About us / Contact

The Classical Music Network

Baden-Baden

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Romantisme poids lourd

Baden-Baden
Festspielhaus
04/01/2006 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour basson
Robert Schumann : Symphonie No 3 « Rhénane »
Beethoven : Symphonie No 5

Stepan Turnovsky (basson), Wiener Philharmoniker, Christian Thielemann (direction)

Ambiance déjà festivalière et en ce début de printemps à Baden-Baden, la venue pour deux concerts de la Philharmonie de Vienne ayant mobilisé un public chic accouru parfois d’assez loin, sans doute attiré par des programmes sagement romantiques (3e Symphonie de Schumann + 5e Symphonie de Beethoven, 1ère Symphonie de Schumann et 6e Symphonie de Beethoven le lendemain) ainsi que par le regroupement habile des deux concerts proposés (samedi soir pour le premier, dimanche matin pour le second).


Après une récente tournée américaine en compagnie de Riccardo Muti, l’Orchestre Philharmonique de Vienne achève ainsi à Baden-Baden un autre circuit de concerts plus restreint (Bruxelles, Cologne puis ces deux soirées badoises) : des déplacements en série qui n’ont pas altéré la qualité instrumentale d’une phalange qui s’est révélée ce Samedi soir dans une forme extraordinaire. Le grain très particulier des cuivres, au son toujours discrètement amorti, l’acidité légère des hautbois, le soyeux des cordes fonctionnent une fois encore comme un enchantement sonore perpétuel. Quand il s’en donne la peine cet orchestre reste un formidable instrument, dont la disponibilité n’attend qu’un chef à sa mesure pour accomplir des prouesses.


Et là, malheureusement, on avoue ne pas comprendre que des musiciens d’une telle trempe puissent s’accommoder même occasionnellement de la direction de Christian Thielemann, chef de grand répertoire lyrique au demeurant chevronné mais dont la compétence en matière symphonique continue à nous échapper. Car tant pour la 5e de Beethoven que pour la 3e de Schumann, qu’un tel orchestre pourrait quasiment jouer seul tant il les pratique régulièrement, tout ce que paraît apporter Thielemann semble d’une pénible lourdeur, voire d’un flagrant manque d’inspiration. La Symphonie « Rhénane » de Schumann se traîne ainsi sur des tempi majestueux mais rythmiquement flasques, rarement compensés par de subites accélérations qui ne semblent gouvernées par aucune logique. La pâte orchestrale reste constamment épaisse, les cuivres, même d’une somptueuse tenue, parvenant difficilement à franchir un rideau de cordes où toutes le doublures de l’orchestration schumanienne fonctionnent comme une sorte de mastic à prise instantanée. Une esthétique musicale blindée, que la salle apprécie pour sa massivité et sa prodigalité en décibels, mais qui laisse quand même au final l’impression d’une symphonie mal écrite (ce qui est assez vrai dans l’absolu, mais n’est jamais perceptible à ce point sous la direction de chefs plus inspirés).


Plus naturellement nerveuse, la 5e de Beethoven s’accommode mieux de cette esthétique massive, en dépit de la volonté manifeste du chef d’en rajouter dans tous les effets de martèlement des tutti, fût-ce au détriment de l’architecture générale (à quoi bon une entrée d’Allegro final aussi tonitruante si rien n’est fait pour la préparer, la célèbre transition entre les 3e et 4e mouvement apparaissant ici complètement ratée). Et, puis, à la longue, force est d’avouer la fatigue visuelle provoquée par une gestique singulièrement triviale (attitudes bizarres du corps, genoux fréquemment fléchis vers l’avant, piétinements à pieds joints sur le podium, baguette pilonnant constamment vers le bas comme un marteau piqueur…), qui oblige même à fermer les yeux pour ne plus se laisser déranger par ces manières de bûcheron.


En définitive, le seul moment mémorable de ce curieux concert reste le Concerto pour basson de Mozart, joué par l’irréprochable Stepan Turnovsky, issu des rangs de l’orchestre. Même si l’instrument, de facture évidemment allemande, sonne trop rond et amorti pour nos oreilles, habituées aux couleurs plus variées du basson français, la démonstration est brillante, admirablement servie par un accompagnement luxueux, très uniforme au départ mais ensuite subtilement modulé par un chef qui se révèle bien meilleur accompagnateur que maître d’œuvre. L’Andante ma adagio, musique pourtant bien sage, semble touché ici par une vraie grâce mozartienne : magnifique éclaircie initiale, pour une soirée par ailleurs plutôt plombée.



Laurent Barthel

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com