About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Brève présence

Paris
Maison de Radio France
02/14/2003 -  

Anton Webern : Im Sommerwind
Jean-Louis Agobet : Génération
Hans Werner Henze : Symphonie n° 1 (création française)


Michel Portal, Paul Meyer, Alain Billard (clarinettes), Orchestre philharmonique de Strasbourg, Jan Latham-Koenig (direction)


Malgré l’extrême brièveté du programme (quarante-cinq minutes), l’auditorium Olivier-Messiaen était à nouveau rempli pour ce concert de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg mené par Jan Latham-Koenig, son directeur musical depuis 1997.


Découverte en 1961 et créée l’année suivante par Eugene Ormandy, Im Sommerwind (1904), idylle pour grand orchestre d’après un poème de Bruno Wille, détonne fortement par rapport au style de maturité d’Anton Webern. D’un caractère agreste très affirmé, qui n’est pas sans rappeler parfois les Murmures de la forêt wagneriens, elle n’en convoque pas moins un orchestre d’esthétique et de dimension (six cors, cinq clarinettes) straussiennes. Si l’on songe parfois aussi à la finesse d’instrumentation des Gurrelieder de Schönberg, le futur Webern perce peut-être déjà, en ce sens qu’il utilise cet imposant effectif bien plus souvent pour des dialogues entre pupitres solistes que pour des effets de masse.


La ronde des orchestres nationaux dits «de région» - ou, si l’on préfère, des orchestres de région dits «nationaux» - accompagnés de leur compositeur en résidence se poursuivait, après Lille et Graciane Finzi (voir ici) puis Montpellier et Marco-Antonio Perez-Ramirez (voir ici), avec l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et Jean-Louis Agobet (né en 1968). Le compositeur français, qui fut d’ailleurs aussi en résidence à Montpellier entre 1998 et 2000, présentait Génération, un concerto grosso pour trois clarinettes destiné à un fameux trio de musiciens : Michel Portal (jouant également une clarinette basse), Paul Meyer et Alain Billard (membre de l’Ensemble intercontemporain, se démenant aussi avec la spectaculaire clarinette contrebasse). Agobet fait partie de cette… génération qui peut enfin contempler sereinement les acquis du siècle passé et mêler, dans une même partition, différents styles d’écriture. Un syncrétisme qui, ne cédant pas à la facilité, n’est pas aussi provocateur, ironique, distant et virtuose que celui de Thomas Adès, son cadet de trois ans, auquel l’édition 2006 du festival Présences sera d’ailleurs consacrée. En trois sections d’une durée totale de seize minutes, l’œuvre paraît viser une synthèse étonnante entre des courants qu’on a plutôt pour habitude d’opposer, à savoir, schématiquement, une volubilité séduisante à la Berio - en harmonie avec la richesse des possibilités offertes par la clarinette - et une pulsation répétitive qui évoque Reich. Fluide quoique progressant par épisodes bien caractérisés, cette musique n’est pas dépourvue d’humour et ménage nombre d’effets de surprise.


Après son ultime Dixième entendue la veille (voir ici), retour aux origines, cinquante-trois ans plus tôt, avec la Première symphonie (1947) de Henze, composée, comme Im Sommerwind, par un jeune homme de vingt et un ans. Créée sous la direction de Wolfgang Fortner, cette symphonie, la plus concise du cycle (dix-sept minutes), fut entièrement restructurée et réinstrumentée (pour un orchestre de dimension réduite) seize ans plus tard et à nouveau révisée en 1991. Il est significatif que Henze ait tenu ainsi, à diverses périodes de sa vie, à revenir sur cette partition, de telle sorte qu’il semble difficile, compte tenu de son haut degré d’achèvement et faute de pouvoir la comparer à la version originale, de la considérer comme une œuvre de jeunesse. On avouera, de ce fait, avoir quelque difficulté à croire qu’on assistait là à sa première française (peut-être s’agissait-il plutôt de la première exécution en France de la version révisée de 1991). Toujours est-il qu’on retrouve sans peine dans ces trois brefs mouvements certains éléments désormais habituels du style de Henze : une agilité rythmique que l’on a toujours fortement envie de qualifier de stravinskienne, la place accordée aux soli (bois, alto), la présence des timbres du piano, du célesta et de la harpe. Dans les mouvements extrêmes, la froideur et le tranchant néo-classiques (Hindemith, Stravinski) cohabitent harmonieusement avec une écriture marquée par Webern ou par Hartmann (ce dernier plus particulièrement dans l’ostinato hargneux de l’allegro con moto final). En contraste total, le notturno central, parenthèse poétique et recueillie, au charme étrange, recourt à un langage parfois modal, qui lui confère un caractère à la fois chaleureux et hors du temps et qui suggère des rapprochements assez inattendus avec l’esprit de certains compositeurs anglais (Vaughan Williams, Britten).


Concert diffusé sur France Musiques le dimanche 23 février à 19 heures.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com