempi retenus qui confinent encore une fois au statisme. Qui aurait pu croire que l’on s’ennuierait à un tel concert?


Le site de l’Orchestre de l’Age des Lumières



Sébastien Gauthier

 

 

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