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Une Passion proche de la perfection

Ambronay
Abbatiale
09/23/2006 -  
J.-S. Bach : Passion selon Saint Matthieu
Julius Pfeifer (Evangéliste), Marcos Fink (Jésus), Sunhae Im (soprano), Lawrence Zazzo (contre-ténor), James Gilchrist (ténor), Johannes Weisser (basse).
Akademie für alte Musik Berlin, RIAS Kammerchor, René Jacobs (direction)

Depuis quelques années, le festival d’Ambronay s’est hissé au niveau des plus célèbres rencontres de musique ancienne, tant par sa continuité et le niveau général des concerts, que par l’effort constant d’ouverture aux jeunes musiciens et aux nouvelles initiatives. Après l’Académie baroque européenne, et la création d’un Réseau européen de musique ancienne (REMA), Ambronay dispose maintenant d’une marque de disques (certains coédités avec Naïve, d’autres distribués par Harmonia Mundi), et tout récemment d’éditions qui viennent de publier un Cahier portant sur Ercole amante de Cavalli et Lully (au programme de l’Académie cette année), avec les textes et les regards croisés de Marianne Massin, Ana Yepes, Gabriel Garrido et Sylvie Pébrier notamment*. Ainsi est assurée la cohérence du travail, de l’Académie, au concert, jusqu’à l’édition.


Si le thème de cette année concerne les « Ballades en Bohême », c’est à un concert un peu hors programme qu’était convié le public nombreux de cette soirée. Dans l’optique d’un enregistrement pour Harmonia Mundi qui devrait paraître en 2010, René Jacobs présentait cette Passion de 1727 qu’il a chanté étant enfant. Déjà célébré à Ambronay dans de belles productions de Scarlatti et Haendel, il a relevé avec un panache certain le défi de cette pièce majeure. D’un bout à l’autre, les découpages musicaux sont pleinement en phase avec les différents moments rhétoriques et théologiques de la « Passion », mot emblématique pour une musique ‘baroque’ centrée sur les affects. Si l’on mesure souvent les différentes versions à leur plus grande proximité avec le théâtre ou avec le temple, force est de constater que René Jacobs mêle parfaitement les deux dans une rhétorique sacrée qui aboutit à une lecture dramatiquement forte, musicalement énergique, et vocalement cohérente. C’est le récit constant, qu’il soit événementiel, ou contemplatif, que René Jacobs souligne et maintient comme un fil rouge. Il s’incarne d’abord dans l’Evangéliste (et un excellent continuo) de Julius Pfeifer inspiré, efficace, lien éloquent de toute cette Passion, dans la lignée de Kurt Equiluz. Le thème de la mélancolie du Christ, dans le dix-huitième récitatif, trouve un écho parfait dans le récit accompagné et l’air qui lui font suite, par James Gilchrist. De même pour les larmes de saint Pierre dans le magnifique Erbarme dich de Lawrence Zazzo. Mais le placement des solistes pour les airs, derrière l’orchestre, empêche le plein épanouissement de la voix. Seule déception vocale, la soprano Sunhae Im qui semble tout à fait déplacée dans ce répertoire. Au contraire, le Jésus de grande stature de Marcos Fink est à la fois intérieur et lyrique, et par moments véritablement saisissant, comme dans le Eli, Eli, lama asabthani ?. La robustesse des ensembles instrumentaux et vocaux n’empêche jamais les couleurs subtiles, et le soin du détail. Le célèbre Rias Kammerchor, acteur à part entière, fait preuve d’une belle plénitude. Des « Barrabas » et « Lass ihn kreuzigen » comme on en entend peu, voisinent avec des méditations chorales, de la cène au procès, d’une grande intensité. Nul doute que Hans Blumenberg aurait apprécié cette représentation marquante, proche de la perfection.



* ISBN 2-9523633-2-3




Frédéric Gabriel

 

 

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