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Un concert riche en émotion Bruxelles Bozar, Salle Henry Le Bœuf 10/19/2025 - Modeste Moussorgski : Une nuit sur le mont Chauve (orchestration Nikolaï Rimski-Korsakov) – Chants et danses de la mort (orchestration Chostakovitch)
Dimitri Chostakovitch : Symphonie n° 5, opus 47 Olesya Petrova (mezzo-soprano)
Orchestre symphonique de la Monnaie, Dmitry Matvienko (direction)
 D. Matvienko(© Daniil Rabovsky)
A cause de « circonstances imprévues », des termes laissant planer le doute sur les véritables raisons, le chef russe Timur Zangiev a dû annuler sa participation à ce concert de l’Orchestre symphonique de la Monnaie. Nous n’avons donc pas entendu la « Danse des esclaves perses », extraite de Khovantchina, mais il s’agit du seul changement au programme de ce concert réussi, malgré les circonstances : placés sous la direction de Dmitry Matvienko, les musiciens livrent une prestation profonde et riche en émotion. Et il faut retenir le nom de ce jeune chef biélorusse (né en 1990) qui a su, d’une part, exploiter le potentiel de l’orchestre et, d’autre part, dominer, sur la forme comme sur le fond, les trois œuvres exécutées ce dimanche.
Entendre Une nuit sur le mont Chauve (1866‑1867) dans la version originale de Moussorgski, ce n’est pas encore pour cette fois. L’orchestre joue, en effet, cette œuvre dans l’orchestration bien connue de Rimski‑Korsakov. Le volume sonore paraît quelque peu élevé par moments, et le chef accentue l’un ou l’autre passage, probablement pour retrouver le ton abrasif et sauvage de la mouture originelle. Mais l’exécution convainc par les sonorités évocatrices de l’orchestre, en particulier celle des bois, et par son énergie narrative. La voix, impressionnante d’ampleur et de profondeur, d’Olesya Petrova résonne ensuite dans les moindres recoins de la Salle Henry Le Bœuf. Cette mezzo‑soprano au timbre somptueux chante avec une grande justesse d’expression, et ce qu’il faut aussi de gravité, les Chants et danses de la mort (1875‑1877) : une interprétation implacable, sombre et tendue. Tout en mettant en valeur l’orchestration de Chostakovitch, le chef ajuste la puissance en fonction de cette voix sans doute idéale pour la Comtesse de La Dame de pique, à l’affiche de l’Opéra royal de Wallonie, du 27 février au 7 mars.
La Cinquième Symphonie (1937) de Chostakovitch occupe la seconde partie de ce concert cohérent. Dmitry Matvienko exprime avec intensité et profondeur le contenu expressif de cette saisissante symphonie, avec l’appui de musiciens particulièrement au point et concernés. L’exécution, dense et ferme, s’appuie sur de solides fondations, ainsi que sur des tempi équilibrés et naturels, sans impression de précipitation, surtout dans la seconde moitié du dernier mouvement, ou d’alanguissement lénifiant, le Largo se démarquant par son intensité et son émotion sobrement exprimée. C’est que le chef ne cherche pas à appuyer là où plus d’un sont tentés de surinterpréter la partition ou à exagérer les effets. Les montées en puissance n’en demeurent pas moins saisissantes, le chef affichant une grande maitrise de la dynamique et des contrastes. Le message de cette symphonie se dégage ainsi avec force et conviction, sans ambiguïté, couronnant un concert dont la conclusion persiste dans la mémoire.
Le site de Dmitry Matvienko
Sébastien Foucart
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