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Nature romantique

Paris
Théâtre Mogador
10/13/2004 -  
Felix Mendelssohn : Mer calme et heureux voyage, opus 27
Robert Schumann : Concerto pour piano, opus 54
Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 6 «Pastorale», opus 68

Lars Vogt (piano)
Orchestre de Paris, Marek Janowski (direction)


Une semaine après des débuts triomphaux avec l’Orchestre de Paris dans Bruckner (voir ici), Marek Janowski restait fidèle à l’un des répertoires où il excelle, avec un triptyque classique ouverture/concerto/symphonie entièrement consacré au romantisme allemand et, plus particulièrement, à l’un de ses thèmes de prédilection, la nature.


L’ouverture Mer calme et heureux voyage (1828), fondée sur deux poèmes de Goethe qui avaient déjà inspiré Beethoven treize ans plus tôt (une œuvre encore plus rare que l’on pourra découvrir à l’Orchestre de Paris les 26 et 27 janvier prochain sous la direction de Sylvain Cambreling), pâtit sans doute, dans son esthétique un rien naïve, de la comparaison avec Les Hébrides. Obtenant des cordes une parfaite plénitude sonore, Janowski parvient cependant à suggérer une mer étale, qui n’en contraste que davantage avec l’animation et la couleur qu’il confère à «l’heureux voyage».


Le Concerto pour piano (1845) de Schumann, comme bon nombre de partitions râbachées, se révèle nettement moins facile à aborder qu’il y paraît. Lars Vogt possède certes des moyens hors du commun, mais il est d’autant plus regrettable que l’on soit amené à s’interroger sur l’usage qu’il en fait, tant la cohérence de sa vision aura paru difficile à cerner. Globalement athlétique et appuyée, voire anguleuse et brutale, chaque accord arrachant au soliste des expressions d’intense douleur, elle privilégie, pour reprendre l’opposition entre les deux personnages auxquels Schumann s’identifiait volontiers, l’impulsif Florestan sur le rêveur Eusébius. Plus portée sur la spontanéité que sur le naturel, elle n’en ménage pas moins, notamment dans l’Intermezzo, une petite part d’onirisme, le pianiste allemand démontrant alors sa capacité à faire preuve de raffinement et de tendresse. En admirables professionnels, Janowski et l’Orchestre de Paris adhèrent autant que possible à ce discours. En bis, le troisième des Moments musicaux D. 780 (1824) de Schubert manifeste un souci inattendu de faire joli, entre clins d’œil et maniérismes.


En seconde partie, l’intégrale des symphonies de Beethoven entreprise cette saison par l’Orchestre de Paris sous la baguette de différents chefs se poursuivait avec la Pastorale (1808), dont on retrouvait d’ailleurs quelques échos dans l’ouverture de Mendelssohn. Si la Neuvième, il y a quinze jours (voir ici), n’a pas eu droit à un tel traitement, le public est averti que chaque symphonie sera désormais précédée par la lecture de textes appartenant aussi bien à la littérature qu’à la critique musicale ou aux écrits du compositeur. Confiée à deux «jeunes acteurs», cette introduction censée «détourner le rite (sacré?) du concert» tourne cependant court, tant, dans les extraits choisis, l’ampoulé (un article de Berlioz) le dispute au ridicule (Beethoven de René Fauchois, drame en trois actes – et, hélas, en vers – créé en 1909), tandis que la déclamation se cantonne à un seul registre, celui de l’exaltation niaise.


La musique est décidément un langage bien plus universel, où chacun, en tout cas, peut entendre ce que bon lui semble. Au demeurant, ce n’est pas avec Marek Janowski que l’on courait le moindre risque de dérive amphigourique, tant il s’est fait une réputation de rigueur et d’objectivité. Par conséquent, rien de descriptif ici, même dans l’Orage, considéré avec quelque distance, qui, ne venant guère troubler l’étonnante sérénité présidant à l’ensemble, n’effraiera ni le public, ni même les «joyeux paysans», lesquels n’en auront pas moins auparavant fêté leur réunion avec la robustesse appropriée. Equilibrée, sereine, radieuse, souple et plutôt allante (Scène au bord du ruisseau, Final), la symphonie respire amplement, avec une opulence confortable, moelleuse, relativement inattendue sous la baguette du chef allemand, mais tenant sans doute à un effectif assez fourni (soixante cordes) ainsi qu’à la remarquable qualité des vents. Non moins inhabituel chez lui est le relatif hédonisme qu’il se sera accordé, avec un sens du rubato qu’on ne lui connaissait pas et la délicatesse très ouvragée de certains passages.


C’est donc non sans impatience que l’on attendra décembre pour retrouver Marek Janowski, toujours dans le cadre de l’intégrale Beethoven de l’Orchestre de Paris, avec la Troisième symphonie «Héroïque».



Simon Corley

 

 

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