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Les cordes de Jolivet

Paris
L'Archipel
10/24/2005 -  
André Jolivet: Nocturne pour violoncelle et piano – Suite rhapsodique pour violon (+) – Eglogues pour alto (*) – Quatuor

Svetlin Roussev (+), Eric Lacrouts, Hyo-Kyung Kim (violon), Odile Auboin (*), Cédric Catrisse (alto), Delphine Biron (violoncelle), Kobiki Messanori (piano)


L’année Jolivet – il est né le 8 août 1905 – bat son plein: non seulement il vient de faire son entrée dans ce qui est en quelque sorte la «Pléiade» des musiciens, puisque Fayard vient de publier sa biographie par Lucie Kayas, mais grâce à l’action de l’Association qui porte son nom et à la ténacité de sa fille Christine, le compositeur est particulièrement à l’honneur en cet automne: hommage conjoint avec Yoshihisa Taïra le 18 octobre dernier Salle Cortot, Concerto pour piano par Marie-Josèphe Jude et Danses rituelles sous la direction de Pierre Boulez respectivement à l’affiche du Châtelet le 3 novembre et de la Cité de la musique le 19 novembre, mais aussi ce court concert monographique organisé à L’Archipel, dans la perspective d’un disque qui sera édité sous son propre label, Saphir.


Au milieu des années 1960, Jolivet a coup sur coup destiné trois cycles de cinq pièces brèves (un quart d’heure) respectivement au violoncelle, au violon et à l’alto. Si les deux derniers étaient présentés à l’occasion de cette soirée, le Nocturne pour violoncelle (1943) aura été préféré à la Suite en concert. On n’attendait sans doute pas le créateur de Mana dans un climat aussi nostalgique et dans une classique forme ABA assez développée (dix minutes), longue mélodie langoureuse à la Villa-Lobos, qui s’anime dans la partie centrale, mais il ne s’en agissait pas moins d’une découverte intéressante, faisant simplement regretter que la violoncelliste ne se soit pas toujours montrée à la hauteur de la situation.


Présent dans la salle avec nombre de ses élèves, Devy Erlih, gendre de Jolivet, avait créé voici près de quarante ans la Suite rhapsodique (1965) pour violon seul. C’est Svetlin Roussev qui prenait ici la relève, de façon sonore et chaleureuse, juste et brillante, dans ce recueil qui apparaît, par sa référence très stylisée au folklore, comme un lointain descendant de Tzigane de Ravel. Construite selon l’une de ces arches chères au compositeur hongrois, où deux Arias sont enchâssées dans un Praeludio, un Intermezzo et un Finale, seul mouvement animé, en forme de danse rapide, l’œuvre conclut ainsi sur une touche distanciée qui rappelle aussi L’Histoire du soldat.


Non moins enracinés dans un terroir imaginaire, mais d’une écriture plus complexe et offrant des climats plus variés, les Eglogues (1967) pour alto solo sont construits de manière tout aussi symétrique, avec deux mouvements pairs marqués Cantante entourant un Ostinamente et entourés par deux Rusticamente. Comme en avril dernier à la Cité de la musique (voir ici), Odile Auboin s’impose avec un naturel et une autorité confondants.


Dans les années 1930, Jolivet, tout juste sorti de ses études avec Le Flem puis Varèse, avait déjà montré avec éclat son intérêt pour les cordes, écrivant juste avant la trentaine, comme Debussy et Ravel, un unique Quatuor (1934): unique également en ce qu’il échappe non seulement à l’ombre portée de ces deux prestigieux aînés mais en ce qu’il se situe en complet décalage avec le néoclassicisme dominant, à la fois par sa densité harmonique et rythmique, par son lyrisme et ses sonorités recherchées ainsi que par son refus des concessions et du décoratif. Les jeunes musiciens regroupés autour du premier violon d’Eric Lacrouts mettent en valeur les influences qui se révèlent au fil de trois mouvements tendus et époustouflants, d’une sidérante modernité et d’une grande difficulté d’exécution tant, malgré l’unisson introductif, chaque instrument semble toujours tenté de tracer sa propre voie: Bartok (Volontaire), Berg (Allant) puis Hindemith (Vif), autant de noms qui en font un véritable ovni dans la musique française de l’époque.


Le site de l’Association «Les Amis d’André Jolivet»



Simon Corley

 

 

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