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Les Mille au paradis

Paris
Philharmonie
11/24/2023 -  et 25 novembre 2023
Gustav Mahler : Symphonie n° 8
Johanni van Oostrum (soprano, Una Pœnitentium), Sarah Wegener (soprano, Magna Peccatrix), Johanna Wallroth (soprano, Mater Gloriosa), Jamie Barton (mezzo‑soprano, Mulier Samaritana), Marie‑Andrée Bouchard-Lesieur (mezzo‑soprano, Maria Ægyptiaca), Andrew Staples (ténor, Doctor Marianus), Christopher Maltman (baryton, Pater Ecstaticus), Tareq Nazmi (basse, Pater Profundus)
Chœur de l’Orchestre de Paris, jeune chœur de Paris, Richard Wilberforce (chef de chœur), Maîtrise de Paris du Conservatoire à rayonnement régional de Paris, Edwige Parat (cheffe de chœur), Chœur d’enfants de l’Orchestre de Paris, Rémi Aguirre Zubiri, Edwin Baudo, Désirée Pannetier, Béatrice Warcollier (chefs de chœurs associés), Orchestre de Paris, Orchestre du Conservatoire de Paris, Daniel Harding (direction)


C’est non seulement une des œuvres les plus colossales du répertoire, mais c’est aussi un fervent acte de foi en l’Esprit et en l’Eros créateurs, le Veni Creator de la Pentecôte se prolongeant par la scène finale du Second Faust de Goethe, où Marguerite, devenue « Una Pœnitentium » attire l’âme rédimée du savant. Est‑ce ainsi que Daniel Harding, retrouvant l’orchestre qui fuit le sien, conçoit cette Huitième Symphonie de Mahler, abusivement nommée « des mille » par un impresario soucieux de publicité ?


Le Veni Creator se cherche, parce que le chef, soucieux de fluidifier la masse sonore et chorale, ce dont on lui sait gré, oublie un peu de faire passer sur la musique le souffle de l’esprit – c’est toujours la pierre d’achoppement de ce premier mouvement. On admire la clarté de la direction, qui démêle l’écheveau contrapuntique, sans sentir une inspiration. Le chœur, ou plutôt les chœurs, soumis il est vrai à rude épreuve avec des aigus meurtriers, n’ont pas encore tout à fait trouvé leur homogénéité.


La seconde partie, en revanche, nous conduit vraiment au ciel, après un début plein de mystère, où le temps semble suspendu. Le chef anglais, au‑delà de la virtuosité, est cette fois habité de l’élan faustien conduisant à la transfiguration, tout en restant architecte d’une forme dont il dégage toutes les lignes, magicien des sons aussi, restituant toutes les combinaisons timbriques dont Mahler a le secret. Et la grandiose fresque ne s’alourdit jamais, d’une légèreté ailée pour le « Gerettet ist » des Anges. Le chœur ne fait plus qu’un, surmontant les écueils, magnifique dans l’extatique « Alles vergängliche » final, où l’on entre au ciel. Les deux orchestres ne fusionnent pas moins, superbes.


Le défi n’est pas moindre pour les voix solistes, en particulier les sopranos et le ténor. On les a, heureusement, trouvées : la Magna Peccatrix de Sarah Wegener, l’Una Pœnitentium de Johanni van Ooostrum, une des Elsa du Lohengrin de Bastille, ont des aigus de cristal, avec des pianissimi éthérés, comme la Mater Gloriosa de Johanna Wallroth, dont le « Komm ! Komm ! » lumineux descend du haut des gradins. Moins exposées, on n’en a pas moins trié les altos sur le volet, Mulier Samaritana de Jamie Barton ou Maria Ægyptiaca de Marie‑Andrée Bouchard-Lesieur, dont « Bei dem Bronn » et le « Bei dem geweihten Orte » sont très beaux. La partie du Docteur Marianus fait parfois penser à celle du Bacchus de l’Ariane à Naxos straussienne, poussant le ténor dans les retranchements du passage et de l’aigu : Andrew Staples y atteint parfois ses limites mais sans s’époumoner et tient sa ligne. Si sa voix a perdu de sa chair, le Pater Ecstaticus de Christopher Maltman en transcende l’usure par l’élégance patricienne du phrasé et Tareq Nazmi assume la périlleuse tessiture du Pater Profundus.



Didier van Moere

 

 

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