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Ballets antiques et antinomiques

Paris
Maison de Radio France
01/16/2004 -  
Igor Stravinski : Apollon musagète – Concerto pour piano et instruments à vent
Aram Khatchaturian : Spartacus (Première et Deuxième suites, extraits)

Frank Braley (piano)
Orchestre philharmonique de Radio France, Kirill Karabits (direction)


«Jeune chef associé» de l’Orchestre philharmonique de Radio France depuis avril dernier, Kirill Karabits, vingt-sept ans, dirige deux ballets qui partagent certes une référence commune à l’Antiquité – grecque pour Stravinski, romaine pour Khatchaturian – mais avec des esthétiques on ne peut plus divergentes: néoclassicisme de l’un contre… prix Lénine de l’autre.


Apollon musagète (1928) de Stravinski, quelque peu atypique dans la production du compositeur, avec ses rythmes pointés fondés sur la métrique grecque et son instrumentation pour les seules cordes, pourrait fâcheusement verser dans l’abstraction d’un «ballet blanc», mais le chef ukrainien y voit davantage un pastiche, à la manière du Bourgeois gentilhomme de Strauss, et y met donc l’humour, l’ironie, le charme ou la grâce requis, jusque dans les solos d’Elisabeth Balmas au violon, obtenant des trente-trois musiciens une transparence (Pas de deux) et un élan (Coda) remarquables.


Changement complet de décor avec trois extraits de la Première suite et un extrait de la Deuxième suite de Spartacus (1954) de Khatchaturian. Force est de constater que le centenaire de sa naissance, l’année dernière, sera quelque peu passé inaperçu en France, du moins dans les salles de concert. On peut le regretter… tout en comprenant les raisons, lorsque l’on constate que Yann-Edern Goas, dans des notes de programme par ailleurs très complètes et documentées, se sent contraint de déployer des trésors de rhétorique pour justifier que l’on puisse jouer et apprécier une telle musique à notre époque.


Peu importe, car l’Orchestre philharmonique au grand complet, avec force percussion, piano, célesta et deux harpes, s’ébroue joyeusement dans une partition tour à tour entraînante et colorée (Variations d’Egine), sauvage et brutale (Scène et danse avec crotale), chaleureuse et lyrique (Adagio d’Egine et Harmodius), frénétique et en état de transe (Danse de Gaditana et victoire de Spartacus). L’enthousiasme du public est redoublé par une trépidante Danse du sabre, extraite de Gayaneh (1942), donnée en bis.


Entre ces deux ballets, Frank Braley avait interprété une autre œuvre de Stravinski, le Concerto pour piano et instruments à vent (1924), moins intemporel qu’Apollon musagète, résolument ancré dans les années 1920, avec son Largo introductif qui évoque le Poulenc d’Aubade (1929), ses mouvements vifs qui annoncent, avec la même primauté accordée aux instruments à vent, ceux du Deuxième concerto (1931) de Bartok, et un Largo central dont le hiératisme rappelle l’esprit du mouvement lent du Concerto pour clavecin (1926) de Falla. Tel un félin qui rétracte aussi rapidement ses griffes qu’il les a sorties, le pianiste français privilégie l’engagement rythmique, parvenant à conjuguer distanciation antiromantique et expression. La bonne santé des cuivres tend parfois, revers de la médaille, à couvrir le soliste, qui, en bis, reste fort opportunément dans la thématique stravinskienne et chorégraphique de la soirée, avec un Tango (1940) parfaitement maîtrisé et idéalement pince-sans-rire.



Simon Corley

 

 

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