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Clip dans l’air du temps

Paris
Cité de la musique
12/18/2005 -   et 9 janvier (Sydney), 24 mai (Naogya), 4 juin (New York), 3 juillet (Poznan), 14 septembre (Torino), 2 décembre (Cardiff) 2005 et 19 février 2006 (San Francisco)
Philip Glass : Naqoyqatsi

Maya Beiser (violoncelle), Philip Glass Ensemble, Michael Riesman (direction)


La Cité de la musique clôt 2005 avec un cycle «Musique/Cinéma», où les films sont projetés en même temps que sont interprétées en direct des musiques, originales ou non, destinées à les accompagner. Après un premier temps intitulé «Les Classiques», le second temps, «Regards actuels», se concluait par un événement de taille, la présentation de la trilogie Qatsi de Godfrey Reggio et Philip Glass: non seulement ces trois films, ont acquis un statut quasi mythique, mais pour l’occasion, le compositeur est venu lui-même à Paris avec son propre ensemble.


Au sein d’une très vaste production qui comporte d’ailleurs déjà une trilogie, opératique celle-là (Einstein on the beach, Satyagraha, Akhenaton), Glass s’est souvent intéressé au cinéma (et les cinéastes, quant à eux, ont puisé dans son œuvre, encore tout récemment Emmanuel Carrère dans La Moustache), mais sa trilogie cinématographique, résultant d’une collaboration probablement sans précédent depuis Eisenstein et Prokofiev, quoique dans un style certes fort différent, occupe une place à part. Après Koyaanisqatsi (Life out of balance) (1982) et Powaqqatsi (Life in transformation) (1987), Naqoyqatsi (Life as war), apparu voici seulement trois ans, présentait donc l’attrait de la nouveauté, même s’il s’inscrit bien évidemment dans la continuation des deux premiers volets, avec son titre en langue hopi et son approche extérieurement radicale (ni acteurs, ni dialogues, ni scénario).


Cela étant, si le générique introductif – de lents travellings esthétisants (en noir et blanc) sur d’immenses constructions désaffectées – est prometteur, le film proprement dit consiste en un montage de plans naturels ou d’images de synthèse, d’archives brutes ou retravaillées, parfois avec humour, au service d’une thèse au fond assez mince: la vie est un combat, mais cela, on le sait depuis Héraclite («la lutte engendre toutes choses»). Le décalage entre l’approche apparemment révolutionnaire du réalisateur et le premier degré de son message semble d’autant plus criant que les images et thèmes convoqués à cette fin constituent une anthologie de clichés prélevés dans la mémoire collective du siècle dernier: guerre, progrès, vitesse, industrialisation, environnement, sport, publicité, économie, media, informatique, foules, visages anonymes aux expressions souriantes, douloureuses ou agressives mais aussi galerie de personnalités, pour partie issues d’un musée de cire, mêlant sans surprise Hitler, Einstein ou Marilyn Monroe.


Ce diaporama de luxe confinant à une véritable saturation de signes aurait sans doute fasciné Barthes et la naïveté avec laquelle cette critique de la modernité fusionne Chaplin (Les Temps modernes), Tati (Traffic), Kubrick (2001, Odyssée de l’espace) et Michael Moore trahit un projet dont les origines remontent au milieu des années 1970.


Musicalement, ce vaste clip – «film vidéo utilisant des effets spéciaux et réalisé pour promouvoir une chanson, un disque, un groupe» (Le Robert) – n’étonne pas, sinon par la présence d’un violoncelle soliste (Maya Beiser): si elle n’a rien perdu de son caractère répétitif et planant, la manière de Glass s’est édulcorée avec le temps, n’hésitant pas à verser parfois dans un romantisme étonnamment sucré et renouvelant assez peu ses procédés d’écriture, même si l’on y perçoit peut-être plus que par le passé l’influence de l’Inde. En outre, si l’osmose entre les images et la partition est difficilement contestable, les moyens par lesquels la musique tente de rendre justice à la violence du propos sonnent de façon étrangement rhétorique et mélodramatique, tenant de la rodomontade au lieu de provoquer le grand frisson.


Formé de dix musiciens (flûte, clarinette, saxophone, claviers, dont Glass lui-même, et percussion), dont certains chantent également, et dirigés du clavier par Michael Riesman, l’Ensemble Philip Glass, sonorisé par le sound design de Kurt Munkacsi, assure avec un beau professionnalisme ces quatre-vingt-onze minutes, génériques compris, originellement conçues pour un orchestre symphonique. Si quelques spectateurs, probablement peu au fait de ce qui les attendait, s’échappent avant la fin, le compositeur et ses troupes reçoivent dès les premiers saluts l’ovation debout, quoique sans exubérance, d’une salle comble.


Le site de Philip Glass

Le site de la trilogie Qatsi



Simon Corley

 

 

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