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Langrée et le Rubik’s cube

Paris
Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines
10/22/2004 -  et 20 (Saintes), 21 (Caen) et 23 (Grenoble) octobre 2004
Wolfgang Amadeus Mozart : Symphonies n° 35 «Haffner», K. 385, et 41 «Jupiter», K 551 – Ah! lo previdi, K. 272 – Bella mia fiamma, K. 528

Amanda Roocroft (soprano)
Orchestre des Champs-Elysées, Louis Langrée (direction)


Ouvrant la saison musicale du Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, qui permettra par ailleurs d’entendre l’Orchestre philharmonique de Radio France, Jephta de Haendel, Le Tour d’écrou de Britten et Le Barbier de Séville de Rossini, l’Orchestre des Champs-Elysées proposait un programme qu’il donne actuellement dans le cadre d’une tournée en quatre étapes, chacune dans une région différente. Et sa soirée francilienne n’était même pas parisienne, tant il est vrai que malgré son nom – qui renvoie à ses débuts, voici treize ans, en étroite collaboration avec la salle de l’avenue Montaigne – la formation dont Philippe Herreweghe assure la direction artistique est désormais «en résidence en Poitou-Charentes» et associée à la Scène nationale de Poitiers.


Pour cette série, Louis Langrée, directeur du Festival «Mostly Mozart» de New York, dirigeait l’un de ses répertoires de prédilection, avec deux symphonies et deux airs de concert du compositeur salzbourgeois, et ce à la tête d’un orchestre qu’il connaît bien et qui, pour jouer sur instruments d’époque, ne s’en est pas moins spécialisé dans la période romantique, interprétant cette année Beethoven, Schumann, Bruckner et Mahler. La rencontre entre un chef qui est par ailleurs le directeur musical de l’Orchestre philharmonique de Liège (voir ici) et des musiciens issus du monde baroque témoigne d’un heureux rapprochement de deux univers dont l’opposition esthétique et institutionnelle appartient heureusement au passé, grâce à la curiosité de personnalités comme Rattle, Krivine, Harnoncourt, Gardiner ou Norrington, et à la qualité d’ensembles tels que l’Orchestre de l’Age des Lumières, l’Orchestre révolutionnaire romantique, la toute récente Chambre philharmonique ou, bien sûr, l’Orchestre des Champs-Elysées.


La Trente-cinquième symphonie «Haffner» (1782) mêle ainsi priorités des «baroqueux» (articulation précise, traitement des rythmes pointés) et tradition symphonique, en particulier une qualité instrumentale rarement prise en défaut – avec des chefs de pupitres du niveau de Marcel Ponseele au hautbois ou d’Ageet Zweistra (Mme Herreweghe) au violoncelle – évitant les ornières dans lesquelles se sont parfois enlisées certaines reconstitutions musicales (raideur, sécheresse, voire brutalité). Malgré un effectif qu’envieraient bien des orchestres de chambre, soit trente et une cordes, celles-ci, sans être grêles ou acides comme aux temps historiques de la vague baroque, n’en restent pas moins en retrait par rapport aux bois et aux cuivres, dont la sonorité robuste et fruitée constitue une appréciable consolation. Cela étant, Langrée, à mains nues et de plain-pied avec les cordes qu’il peut ainsi encourager au plus près, n’en imprime pas moins une dynamique cinglante, dramatisant le discours sans précipiter pour autant les tempi et ayant le souci d’une expression déjà plus romantique que classique, où ni le rubato ni le vibrato ne sont proscrits.


De part et d’autre de l’entracte, Amanda Roocroft chantait deux airs écrits, à dix ans d’intervalle, pour Josepha Duschek: Ah! lo previdi (1777), qui préfigure l’ire vindicative puis l’apaisement du grand air de Leonore dans Fidelio, et Bella mia fiamma (1787), composé à Prague au moment de la création de Don Giovanni. La soprano britannique ne manque pas d’engagement, mais peine à restituer correctement les grands intervalles et à produire des aigus satisfaisants, entre attaques imprécises et tendance à crier, que l’on pourra certes attribuer à l’emportement des personnages qu’elle incarne.


Dans la Quarante et unième symphonie (1788), fourmillant d’idées peut-être contestables mais toujours intéressantes, Langrée confirme les options retenues dans la Haffner et livre donc une Jupiter joyeuse, juvénile et impertinente bien plus que tonnante, monumentale ou intimidante. L’ampleur (trente-huit minutes, toutes les reprises étant scrupuleusement observées) et le caractère conquérant du propos annoncent même l’Héroïque de Beethoven. Le chef français fera reprendre la fin du Molto allegro final, après avoir exprimé en quelques mots sa fascination pour cette coda en forme de «Rubik’s cube» qui combine et superpose les cinq thèmes du mouvement.


Le site de l’Orchestre des Champs-Elysées


Le site du Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines (Scène nationale)




Simon Corley

 

 

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