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Perdus dans la forêt

Paris
Opéra Bastille
09/13/2023 -  et 16, 19*, 21, 26, 29 septembre, 1er, 3, 4, 6, 7, 9, 12 octobre 2023
Wolfgang Amadeus Mozart : Don Giovanni, K. 527
Peter Mattei*/Kyle Ketelsen (Don Giovanni), Adela Zaharia*/Julia Kleiter (Donna Anna), Ben Bliss*/Cyrille Dubois (Don Ottavio), John Relyea (Il Commendatore), Gaëlle Arquez*/Tara Erraught (Donna Elvira), Alex Esposito*/Bogdan Talos (Leporello), Guilhem Worms (Masetto), Ying Fang*/Marine Chagnon (Zerlina)
Chœurs de l’Opéra national de Paris, Alessandro Di Stefano (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Antonello Manacorda*/Giancarlo Rizzi (direction musicale)
Claus Guth (mise en scène), Christian Schmidt (décors, costumes), Olaf Winter (lumières), Ramses Sigl (chorégraphie), Ronny Dietrich (dramaturgie)


P. Mattei, A. Esposito (© Bernd Uhlig/Opéra national de Paris)


L’Opéra de Paris ouvre sa saison dans sa salle bastillane par un Don Giovanni mis en scène par Claus Guth avec une brillante distribution.


Annoncé comme un nouveau spectacle (il l’est pour Paris), ce Don Giovanni fait partie d’une trilogie Mozart‑Da Ponte réalisée par le metteur en scène allemand Claus Guth entre 2006 et 2008 pour le Festival de Salzbourg en coproduction avec l’Opéra d’Etat Unter den Linden de Berlin. Très remarquée il y a quinze ans, cette mise en scène plutôt excessive dans sa lecture était la moins réussie de la trilogie. Elle affichait alors une distribution éclatante avec Christopher Maltman et Erwin Schrott, la Donna Anna de Dorothea Röschmann et les Wiener Philharmoniker dans la fosse. Elle est toujours accessible sur DVD EuroArts.


Quinze ans après, elle paraît datée dans ses choix dramaturgiques. Don Giovanni est blessé à mort par le Commandeur et traîne cette blessure tout au long de sa descente aux enfers. Le Commandeur revient vivant à la fin, laquelle est tronquée de son sextuor conclusif et s’achève sur la mort de Don Giovanni. Les couples de l’opéra sont montrés comme dysfonctionnels. Ces propositions sont un peu légères et on préférait, bien que n’y adhérant pas complétement, la lecture sociale de la précédente production sur la même scène, signée Michael Haneke, qui développait un scénario de harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Quelques gadgets viennent compléter le tableau : après le meurtre du Commandeur, les deux compères partagent une seringue qui n’a rien d’un vaccin, une automobile sur scène, des téléphones portables et accessoires divers – bref on a beaucoup vu cela sans que cela n’apporte une réflexion nouvelle, tout au plus des repères pour un public nouveau à l’opéra...


Reste le formidable décor de Christian Schmidt, une forêt d’épicéas qui se déploie sur un plateau tournant créant des espaces spectaculaires et des éclairages superbes d’Olaf Winter mais qui imposent à l’action de se dérouler dans une nuit éternelle. Et la distribution réunie autour de l’immense Don Giovanni de Peter Mattei, titulaire du rôle sur les plus grandes scènes lyriques du monde entier depuis une trentaine d’années. Le rôle n’a plus de secret pour lui et il peut se plier sans peine avec un timbre au velours presque intact aux exigences de n’importe quel metteur en scène. Celle de Guth est très exigeante, la direction d’acteurs étant indéniablement le point fort de son travail. Avec des excès un peu potaches, le Leporello d’Alex Esposito a aussi une belle allure vocale. Un peu plus pâle de timbre mais au style très mozartien, le Don Ottavio de Ben Bliss est un personnage plus en relief que dans les mises en scènes traditionnelles. Guilhem Worms a beaucoup de présence en Masetto mais a tendance à oublier la mesure. Les dames sont dominées par la Donna Anna de la Roumaine Adela Zaharia, révélée par le Concours Operalia, à la tessiture impressionnante et au timbre chaleureux. La Donna Elvira de Gaëlle Arquez a belle allure malgré le côté antipathique de son personnage. La Zerlina de Ying Fang est un peu pâlotte en comparaison, quoiqu’impeccable vocalement.


La direction de l’Italien Antonello Manacorda, ancien premier violon de l’Orchestre de chambre Mahler, restera le point faible de la soirée. Très agité dans sa gestuelle, il ne réussit pas toujours à bien coordonner le plateau et la fosse, à qui il impose une direction très accentuée, voire brutale, et ne crée par une ligne de tension perceptible d’un bout à l’autre de ce grand chef‑d’œuvre. Une autre distribution viendra, sous la direction de Giancarlo Rizzi, terminer cette série de représentations.



Olivier Brunel

 

 

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