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Fête russe

Paris
Opéra de Massy
12/20/2003 -  et 12 (Les Lilas), 13 (Roissy-en-France), 14 (Villeparisis), 16 (Le Mée-sur-Seine), 18 (Paris) et 19 (Montereau) décembre
Nikolaï Rimski-Korsakov : Capriccio espagnol, opus 34
Piotr Ilyich Tchaïkovski : Concerto pour piano n° 1, opus 23
Dimitri Chostakovitch : Suite de jazz n° 2

Brigitte Engerer (piano)
Orchestre national d’Ile-de-France, direction : Dimitri Yablonsky


Pour la septième et dernière fois, après une tournée dans l’ensemble de la région (y compris la capitale), l’Orchestre national d’Ile-de-France (ONDIF) donnait ce programme intégralement russe, sous la bannière un peu tape-à-l’œil de «Bons baisers de Saint-Pétersbourg». Mais qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse, d’autant qu’après tout, 2003 n’était pas seulement l’année Berlioz, mais aussi celle du trois centième anniversaire de la fondation de la «Ville de Pierre».


Dès le Capriccio espagnol (1887) de Rimski-Korsakov, un peu injustement éclipsé, de nos jours, par l’inévitable Shéhérazade, Dimitri Yablonsky, d’une stature physique impressionnante, démontre qu’il n’est pas passé pour rien de l’archet du violoncelle à la baguette de chef, offrant une vision spectaculaire, puissante et virtuose de cette partition haute en couleurs, avec notamment une conclusion effrénée qui révèle un orchestre en grande forme. La performance est d’autant plus appréciable qu’elle est servie par l’acoustique remarquable de l’Opéra de Massy, qui concilie sens du détail (netteté des solos de violon, de violoncelle, de clarinette ou même de harpe) et homogénéité de l’ensemble.


Brigitte Engerer, une habituée de l’ONDIF, dans le Premier concerto pour piano (1875) de Tchaïkovski, c’est une assurance tous risques: athlétique sans histrionisme, adoptant un premier degré dépourvu de routine ou de vulgarité, elle s’impose sans peine, au milieu d’un incessant festival de toux, par ses moyens techniques, évitant toutefois de se contenter de la nuance fortissimo. Le mouvement lent se montre même capricieux, fantasque et allant, tandis que le premier thème du finale, résolument percussif, évoque une sorte de Prokofiev mené à un train d’enfer. Ici aussi, l’acoustique restitue le son du piano avec beaucoup de naturel et de présence, tout en l’enrobant sans peine avec celui de l’orchestre, net et précis.


C’est non sans émotion que l’on écoute en bis Chiarina et Chopin extraits du Carnaval de Schumann. Car, au-delà des qualités de cette musique d’exception, l’on se souvient que ce sont ces deux mêmes pièces qu’elle donna également pour remercier le public au cours de ce qui devait être, début octobre 2002, l’un des tout derniers concerts de Youri Ahronovitch (voir ici).


Pas beaucoup de jazz, sinon des instruments plus ou moins inhabituels (saxophones, guitare, accordéon) associés à une formation traditionnelle, dans la Seconde suite de jazz (1938) de Chostakovitch, dont a peine à croire qu’elle ait pu voir le jour aux pires moments de la terreur stalinienne. Une publicité et un excellent disque de Riccardo Chailly auront toutefois rendue célèbre la Seconde valse et réveillé l’intérêt pour ces admirables musiques de divertissement – qui n’ont rien à envier, en ce temps de fêtes de fin d’année, aux bonbons viennois, avec cette succession de marches, de valses, de polkas et de danses – écrites par un compositeur décidément tout-terrain, mais il est encore rare d’entendre intégralement l’une de ces suites en concert. L’occasion est d’autant plus appréciable que Yablonsky, chef principal de l’Orchestre philharmonique de Russie (depuis 2002), y met le punch requis, soulignant le côté nerveux et dynamique de ces pages, et évitant tout excès de sentimentalité dans les fameuses valses. Excellente idée, également, que de donner en bis, avec une infinie délicatesse, l’inattendu Tahiti Trot (1928), un arrangement par Chostakovitch de l’immortel Tea for two de Vincent Youmans.


Au terme de cette soirée, les musiciens saluent chaleureusement le chef: ce n’est que justice. Mais ce chef n’est hélas pas leur chef. Car l’orchestre, depuis le départ programmé de Jacques Mercier, voici dix-huit mois, ne possède toujours pas de directeur musical et se trouve même actuellement sans premiers violons supersolistes (c’est Luc Héry, transfuge de l’Orchestre national de France, qui en tenait lieu pour ces concerts). Il faudrait donc que des nominations soient annoncées sans délai, afin que ce remarquable ensemble qui – on ne le dira jamais assez – accomplit une formidable action en profondeur pour diffuser la musique classique dans une région qui rassemble un cinquième de la population française, puisse rapidement travailler dans de meilleures conditions.



Simon Corley

 

 

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