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Romantisme bien tempéré

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
12/09/2006 -  
Johannes Brahms : Intermezzi, opus 117 – Klavierstücke, opus 118 et 119
Frédéric Chopin : Nocturnes, opus 48 n° 1 et opus 27 n° 2 – Sonate n° 2, opus 35

Mikhaïl Rudy (piano)


Voici près de trente ans, un pianiste soviétique de vingt-quatre ans, qui venait de remporter le Concours Long-Thibaud, décidait de s’exiler dans ce que l’on appelait alors l’Occident: dans la lignée de Noureev et Rostropovitch, ce choix suscita un certain engouement médiatique, car d’un Grand échiquier à l’autre, Mikhaïl Rudy, avec un charisme et un accent inimitable, sut rapidement conquérir le coeur du public français par sa maîtrise du répertoire russe. S’il mène désormais une carrière plus discrète, il n’en parvient pas moins à remplir le Théâtre des Champs-Elysées, et ce aussi bien face à une forte concurrence que dans un programme exigeant.


Défi de plus de cinquante minutes, la première partie de son récital enchaînait quasiment sans interruption les trois derniers cycles de Brahms, Intermezzi de l’opus 117 (1892) et Klavierstücke (1893) des opus 118 et 119. Dans ce Brahms plus altier, voire austère, que neurasthénique, résigné ou indifférent, Rudy s’autorise à peine quelques ralentis ou contrastes de nuances et les doigts d’acier d’une technique impressionnante, quoique parfois prise en défaut, percent ici ou là sous le moelleux des textures. Au fil de ces treize pages, la passion (premier Intermezzo de l’opus 118) trouve certes à s’exprimer, mais le chant ne s’épanche pas outre mesure (deuxièmes Intermezzi des opus 118 et opus 119), confinant même à la raideur (troisième Intermezzo de l’opus 119). Le ton héroïque et le caractère athlétique de la Ballade de l’opus 118 et de la Rhapsodie de l’opus 119 lui conviennent cependant mieux, mais il n’en parvient pas moins à mettre en valeur la légèreté de toucher de la Romance de l’opus 118 ou la gravité de l’Intermezzo qui conclut ce même recueil.


Entièrement dédiée à Chopin, la seconde partie s’ouvre sur deux Nocturnes, le Premier de l’opus 46 (1841) et le Second de l’opus 27 (1835). Un rien appuyés, très articulés, les phrasés demeurent aussi simples et droits que dans Brahms: voilà un Chopin certes délicat à l’occasion, mais fuyant toute complaisance. Dans la Deuxième sonate (1839), le propos ne bascule jamais dans l’emporte-pièce, que ce soit dans la Marche funèbre, sans excès de pathos ni de lenteur, ou dans le Final, précis et inquiétant. Mais Rudy paraît se libérer davantage et donner cours à son caractère impulsif, sans pour autant relâcher la construction: le sentiment de flux continu est d’ailleurs accru par l’absence de pause entre les quatre mouvements.


Il ne concède pas moins de six (brefs) bis: les deux plus célèbres (et redoutables) Etudes de Scriabine – la Cinquième de l’opus 42 (1903) et la Douzième de l’opus 8(1895) –, entrecoupées de l’Etude pour les huit doigts (1915) de Debussy, véritable prolongement du Presto final de la Sonate de Chopin, et de la Troisième de ses Mazurkas de l’opus 63 (1846), sont suivies du Prélude («Harpe»), septième des Dix pièces de l’opus 12 (1913) de Prokofiev, puis d’une adaptation du choral Ich ruf’ zu dir, Herr Jesu Christ de Bach.



Simon Corley

 

 

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