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Les Américains, cains, cains, cains

Paris
Cité de la musique
01/18/2024 -  
Terry Riley : Sunrise of the Planetary Dream Collector
Caroline Shaw : Entr’acte
Philip Glass : Quatuor à cordes n° 9 « King Lear »

Quatuor Tana : Antoine Maisonhaute, Ivan Lebrun (violon), Takumi Nozawa (alto), Jeanne Maisonhaute (violoncelle)


Le Quatuor Tana


Le douzième concert de la onzième Biennale de quatuors à cordes de Paris se déroulait à nouveau dans l’amphithéâtre de la Cité de la Musique mais cette fois en fin d’après‑midi. Il permettait d’entendre le Quatuor Tana (fondé en 2010), dans un programme résolument américain dans lequel il a déjà eu l’occasion de s’illustrer brillamment au disque. Une œuvre de Caroline Shaw, compositrice née en Caroline du Nord en 1982 y était en effet encadrée de deux quatuors de figures du minimalisme américain, Terry Riley et l’envahissant et populaire Philip Glass.


En l’absence de programme disponible à temps, Antoine Maisonhaute, premier violon, membre fondateur du quatuor et violoniste de l’ensemble Multilatérale, présente en quelques mots mais avec humour les différentes œuvres, ravi de se « sentir utile ».


De Terry Riley (né en 1935), les artistes interprètent tout d’abord Lever de soleil du collectionneur de rêves planétaires (1980), un premier essai pour quatuor du compositeur qui n’a pas écrit une seule note depuis une dizaine d’années, ce qui se sent quand même un peu. Il s’agit de fragments, de modules, que les musiciens sont censés agencer à leur guise. Rapidement, de petites cellules évoquent paradoxalement de grands espaces américains comme balayés par le vent et le sable, le train étant prêt à siffler trois fois. Le tout s’anime progressivement et s’amplifie mais la mécanique finit par tourner à vide, l’approche des Tana n’étant pas toujours de surcroît d’une parfaite netteté si leur articulation ne souffre pas de critique.


L’œuvre suivante (2011) de Caroline Shaw, judicieusement et logiquement placée au centre du programme en raison de son titre, captive bien davantage. Ce titre, Entr’acte, paradoxal, fait évidemment penser à Erik Satie, auteur de Relâche. Mais l’œuvre n’a pas grand rapport avec cette dernière œuvre orchestrale. Son lyrisme et son économie de moyens l’en éloigne complètement. L’œuvre aurait été plutôt inspirée par l’audition d’un quatuor de Joseph Haydn et notamment de son Menuet. Il en résulte des sortes de traces après quelques phases répétitives qui finissent par voler en éclats. Des réminiscences rococos en pizzicatos, à l’unisson, s’échouent dans des aplats de couleurs puis reviennent également morcelés. Et le violoncelle termine seul dans un superbe chant empreint de nostalgie. Les interprètes, manifestement dans leur élément, savent valoriser la sensibilité à fleur de peau de cette œuvre d’une douzaine de minutes, ô combien subtile.


Ils dominent ensuite parfaitement le Neuvième (et dernier) Quatuor de Philip Glass (né en 1937). Parmi ses nombreux quatuors, série débutée en 1966, on connaît surtout le Troisième inspiré par Mishima, moins celui‑ci créé par les Tana en 2022. Antoine Maisonhaute considère que c’est pourtant le meilleur quoique atypique, ajoutant avec le sourire que le jugement n’a pas évidemment pas de lien avec le fait que les Tana l’ont créé. On ne partagera pas forcément l’appréciation. Le quatuor a été écrit comme musique de scène pour une production à Broadway du Roi Lear. Or nul tumulte, nulle violence, nul désespoir ne traverse cette œuvre poussive en cinq mouvements assez incohérents, sentant la fatigue et la paresse. Certes on tend l’oreille lorsqu’on quitte le ronron habituel du compositeur, lors des ruptures de ton ou des déphasages, lorsque les interprètes frappent les cordes col legno ou utilisent des sourdines, mais globalement, il n’y a pas grand‑chose de neuf dans ce quatuor. Par exemple, la partie du violoncelle, pourtant superbement tenue par Jeanne Maisonhaute, rappelle à un moment la bande son du début de Naqoyqatsi, dernier volet de la trilogie de Godfrey Reggio (2002). Le tout, très mélodique, est finalement baigné dans une espèce de sagesse consensuelle assez molle. Le public est néanmoins ravi et obtient par ses rappels une lecture du premier mouvement du Troisième Quatuor précité, enregistré d’ailleurs par les Tana dans le cadre de leur intégrale. Une tranche de pur Glass cette fois, au lyrisme échevelé, sans complexe.


Le site du Quatuor Tana



Stéphane Guy

 

 

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