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L’harmonie en famille

Lausanne
Salle Métropole
05/01/2024 -  et 2 mai 2024
Camille Saint‑Saëns : Symphonie n° 2 en la mineur, opus 55
Johannes Brahms : Concerto pour piano n° 2 en si bémol majeur, opus 83

Alexandre Kantorow (piano)
Orchestre de Chambre de Lausanne, Jean‑Jacques Kantorow (direction)


A. Kantorow (© Sasha Gusov)


La foule des grands soirs se presse à la Salle Métropole pour assister à un concert de l’Orchestre de Chambre de Lausanne (OCL) qui fera date, à n’en pas douter, car il réunit Jean‑Jacques Kantorow et son fils Alexandre. Les deux artistes, en effet, sont rarement à l’affiche ensemble. Si, chez les Kantorow, la musique est bel et bien une affaire de famille (la maman est violoniste !), chacun mène sa carrière de son côté, si bien que les quelques concerts communs ont des allures d’événements. La soirée débute avec la rarissime Deuxième Symphonie de Camille Saint‑Saëns. Des cinq symphonies du compositeur français, seule la Troisième, dite « avec orgue », a trouvé sa place au répertoire. Le chef Jean‑Jacques Kantorow connaît les cinq partitions comme sa poche, si l’on peut dire, pour avoir gravé, dans les années 1990, un CD avec le Tapolia Sinfonietta d’Helsinki consacré à Saint‑Saëns et incluant la Deuxième Symphonie, avant une intégrale avec l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège ces dernières années. Pour la petite histoire, c’est avec cette même formation que Jean‑Jacques Kantorow a enregistré les cinq Concertos pour piano de Saint‑Saëns avec son fils Alexandre au clavier. La Deuxième Symphonie (1859, Saint‑Saëns avait alors 24 ans) est une partition courte (à peine plus de 20 minutes), vive et légère, à l’orchestration réduite et inspirée par Haydn ou encore les jeunes Beethoven et Schubert. A la tête de l’OCL, Jean‑Jacques Kantorow en donne une version finement nervurée et dotée d’une grande force rythmique, toute en légèreté et en transparence. Le premier mouvement surprend par sa fugue initiale, au lieu de la traditionnelle sonate. Le chef l’aborde de manière leste et alerte. Le deuxième mouvement se fait délicat et raffiné, avec un splendide solo du cor anglais. Après un Scherzo vigoureux, le Prestissimo final séduit par son côté vif et brillant. Pour beaucoup de spectateurs ce soir, cette Deuxième Symphonie de Saint‑Saëns est une belle découverte !


Changement total de décor après l’entracte avec le Second Concerto pour piano de Brahms, œuvre massive s’il en est, aux dimensions impressionnantes et à l’effectif important, aux antipodes donc de la Deuxième Symphonie de Saint‑Saëns. Alexandre Kantorow fait son entrée sur scène, tout de noir vêtu. Malgré sa silhouette fluette, avec ses bras très longs et ses mains fines, il porte en lui une énergie incroyable et possède la carrure et l’endurance nécessaires pour affronter une partition aussi touffue et fantaisiste, avec des changements fréquents d’atmosphère. Lorsque le soliste pose ses doigts sur le clavier, c’est l’onde de choc, le son rivalisant presque avec celui de l’orchestre. Pour les Kantorow père et fils, ce Second Concerto de Brahms est bien celui du romantisme par excellence, et on sent l’énergie, la fougue, la flamme, dans une connivence faite de dialogue et d’écoute, sans lutte ni rivalité, même si parfois de petits décalages se font entendre. Après l’effervescence et le tourbillon des deux premiers mouvements, l’Andante est un véritable petit bijou, grâce à la légèreté et au toucher aérien du soliste, comme si ses doigts effleuraient à peine l’instrument. Ce troisième mouvement est de surcroît magnifié par les superbes interventions du violoncelle. L’Allegretto grazioso final se pare de grâce et de gaieté avec ses nombreux passages de valse. Après cette prestation mémorable, le public applaudit à tout rompre. Et malgré l’effort consenti, Alexandre Kantorow, particulièrement généreux, offre deux bis : tout d’abord le Premier des Intermezzi de l’Opus 117 de Brahms, puis une transcription débridée (par Nina Simone !) de l’air le plus célèbre de l’opéra Samson et Dalila de Saint‑Saëns, « Mon cœur s’ouvre à ta voix ». La boucle est bouclée !



Claudio Poloni

 

 

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