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La véritable rentrée

Paris
Théâtre Mogador
09/21/2005 -  et 22* septembre 2005
Richard Wagner : Tannhäuser (Ouverture et Bacchanale)
Wolfgang Amadeus Mozart : Symphonie n° 40, K. 550
Dimitri Chostakovitch : Symphonie n° 15, opus 141

Orchestre de Paris, Claus Peter Flor (direction)


Une semaine après un début contestable qui confirmait heureusement en même temps une qualité instrumentale intacte (voir ici), l’Orchestre de Paris a effectué sa véritable rentrée avec un concert présentant comme un condensé de trois des thèmes principaux de sa nouvelle saison: la Tétralogie, le deux cent cinquantième anniversaire de la naissance de Mozart et le centenaire de Chostakovitch. Dense et copieux, mêlant trois époques et esthétiques très différentes, ce programme a été donné à deux reprises, ce qui contribue peut-être à expliquer une affluence hélas quelque peu décevante, en tout cas le second soir: faut-il l’attribuer au relatif manque de notoriété du chef et à la réticence persistante du public à se rendre à Mogador, ou bien Chostakovitch effrayerait-il encore?


Lentes et comme perdues dans la brume, les premières mesures de l’Ouverture (1845) de Tannhäuser de Wagner, suivie de la Bacchanale (1861), suscitent l’inquiétude. En réalité, Claus Peter Flor va démontrer tout au long de ces larges extraits symphoniques sa capacité à ménager des progressions et, atout essentiel dans cette musique, son souci des transitions. De la belle ouvrage, qui ne se refuse pas le plaisir du grandiose mais qui sait en même temps s’animer au moment opportun, habitée par un sens dramatique très sûr, malgré une acoustique qui convient décidément toujours aussi peu aux effets de masse.


Après s’être coulé dans les habits confortables de la grande tradition, le chef allemand propose, sans baguette, une vision résolument subjective et personnelle de la Quarantième symphonie (1788) de Mozart, bousculant tous les usages interprétatifs: effectif (la version avec deux clarinettes, mais augmentée d’une seconde flûte), tempi (vifs, avec notamment un Menuet tenant bien plus du Scherzo que de l’Allegretto), prohibition du vibrato, mise en valeur des voix secondaires, accentuation, phrasés, articulation, couleurs, tout concourt à déstabiliser l’auditeur et l’orchestre, en particulier les trente-quatre cordes, souvent sur le fil du rasoir. Le texte est-il ainsi malmené dans un unique et superficiel souci d’originalité? Les avis seront sans doute partagés sur un exercice de style qui frôle ici ou là le maniérisme ou la raideur, mais force est de reconnaître à cette conception, dont les aspérités et le tranchant ne bannissent pas pour autant l’humour ou la grâce, une cohérence et une qualité de réalisation qui la rendent captivante de la première à la dernière note, et ce dans une partition que chacun est pourtant persuadé de connaître par cœur.


Après cette vision portée par l’urgence, Flor, décidément protéiforme, prend au contraire tout son temps dans la Quinzième symphonie (1971) de Chostakovitch où, au fil de nombreuses citations explicites, on retrouve Wagner (le Ring mais aussi Tristan), aux côtés de Rossini et de Haydn. Passant des vastes étendues glacées de la Onzième aux sarcasmes et au dépouillement de la Quatorzième, cette ultime symphonie, aussi rare qu’énigmatique, mais non moins fascinante et bouleversante, se déploie ici de façon intense en une immense fresque cauchemardesque dont les quatre mouvements sont enchaînés sans interruption, à la fois lancinante dans son déroulement et implacable dans ses attaques, son mordant et ses coups de boutoir. Rendant justice à la grande variété de climats (ironie, désolation, luminosité) et nettement plus convaincante que celle de Conlon à l’Opéra de Paris il y a trois ans (voir ici), cette expérience extrême, parfois insoutenable et écrasante, se révèle toutefois manifestement trop exigeante pour une minorité de spectateurs, qui répriment difficilement toux et mouvements divers.


Comme dans la Neuvième symphonie voici plus de cinq ans avec l’Orchestre philharmonique de Radio France (voir ici), Flor ne paraît pas davantage avoir convaincu les musiciens, au demeurant en léger retrait par rapport à la semaine précédente, même si les cuivres semblent parfaitement au point pour la grande aventure wagnérienne.



Simon Corley

 

 

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