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Paris
Théâtre de l’Athénée (Louis Jouvet)
12/16/2003 -  - et 18, 19, 23, 24, 26, 31 décembre, 2 et 4 janvier
Francis Poulenc : Le Gendarme incompris
Igor Stravinski : L’Histoire du soldat

Shahrokh Moshkin Ghalam (Marquise de Montonson/Le soldat), Volodia Serre (Jules Médor/Le diable), Olivier Balazuc (La Pénultième/Le récitant), Sara Mangano (La princesse)
Antoine Campo (mise en scène, scénographie, costumes), Jean Guizerix (chorégraphie), Matthieu Ferry (lumières)
Orchestre OstinatO: Hélène Frissung (violon), Mi-Sung Kim (violoncelle), Hsin Tsei Tsai (contrebasse), Francis Prost (clarinette), Kaori Yokoyama (basson), Raphaël Gouthière (cornet), Damien Fève (trombone), Arnaud Lassus (percussion), Jean-Luc Tingaud (direction)


Après deux opéras de chambre de Martinu en décembre dernier (voir ici), l’Athénée (Théâtre Louis Jouvet) poursuit dans la même veine d’un entre-deux-guerres plus ou moins teinté de surréalisme, avec à nouveau deux brefs spectacles musicaux présentés à l’occasion des fêtes de fin d’année: Le Gendarme incompris (1921) de Cocteau, Radiguet et Poulenc, puis L’Histoire du soldat (1918) de Ramuz et Stravinski. Difficile, en effet, de ne pas citer d’un seul élan le nom des écrivains et celui des compositeurs, tant texte (parfois chanté dans le premier, parfois scandé dans le second) et musique y partagent la vedette.


Conçues à la même époque dans un esprit volontiers caustique, ces oeuvres peuvent également être rapprochées par le lien qu’elles entretiennent toutes deux avec deux grands artistes: non seulement Cocteau, bien sûr, qui co-écrivit la première et tint, notamment au disque, le rôle du récitant dans la seconde, mais aussi Ansermet, qui joua la première à Londres (sous les sifflets) et créa la seconde à Lausanne. Au-delà, toutefois, difficile de trouver d’autres points communs entre le jeu de massacre dadaïste de l’une et l’intensité expressive de l’autre.


Dans Le Gendarme incompris, les auteurs, prenant prétexte d’une intrigue à la cohérence volontairement incertaine (on y trouve un commissaire-chien nommé Jules Médor), prennent un malin plaisir à se moquer de Mallarmé (un gendarme nommé… La Pénultième s’y exprime en caricaturant son style), et, surtout, à manier tout ce qui pouvait choquer le public d’alors en matière de politique, de religion ou de moeurs. De ce point de vue, l’ambiguïté qui ne cesse d’être entretenue quant au sexe de la Marquise de Montonson, que le gendarme s’obstine à confondre avec un prêtre, rappelle Les Mamelles de Tirésias (1917) d’Apollinaire (que Poulenc mettra en musique en 1944).


S’ils recherchaient le scandale, les trois jeunes auteurs (moyenne d’âge: vingt-quatre ans) furent sans doute comblés, puisque les trois représentations données en mai 1921 au Théâtre Michel furent, dit-on, chahutées. La musique y occupe la portion congrue, même si l’on ne peut sans doute qualifier le travail de Poulenc de musique de scène, la partition étant étroitement imbriquée dans le déroulement de la pièce et les acteurs étant appelés à chanter. Toujours est-il que le compositeur, alors âgé de vingt-deux ans, est déjà parfaitement reconnaissable, avec une efficacité et une manière qui sont celles de ses contributions aux Mariés de la Tour Eiffel ou de ses Biches.


Outre sa relative rareté, cette courte (trente-cinq minutes) pochade apéritive présentait surtout l’intérêt de faire appel à une formation instrumentale quasi identique à celle de L’Histoire du soldat. De cette matière autrement plus aboutie, André Campo (mise en scène et costumes) et Jean Guizerix (chorégraphies), qui avaient déjà de belles trouvailles cocasses à leur actif en première partie, proposent une réalisation à la fois rigoureuse et superbe, avec un effectif plus restreint de danseurs et de figurants, combinant idéalement toutes les dimensions de ce conte: l’humour, la dérision, le cirque, le rêve et le drame. A la tête de solistes issus de l’Orchestre Ostinato, Jean-Luc Tingaud, tour à tour cinglant et poétique, s’inscrit parfaitement dans cette approche.


L’un des mérites de cette production est d’avoir abordé ces deux oeuvres comme un tout, à la fois littéraire, musical et chorégraphique, à la fois visuel et sonore. Mais elle doit son succès à la polyvalence exceptionnelle des trois acteurs principaux, aussi convaincants en acteurs qu’en danseurs, voire en chanteurs: Shahrokh Moshkin Ghalam (La marquise/Le soldat), Volodia Serre (Jules Médor/Le diable) et Olivier Balazuc (La Pénultième/Le récitant).



Simon Corley

 

 

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