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Alchimies sonores

Paris
Salle Pleyel
11/18/2006 -  
Olivier Messiaen : Chronochromie
Brian Ferneyhough : Plötzlichkeit (création française)
Claude Debussy/Hans Zender : Voiles – La Danse de Puck – General Lavine-eccentric – Des pas sur la neige – Les Collines d’Anacapri
Edgard Varèse : Arcana

SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg, Sylvain Cambreling (direction)


Dans le cadre du Festival d’automne, la Salle Pleyel accueillait l’Orchestre de la SWR (Südwestrundfunk) de Baden-Baden et Freiburg et Sylvain Cambreling, qui est en le directeur musical (Chefdirigent) depuis 1999 et dont le contrat vient d’être renouvelé jusqu’en 2009. Alors que leur prestation aurait dû se donner à guichets fermés, le public n’a hélas pas massivement répondu présent, sans doute parce que le moment (un samedi après-midi) était mal choisi.


Force est en outre de reconnaître qu’il n’est pas évident de deviner que l’appellation SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg - à ne pas confondre avec le SWR Sinfonieorchester Stuttgart de Roger Norrington - dissimule, pour ce qui est de la musique de notre temps, une phalange d’exception, qui est aux grands orchestres symphoniques ce que l’Ensemble intercontemporain est aux formations de taille plus restreinte. En effet, depuis la fusion intervenue en 1998 entre la Süddeutscher Rundfunk (SDR) de Stuttgart et la Südwestfunk (SWF) de Baden-Baden, l’Orchestre de la SWR de Baden-Baden et Freiburg est l’héritier de Rosbaud et de Bour, de leur défense inlassable et exigeante de la création et de la modernité, d’autant que ses deux «chefs invités permanents» ne sont autres que Michael Gielen et Hans Zender.


Dans Chronochromie (1960) de Messiaen, l’objectivité et l’intransigeance de l’approche n’excluent pas une passion et un engagement interprétatif se jouant des difficultés et des pièges d’une partition dont la nouvelle acoustique de Pleyel permet de profiter comme rarement.


C’était ensuite la première française de Plötzlichkeit («soudaineté») de Brian Ferneyhough, commande du SWR et de Radio France créée le 20 octobre dernier à Donaueschingen, en présence du compositeur. Dans son propos de présentation, celui-ci continue à afficher une radicalité quasi provocatrice, revendiquant résolument une discontinuité du discours, éclaté en une centaine d’unités, qui vise à priver l’auditeur de ses repères formels et temporels. Ce «déni du temps» trouve son aboutissement dans une «anti-forme», c’est-à-dire, vingt-cinq minutes durant, une succession d’instants très brefs qui privilégie les ruptures sur les enchaînements. Mais Ferneyhough, s’il ne cède pas aux filles-fleurs de la facilité, en a néanmoins introduit dans son orchestre, avec trois voix de femme aux timbres et aux harmonie particulièrement suaves. Au-delà, le soin qu’il apporte à la couleur, au travers par exemple du choix d’instruments peu usités – trompette basse wagnérienne, cimbasso verdien (trombone contrebasse à pistons) –, traduit un hédonisme assez inattendu de sa part, et ce malgré sa méfiance affichée pour les séductions trop commodes de la miniature.


Hans Zender a adapté en 1991 cinq des Préludes (1910/1912) de Debussy pour un ensemble de chambre augmenté de nombreuses percussions. Plutôt que de tenter vainement d’approcher l’orchestre debussyste, il dit avoir davantage voulu faire œuvre d’interprète, mettant en relief les couleurs et les timbres que lui suggère le piano. Le défi n’en reste pas moins périlleux, car l’orchestration, comme l’adaptation d’un roman au cinéma, ne peut qu’imposer une vision univoque de la version originale qui, au contraire, laissait ouverte à l’auditeur une infinité de possibles: ce que Debussy ne faisait que subtilement effleurer est donc souligné ici de façon nécessairement plus triviale, d’autant que Zender, s’il réalise un travail techniquement remarquable, ne se prive pas de recourir à des effets incongrus, tel ce coup de feu qui claque à la fin de General Lavine-eccentric, comme si l’on se trouvait au concert du Nouvel An à Vienne.


Ce programme dense et bien construit, riche en alchimies sonores, s’achevait sur une référence encore plus explicite à ces mystères, avec Arcana (1927) de Varèse, dont Cambreling a offert une lecture idéale, intense mais sans tapage inutile, raffinée et sauvage à la fois.


Le site du Festival d’Automne
Le site du SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg
Le site de Sylvain Cambreling



Simon Corley

 

 

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