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Chung magnifie la gravité

Paris
Salle Pleyel
12/11/2009 -  
Franz Schubert : Symphonie n° 8, D 759, «Inachevée»
Anton Bruckner : Symphonie n° 9 (ed. Alfred Orel)

Orchestre philharmonique de Radio-France, Myung-Whun Chung (direction)


M.-W. Chung (© Jean-François Leclercq)



Salle Pleyel comble pour écouter deux chefs-d’œuvre qui, outre leur tonalité mineure, figurent parmi les plus célèbres des œuvres musicales inachevées. L’absence d’inspiration ayant empêché Schubert de poursuivre son travail (d’où un abandon de la partition qui ne devait être que temporaire), l’approche de la mort pour Bruckner qui, harassé de fatigue, ne cessait par ailleurs de sans cesse remettre sur le métier ses précédents opus, ont ainsi donné lieu à deux symphonies majeures dont on ne cesse d’admirer le contenu au fil du temps.


La Symphonie Inachevée de Franz Schubert (1797-1828) a été composée en 1823 à l’attention de la société musicale de Graz. Bizarrement, le manuscrit disparut pendant plusieurs décennies avant d’être redécouvert quelques décennies plus tard, l’œuvre ayant finalement été créée en 1865 sous la baguette de Johann Herbeck. Chung aborde la symphonie dans une perspective volontairement emphatique, aidé il est vrai par un orchestre étoffé (comprenant notamment huit contrebasses et douze violoncelles). Le climat d’entrée s’avère particulièrement réussi, le soyeux des cordes permettant ainsi à Hélène Devilleneuve, hautboïste solo, de briller une nouvelle fois pour le célébrissime thème qui lui était confié. Même si l’on peut regretter la fragilité des clarinettes (notamment dans les aigus), la petite harmonie se révèle excellente dans son ensemble, semblant nullement souffrir des tempi extrêmement retenus imposés par le chef. L’Andante con moto allie ainsi avec beaucoup de grâce simplicité du trait et tristesse du ton, laissant s’exprimer l’évidence d’une partition dont on se plaît à entendre une interprétation des plus convaincantes.


Mais le morceau de choix résidait peut-être avant tout dans la Neuvième symphonie d’Anton Bruckner (1824-1896). Sans être un orchestre particulièrement familier de ce compositeur, le Philharmonique de Radio France a déjà donné l’ultime chef-d’œuvre symphonique de Bruckner à plusieurs reprises, notamment dans un très beau concert sous la direction du futur chef de… l’Orchestre de Paris, Paavo Järvi (voir ici). Quant à Myung-Whun Chung, ses incursions chez Bruckner sont assez rares mais, à chaque fois, plutôt réussies (voir ici, ici et ici). Force est de constater que l’interprétation de ce soir, sauf erreur la première permettant d’entendre Chung diriger la Neuvième symphonie, fut véritablement superbe! Le frémissement des cordes dans le Feierlich; misterioso instaure d’emblée une atmosphère tendue magnifiée par les appels lugubres des cors : Chung s’attache à conduire les longues phrases de la symphonie avec une grande solennité qui, contrairement à bon nombre d’interprétations, n’était pas handicapée pour autant par la lourdeur orchestrale. La coda finale fut particulièrement réussie en raison d’une incroyable violence (quelles timbales!) qui a sans aucun doute fait frémir chaque spectateur. Pris assez rapidement, le Scherzo met surtout en exergue les bois (dont la précision mérite d’être soulignée) mais les cordes reprennent le dessus dans le sublime Adagio. Prenant son temps (tout en évitant l’écueil du statisme), faisant respirer l’orchestre, profitant de l’ampleur des traits pour construire solidement les hautes flèches d’une cathédrale sonore, Chung opte pour la désolation, rendant ainsi parfaitement hommage au «ménestrel de Dieu». Les dernières notes sont jetées comme autant de soubresauts de la part de quelqu’un qui sait quitter la vie ici-bas, transcrivant ainsi parfaitement le message mystique autant que simplement humain voulu par le compositeur.



Sébastien Gauthier

 

 

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