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Hors-sujet

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
11/12/2009 -  
Igor Stravinsky : Circus Polka – Jeu de cartes
Claude Debussy : Images

Orchestre national de France, Daniele Gatti (direction)


D. Gatti (© Marco Dos Santos)


Faut-il encore incriminer le partage du pouvoir entre Kurt Masur et Daniele Gatti ? Le deuxième concert du chef italien à la tête de « son » orchestre a déçu. On ne niera pas, pourtant, le travail accompli, d’abord avec Stravinsky, dont Jeu de cartes demande une impeccable précision. Mais il choisit une perspective assez surprenante, qui laisse perplexe dès la Circus Polka, plus rutilante que décapée, moins caustique que gourmande, d’une opulence sonore rappelant plutôt Rimski-Korsakov. Le ballet en trois donnes confirme cette impression, comme si le chef italien dirigeait La Boutique fantasque : il n’est pas assez lapidaire, sacrifiant la rythmique à la sonorité, donnant du coup l’impression d’une lecture séquentielle, presque décousue, semblant surtout diriger l’œuvre au premier degré – les clins d’œil narquois à l’ouverture du Barbier de Séville, par exemple, manquent d’humour. Bref, c’est un peu lourd et trop sérieux – on préférerait entendre Gatti dans L’Oiseau de feu.


Ce parti pris convient-il aux Images de Debussy ? Elles peuvent s’accommoder, après tout, de tempos assez amples, d’une certaine générosité sonore, d’une mise à distance de la tradition impressionniste française – comme d’ailleurs de l’ascétisme analytique de certains chefs revendiquant la modernité prophétique de Debussy. Si celui-ci peut annoncer Webern, ne reste-t-il pas, après tout, l’héritier de Massenet ? Gigues, pourtant, s’alanguit sous le poids d’un lyrisme un peu appuyé, presque vériste, où l’on sent, une fois de plus, Rimski ou son disciple Respighi, alors qu’il faudrait interroger les clairs-obscurs de la partition, en creuser les ombres. Il est vrai qu’une telle direction appellerait des sonorités plus capiteuses, alors que les cordes sont sèches et les vents acides : on pouvait, par exemple, contester les parti pris, pas moins hors-sujet, de Valery Gergiev dans La Mer, mais la rondeur rutilante de son orchestre londonien les servait (lire ici). Iberia évoque d’abord, dans « Par les rues et par les chemins », une Espagne fin de siècle, aux couleurs plus riches que crues, où les rythmes ne sont pas assez aiguisés. « Les parfums de la nuit » réussissent mieux au patron du National, qui en perçoit moins le mystère que la sensualité, dégageant des parfums capiteux plus que des effluves subtils, avec des rubatos annonçant Le Martyre de saint Sébastien, des basses parfois un peu grasses aussi ; « Le Matin d’un jour de fête », en revanche, pèche par un excès de densité dans la matière, une conduite du rythme sans tranchant, jusqu’à une coda à l’allégresse un rien laborieuse. « Rondes de printemps » n’avance pas et pèse trop, faute d’une recréation constante des rythmes et des timbres, plombé par une direction décidément trop peu fluide et persistant à ignorer cette atomisation de la matière et du rythme propre à Debussy, signe d’une invention perpétuellement renouvelée ; Gatti prive du coup, comme dans l’ensemble de ces Images, la musique de son élan intérieur, de cette secrète pulsation qui transcende la barre de mesure.



Didier van Moere

 

 

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