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Sur un pas de valse…

Paris
Opéra-Comique
03/16/2006 -  16 mars au 9 avril 2006.
Oscar Straus : Trois Valses
Laurence Janot (Fanny / Yvette / Irène Grandpré), Jean-Baptiste Marcenac (Octave / Philippe / Gérard de Chalencey), Carole Clin (Céleste / Mademoiselle Castelli / Miss Raphaëlson / Madame Beltramini), Jeanne-Marie Lévy (La douairière de Chalencey / Madame Jules), Jacques Duparc (Brunner père (Acte I) / Brunner Fils (Acte II & III), Fabrice Todaro (Brunner fils (Acte I) / le journaliste / le photographe) Philippe Ermelier (Saint-Prix / Dulaurier / l'assistant), Jean-Marie Sevolker (Cyprien de Chalencey / le pompier / le machiniste), Patrick Vilet (Le Colonel de Chalencey / l'amant / le barman), André Jobin (Le Maréchal de Chalencey / le directeur / le producteur), Antoine Normand (Sosthène de Chalencey / le compositeur / l'acteur), Jean-Philippe Corre (Le Président / l'auteur / le metteur en scène)
Eric Belaud (chorégraphie)
Dominique Pichou (décors)
Danièle Barraud (costumes)
Jacques Châtelet (lumières)
Jean-Louis Grinda (mise en scène)
Didier Benetti (direction)

Immortalisée par Yvonne Printemps et PIerre Fresnay, l’opérette d’Oscar Straus Trois Valses est aujourd’hui remontée par l’Opéra Royal de Wallonie qui propose quelques représentations à l’Opéra-Comique. Quel bonheur de se plonger pendant trois actes dans un monde léger avec une troupe de chanteurs-acteurs excellents, sans prétentions mais avec une vis comica exceptionnelle! Si la musique d’Oscar Straus est loin d’être impérissable, les chanteurs et le chef tentent de lui insuffler une énergie et une vie et on ne peut qu’être charmé par certains passages comme “c’est la saison d’amour…”!



L’intrigue est assez simple: une dame Grandprée est amoureuse d’un de Chalencey et ce à trois générations différentes, la mère (1867), la fille (1900) et la petite-fille (1937). Chaque période représente un art: la danse, la musique et le cinéma. L’évolution du personnage est sensible car Fanny (acte I) est une jeune fille toute douce, très simple alors que Yvette (acte II) est déjà plus cabotine sans parler d’Irène (acte III) qui se veut une star de cinéma avec tous les clichés possibles (chien, …). Les deux premières histoires amoureuses se terminent mal alors que la troisième voit les deux amants réunis.
La mise en scène de Jean-Louis Grinda est riche et fastueuse. On ne compte plus les différentes tenues de l’héroïne… mais cet excès contribue à la beauté du spectacle. Les nombreux décors, en revanche, sont assez sobres mais efficaces et réalistes: avec quelques accessoires, le spectateur est plongé, entre autres, dans le monde de la danse avec une maîtresse de ballet plus vraie que nature (avec un léger accent russe…) au premier acte, dans une loge de cantatrice au second et sur un plateau de tournage au dernier. La mise en scène est truffée de clin d’oeil: le dernier acte se passant dans l’univers cinématographique, l’impresario Brunner ressemble à s’y méprendre au Michel Serrault du Miraculé tandis que le metteur en scène a des traits de famille avec Erich von Stroheim… Chaque personnage est caractérisé et possède un tic ou bien une particularité: l’homme d’église au premier acte, par exemple, est un pique-assiette dur d’oreille… Tous les protagonistes prennent alors le physique de l’emploi!


