About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

La magie du clavier

Paris
Salle Pleyel
09/29/2006 -  
Maurice Ravel : Une barque sur l’océan
Camille Saint-Saëns : Concerto pour piano n°5 "L’Egyptien"
Claude Debussy : Printemps – Iberia

Aldo Ciccolini (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Mikko Franck (direction)


Il suffit qu’Aldo Ciccolini joue trois mesures pour que la magie de sa sonorité enchante et laisse sans voix – ou sans plume. Le Cinquième Concerto de Saint-Saëns, avec lui, n’a plus rien de démonstratif, la virtuosité y est sublimée par l’inspiration, certains thèmes – notamment le fameux « chant nubien » du mouvement lent – sont du pur bel canto ; dans les passages orientalisants, si souvent décriés, on se demande comment il parvient à faire sonner ainsi le clavier comme quelque instrument exotique. L’interprétation est également remarquable par l’accompagnement orchestral, le jeune Mikko Franck faisant ressortir chaque détail d’écriture, mettant en valeur les timbres, montrant que Saint-Saëns n’est pas seulement un artisan habile. La direction, très narrative, intègre l’instrument soliste à l’orchestre, s’accordant avec le pianiste pour faire de ce Concerto une sorte de poème symphonique avec piano, plus proche de Liszt que de Beethoven. Les fanatiques de Satie aiment moins le bis, situé par ses rubatos entre Chopin et Bellini.


Le reste du programme confirme à quel point il faudra compter désormais avec le chef finlandais. Au début du concert, « Une barque sur l’océan » est dirigé comme Daphnis, par le sens chorégraphique de la pulsation, la sensualité généreuse de la pâte sonore, l’éventail des couleurs, qui fait penser à la Klangfarbenmelodie des Viennois ou aux raffinements de timbres d’un Dutilleux. Printemps et « Iberia » sont de la même eau. La Suite symphonique se situe au début entre les langueurs extatiques de Massenet et celles du Martyre de saint Sébastien, avant d’éclater sous la poussée des sèves, le chef conjuguant toujours avec autant de bonheur la clarté de l’analyse – quoi qu’il dirige, on entend décidément tout – et les rondeurs généreuses de la sonorité. On sait alors ce qu’on peut attendre de la deuxième Image : la vision d’une Espagne à la fois rutilante et mystérieuse, gorgée de soleil et saturée de couleurs, où l’on sentira les parfums de la nuit, où le matin d’un jour de fête, après une transition magique entre l’obscurité et la lumière, s’illuminera progressivement, à partir des «quasi guitarra» des violons, jusqu’à l’éblouissement du glissando de trombones final. Là aussi, le chef n’a pas seulement des choses à nous faire entendre, il a des choses à nous dire, à nous faire voir, à nous raconter. Certains puristes trouvent que ce n’est pas assez suggéré, pas assez «impressionniste», pas assez debussyste. A chacun son Debussy. On s’accordera en tout cas avec eux sur un point : quand le « Philhar » joue sous une telle baguette, il se métamorphose.



Didier van Moere

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com