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Un grand Otello en préparation!

New York
Metropolitan Opera house
09/20/2004 -  et les 23, 27 septembre et les 1, 4, 7*, 14 octobre 2004.
Giuseppe Verdi : Otello
Ben Heppner (Otello), Barbara Frittoli (Desdémone), Carlo Guelfi (Iago), Charles Taylor (Montano), Garrette Sorenson (Cassio), Bernard Fitch (Roderigo), Jane Bunnell (Emilia), Brian Davis (le héraut), Vitalij Kowaljow (Lodovico)
Michael Yeargan (décor), Peter J. Hall (costumes), Duane Schuler (lumière), Eleanor Fazan (chorégraphie)
Elijah Moshinsky (mise en scène)
Choeur et Orchestre du Metroplitan Opera
James Levine (direction)

Monter Otello au Met c’est tenter de mettre sur une même scène les plus grands titulaires des rôles et si le fantôme encore bien vivace de Placido Domingo règne sur cette oeuvre, Ben Heppner, en compagnie de l’incontournable Barbara Frittoli-Desdémone, fait admirablement vivre le personnage du Maure vénitien et surtout il propose une magnifique leçon de chant à grand nombre d’Otellos.



La mise en scène d’Elijah Moshinsky est absolument superbe, respectueuse des moindres détails, il n’y a pas d’objets hors-sujet et Desdémone se fait bien étrangler et non poignarder comme c’était le cas à Paris l’hiver dernier. Donc une belle production mais au demeurant assez ennuyeuse à cause d’un manque cruel de direction scénique. Fruit de multiples reprises, cet Otello n’a peut-être pas bénéficié d’un travail de répétition suffisant et tout cela rend la scène assez statique surtout en ce qui concerne Ben Heppner, qui n’est guère aidé par ses costumes qui ont tendance à le rendre encore plus gauche. Le rideau s’ouvre sur un orage, comme c’est l’usage, et une fois la scène de tempête terminée, la balustrade descend pour devenir le sol et le fond de la scène s’ouvre pour agrandir l’espace scénique: une habile trouvaille qui montre bien la progression de l’action. Le second acte se passe dans le jardin et aucun arbre ne va manquer à l’appel ce qui rend la chanson de Desdémone (chantée avec beaucoup de charme) encore plus émouvante. Les costumes sont très riches à commencer par celui d’Otello qui, très sombre, fonctionne bien avec la noirceur du personnage et son austérité.


Ben Heppner était très attendu dans le rôle d’Otello et il remporte le pari avec brio… à partir du troisième acte. Les deux premiers actes sont très bien chantés, toutes les notes y sont (y compris dans le redoutable “Esultate”) mais peu d’émotion se dégage vraiment du personnage. Si Ben Heppner ne sera pas l’Otello du 21ème siècle, sûrement à cause d’une voix trop claire et d’une trop grande facilité (ce qui peut paraître paradoxal mais les quelques difficultés vocales que rencontre Placido Domingo dans la partition permettent de rendre son personnage si touchant…), il obtient un grand succès pour l’intensité qui transparaît dans quelques passages (et des passages-clés de surcroît) et il faut espérer que son rapport intensif dans les temps à venir avec ce personnage lui permettra de davantage rentrer dans les duos amoureux ou bien dans les passages plus guerriers. Le premier duo avec Desdémone est très bien exécuté et les phrases sont très belles, très bien tenues et il apporte de la tendresse sur “un baccio” mais ce mot ne peut supporter la comparaison avec le dernier “baccio” de la fin de l’opéra dans lequel le chanteur est bien plus à l’aise. Mais toutefois c’est dans le “dio mi potevi scagliar” que le chanteur laisse éclater toute la douleur du personnage et toute sa vulnérabilité aussi.
Barbara Frittoli est LA Desdémone du moment et elle se montre bien plus inspirée par son rôle dans cette production que dans celle de Paris. Elle dessine une femme qui se brise peu à peu pour mourir bien avant son assassinat, déjà dans le “salce” chanté sur un pianissimo magnifique. Elle interprète aussi avec beaucoup d’expressivité l’Ave Maria et les quelques notes qui précèdent sa mort sont de purs moments de douceur et de résignation. Elle est une Desdémone fragile, terrassée par la méchanceté froide d’Otello, comme par exemple dans le “A terra…” du troisième acte, long monologue qu’elle entrecoupe de respirations dramatiques.
Carlo Guelfi se sort également avec honnêteté du rôle de Iago mais on ne peut pas dire qu’il ait le charisme d’un Sergei Leiferkus ou bien les couleurs subtilement méchantes d’un Ruggero Raimondi. Il utilise sa belle voix puissante puor imposer un Iago cinglant mais qui n’évolue guère au cours de l’opéra: il est et reste diabolique dès le début de la représentation. Toutefois il chante un magnifique Credo, plein de détermination et de colère.
Les autres rôles sont bien tenus à commencer par l’Emilia sonore de Jane Bunnell qui ne ménage pas ses efforts pour désigner le traître lors de la dernière scène où elle laisse vraiment éclater son talent. Cassio intéressant aussi Garrett Sorenson qui laisse entrevoir un instrument avec de la facilité et une belle musicalité.
James Levine dirige superbement l’opéra avec peut-être un plus d’inspiration que pour Carmen. Dès le début il insiste sur le côté tragique de l’action avec des ralentissements, des couleurs sombres, etc… La tension ne baisse pas une seconde et le chef conduit tous ses personnages vers l’issue finale avec une détermination inquiétante.


En résumé, un Otello qui ne manque pas de qualités à commencer par un rôle-titre dont l’interprétation ne demanderait qu’à être un peu affinée. Mais chanteurs et chef, sans oublier le metteur en scène, conjuguent leurs talents pour apporter une belle interprétation de l’un des plus impressionnants opéras de Verdi et c’est réussi car ils parviendront à faire retenir son souffle à un public convaincu de la noirceur douloureuse d’Otello, de la délicatesse amoureuse de Desdémone et de la rouerie de Iago.




A noter:
- reprise de ce spectacle avec les mêmes interprètes les 5 et 8 janvier 2005.
- Ben Heppner sera de nouveau Otello au Covent Garden du 28 juin au 16 juillet 2005 mais cette fois en compagnie d’une autre merveilleuse Desdémone, Renée Fleming (même mise en scène)


Manon Ardouin

 

 

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