La distribution est excellente à commencer par Laurence Janot qui tient la scène avec un aplomb et une présence remarquables. Cette chanteuse n’a malheureusement pas eu une reconnaissance à la hauteur de son talent: elle peut facilement tenir la comparaison avec les Patricia Petibon et autre Elizabeth Vidal! La voix est d’une grande homogénéité et chaque note est chantée avec musicalité. Elle incarne avec une justesse les différentes Granprée, sachant se montrer délicate dans le premier acte: son entrée en scène est surprenante car elle chante avec facilité l’air “Oui, je sais, en retard”, tout en exécutant des pointes! Il faut savoir qu’avant de se lancer dans une carrière lyrique, Laurence Janot était danseuse et les personnages d’Oscar Straus lui vont d’autant plus comme un gant car ils lui permettent de danser et chanter! Elle se montre également touchante dans l’air “je ne suis pas ce que l’on dit” au troisième acte. Excellente comédienne, elle parvient à incarner ces trois personnages avec vérité et à leur apporter une couleur spécifique. Et s’il ne fallait qu’un mot pour la décrire ce serait la grâce: grâce gestuelle et grâce vocale!
Jean-Baptiste Marcenac est également tout à fait convaincant dans les rôles de jeune homme. Il bénéficie d’un physique avantageux qui lui permet de séduire les trois jeunes femmes. Son rôle est davantage théâtral que vocal et il forme un beau couple avec Laurence Janot. Il se montre passionnément amoureux au premier acte, revêtu de son costume militaire, puis d’abord distant au second pour n’en être que plus malheureux au moment de la rupture et enfin méprisant et hautain au dernier.
Carole Clin réalise une performance tout à fait exemplaire. Elle parvient à contrefaire sa voix, ses nuances pour interpréter ses personnages. Elle campe une Céleste, façon petite souris, une Melle Castelli charmante de simplicité…
Jeanne-Marie Lévy est étonnante dans le double-rôle de la vieille marquise de Chalencey et l’habilleuse Mme Jules. Dans ces deux personnages, elle parvient à être tout aussi juste et crédible. La voix est également à la hauteur car elle possède une belle résonance et une certaine puissance. Elle est particulièrement émouvante en vieille marquise quand elle vient rendre visite à Fanny et lui expliquer qu’elle doit se sacrifier.
Jacques Duparc est excellent, et c’est peu dire! Il incarne le personnage de Brunner à différents âges, d’abord il est Brunner père puis Brunner fils à l’âge mûr et en vieillard. Sa présence scénique est très drôle, ses qualités de comédien sont évidentes: les dialogues sont mis en relief et vécus. Vocalement il fait un parcours sans fautes, parvenant même à vieillir sa voix dans l’air du troisième acte, ajoutant quelques couacs et quelques aigus difficilement négociés pour ajouter de la vérité et du piquant à son personnage. Il est surtout remarquable dans le dernier acte en imprésario ronchon et surtout horrifié à l’idée de voir que son personnage a été vu par le metteur en scène comme un petit marquis au visage tout peinturluré!
Le reste de la troupe ne mérite également que des éloges. Jean-Marie Sevolker, avec son accent, est impayable en noble propriétaire venu exprès de ses terres pour régler les écarts de conduite de son neveu. Il est également très sympathique en syndicaliste de la Cgt au troisième acte quand il exige la pause de midi et arrive avec un sandwich démesuré. Fabrice Todaro convient à merveille dans le rôle du jeune Brunner exalté puis dans ceux du journaliste et du photographe à l’affût du moindre potin! Philippe Ermelier impressionne beaucoup par sa grosse voix qu’il dévoile enfin au dernier acte. Il est l’un des rares à avoir une vraie voix lyrique! Patrick Vilet est crédible en amant éconduit d’Yvette Grandprée, tant il joue à l’excès le désespoir. André Jobin en producteur, notamment, rend parfaitement les rouages du monde du cinéma tandis que Antoine Normand est un compositeur attendrissant. Mention spéciale pour Jean-Philippe Corre qui joue un homme d’église d’anthologie!


Didier Benetti dirige sa troupe d’une main de fer avec un bonheur évident. Il apporte une émotion sensible, notamment au premier acte. Il arrive à faire partager un enthousiasme et il est difficile de résister à son entrain dans quelques valses tirées des autres Strauss!



Oscar Straus trouve, dans cette charmante production, une belle reconnaissance car tous les détails, tous les chanteurs, tous les acteurs contribuent à proposer une lecture vivante et amusante de son oeuvre. Une bien belle réussite et surtout un vent de fraîcheur très bien accueilli par un public chaleureux!


Manon Ardouin

 

 

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