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Monsieur K

Paris
Maison de Radio France
11/17/2006 -  
Charles Koechlin : Le Livre de la jungle: La Loi de la jungle, opus 175 – Les Bandar-log, opus 176 – Trois poèmes, opus 18 – La Méditation de Purun Bhagat, opus 95 – La Course du Printemps, opus 95

Marie-Nicole Lemieux (mezzo), Nikolaï Schukoff (ténor), Denis Sedov (basse)
Chœur de Radio France, Michel Tranchant (chef de chœur), Orchestre national de France, Fabien Gabel (direction)


La musique de Koechlin, si elle possède ses partisans déterminés, tels Heinz Holliger ou David Zinman), n’en demeure pas moins anormalement négligée et la présentation successive, à un mois d’intervalle, de l’intégralité du Livre de la jungle, d’abord dans le Nord à trois reprises par l’Orchestre national de Lille puis à Paris par l’Orchestre national de France dans le cadre du week-end de concerts gratuits «Orients», tient hélas davantage de la coïncidence que d’un véritable retour en grâce – mais l’a-t-il jamais été?


Formé d’un recueil de mélodies et de quatre poèmes symphoniques, ce cycle, écrit entre 1899 et 1940, est l’œuvre d’une vie, même si le compositeur a bien évidemment laissé par ailleurs un catalogue d’une grande richesse. En mobilisant les moyens considérables que requièrent ces cinq joyaux (un orchestre immense, un chœur, trois solistes de renom), Radio France s’investit pleinement dans la défense et l’illustration des personnalités injustement reléguées dans l’ombre. Cela étant, même si le jeune chef Fabien Gabel, très apprécié des musiciens de l’Orchestre national, n’a nullement démérité dans ces pages parfois extrêmement complexes, n’était-ce pas au directeur musical, Kurt Masur, de prendre la baguette et de manifester ainsi l’importance que revêt pour sa formation le sauvetage d’un précieux patrimoine musical?


Il n’y a cependant pas lieu de faire la fine bouche, tant cet ensemble inspiré par Kipling s’impose de lui-même et donne de Koechlin une image très éloignée de sa réputation d’austérité, accréditée par son solide métier, sa dévotion à Bach et une iconographie le représentant le plus souvent sous les traits d’un vieillard à longue barbe chenue. Car il y a ici de l’humour – comme cette fugue grotesque, dont le thème évoque «J’ai du bon tabac», avec ses entrées successives de contrebasson, de tuba et de contrebasse dans Les Bandar-log (1940) – mais aussi de la sensualité, particulièrement dans les Trois poèmes (1901), d’un langage certes moins avancé, quoique ne le cédant en rien, pour l’époque, à celui de Debussy ou de Strauss. On regrettera toutefois que parmi les trois chanteurs, seul le ténor autrichien Nikolaï Schukoff fasse un effort de diction dans le Chant de Kala-Nag. Humour, sensualité, mais aussi mysticisme, dans l’admirable et profonde Méditation de Purun Bhagat (1936), et poésie, dans La Course du printemps (1927), morceau le plus développé, faisant alterner puissance et sérénité, élan et élévation d’ordre quasi religieux.


Et, partout, un style personnel, opiniâtrement demeuré à l’écart des modes, ainsi qu’une science de l’orchestration maniant avec précision un effectif de grande taille (bois par quatre avec deux saxophones, quatre cors, cinq trompettes, quatre trombones, deux tubas, huit percussionnistes, deux harpes, piano, célesta, …) et dont la seule Loi de la jungle (1934) suffirait à témoigner, formidable défi consistant à conférer des couleurs à un discours exclusivement monodique.


Le danger d’un tel concert monographique est toutefois double, alors même qu’il demande un gros investissement de la part du chef, qui a dû travailler minutieusement des partitions qu’il ne dirigera pourtant pas de sitôt, aussi bien que des instrumentistes. En effet, non seulement il est insuffisamment attrayant pour un public qui n’est pas prêt à prendre le risque de consacrer une soirée entière, même en entrée libre, à un programme presque totalement inconnu, mais il tend à tenir un compositeur à l’écart du grand répertoire et à le confiner dans une confidentialité pour happy few, au lieu de répartir ses œuvres tout au long de la saison et de les associer à des pièces plus célèbres, davantage de nature à mobiliser les auditeurs. Il reste à espérer que c’est dans ces conditions et dans un délai point trop éloigné que l’on pourra redécouvrir des merveilles telles que la Seven stars symphony, Le Buisson ardent ou Vers la voûte étoilée.


Un site consacré à Charles Koechlin



Simon Corley

 

 

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