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Le retour du Philharmonique de Vienne

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
09/10/2025 -  et 3 (Grafenegg), 6 (Luzern), 9 (London), 12 (Ljubljana), 13 (Graz) septembre 2025
Wolfgang Amadeus Mozart: Symphonie n° 38 « Prague » en ré majeur, K. 504
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Symphonie n° 6 « Pathétique » en si mineur, opus 74

Wiener Philharmoniker, Franz Welser-Möst (direction)


F. Welser‑Möst (© Sebastian Fröhlich)


Avouons que nous allions à ce concert avec certains a priori. Les dernières venues de l’Orchestre philharmonique de Vienne (en résidence au Théâtre des Champs‑Elysées depuis 1993) n’avaient en effet guère été convaincantes, que ce soit sous la baguette de Daniele Gatti ou sous celle de Zubin Mehta, l’illustre phalange ayant, lors de ces concerts, montré certaines faiblesses que nous ne connaissions pas jusqu’alors. Quant à Franz Welser‑Möst, bien qu’il ait noué avec le Philharmonique de Vienne des liens très étroits au fil de plus de deux cent vingt concerts et représentations d’opéra depuis leur première rencontre le 30 janvier 1998 (il fait partie des rares chefs d’orchestre à avoir été nommé « membre honoraire » de l’orchestre en avril 2024), il a alterné les hauts (notamment à Salzbourg en dirigeant de mémorables représentations de Salomé à l’été 2019 et d’Elektra deux ans plus tard) et les bas, ayant par exemple dirigé cet été au Festival de Salzbourg une Neuvième Symphonie d’Anton Bruckner dont il se dit qu’elle ne fut guère transcendante. Ajoutons à cela que le programme (deux « tubes » du grand répertoire) pouvait laisser augurer un concert routinier, voire une nouvelle fois décevant. Force est de constater qu’il n’en aura rien été et c’est donc avec à la fois joie et une certaine émotion que nous avons, ce soir, retrouvé le grand Philharmonique de Vienne comme nous avons eu la chance de l’entendre à plusieurs reprises par le passé.


Ne comptons pas sur Franz Welser-Möst pour adopter les options d’une approche historiquement informée d’une symphonie de Mozart, qui plus est de la Trente‑huitième « Prague » (1786). Mais le chef est autrichien et la musique de l’enfant de Salzbourg coule à l’évidence dans ses veines (ne parlons même pas de celles de l’orchestre) ; et c’est ce naturel qui va servir de fil conducteur à une interprétation extrêmement enlevée, magnifiée par des timbres enjôleurs d’un orchestre aux cordes fournies (près d’une quarantaine) mais très allantes. Même si la direction s’avère un peu raide dans le premier mouvement (Adagio - Allegro), on tombe vite sous le charme de cette clarté des plans sonores, de cette cohésion chez les cordes (emmenées par le Konzertmeister Volkhard Steude) et de ces individualités qui savent parfaitement se fondre dans un ensemble d’une évidente qualité (mention spéciale aux deux bassonistes). L’Andante est joué à bonne allure, les thèmes passant d’un pupitre à l’autre avec une fluidité admirable. On aurait sans doute pu souhaiter davantage de liberté dans le Presto conclusif mais la petite harmonie batifole, le tempo est enlevé et la direction de Franz Welser‑Möst est plus élégante que jamais : une entrée en matière de tout premier ordre.


Après l’entracte, l’orchestre revint sur scène doté d’un effectif plus important, Franz Welser‑Möst ayant souhaité adopter une disposition des musiciens des plus classiques : premiers et seconds violons côte à côte sur sa gauche, violoncelles au centre, altos sur la droite et contrebasses derrière ces derniers (et non en fond de scène comme on a l’habitude de les voir au Musikverein), renforçant ainsi la cohésion des cordes et contribuant sans nul doute à accroître leur puissance sonore. Il fallait bien ça pour jouer la Sixième Symphonie « Pathétique » de Tchaïkovski qui, composée en 1893, entra au répertoire du Philharmonique de Vienne dès le mois de mars 1895 sous la direction de Hans Richter. L’interprétation qu’en donnèrent ce soir l’orchestre et Franz Welser‑Möst fut absolument remarquable. Le caractère sombre du premier mouvement (magnifiques bassons de nouveau tenus par Lukas Schmid et Benedikt Dinkhauser) fut parfaitement rendu, l’orchestre se parant d’une palette de couleurs comme on a peu l’occasion de l’entendre (le fracas orchestral consécutif au passage joué par la clarinette solo et la clarinette basse). L’Allegro con grazia s’avéra bien plus viennois que russe : l’atmosphère de valse s’impose d’emblée (on pense au « Pas de deux » de Casse‑Noisette), Welser‑Möst (qui, rappelons‑le, a d’ores et déjà trois concerts du Nouvel An à son actif) dirigeant tout cela avec une souplesse féline mettant notamment en exergue des pupitres de violoncelles et d’altos enjôleurs. L’Allegro molto vivace fut un rien décevant : après une entrée un peu hésitante au niveau de la mise en place, Welser‑Möst lança l’orchestre avec volontarisme mais à une allure un peu trop modérée alors qu’on aurait à titre personnel préféré quelque chose de plus débridé. La raideur que l’on aura parfois de nouveau perçue dans sa direction n’empêchera pas l’orchestre de conclure avec maestria un mouvement salué par les applaudissements de plusieurs spectateurs. Mais le chef enchaîna immédiatement avec le Finale. Adagio lamentoso, plongeant le public et l’orchestre dans une des pages les plus poignantes du compositeur russe. Gravité des sonorités, longueur d’archet des cordes, tension menée d’une main de maître, solistes en état de grâce (Luc Mangholz à la flûte, Sebastian Breit au hautbois, le toujours impressionnant Anton Mittermayr aux timbales) : alors, comment ne pas saluer, à l’instar d’un Théâtre des Champs‑Elysées comble, un Franz Welser‑Möst des grands soirs (lui‑même chaleureusement applaudi par l’orchestre) et un Philharmonique de Vienne cette fois‑ci fidèle à sa légende (regrettons à ce propos de ne pas avoir eu de bis) ? Autant dire que nous attendons avec impatience sa venue pour la saison 2026‑2027.


Le site de Franz Welser-Möst
Le site de l’Orchestre philharmonique de Vienne



Sébastien Gauthier

 

 

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