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Hamlet dramatique ou méditatif ?

München
Nationaltheater
06/25/2023 -  et 1er, 5, 9, 12 juillet 2023
Brett Dean : Hamlet
Allan Clayton (Hamlet), Caroline Wettergreen (Ophelia), Rod Gilfry (Claudius), Sophie Koch (Gertrude), Charles Workman (Polonius), Jacques Imbrailo (Horatio), John Tomlinson (Fantôme, Le fossoyeur, Un comédien), Sean Panikkar (Laertes), Patrick Terry (Rosenkranz), Christopher Lowrey (Guildenstern), Andrew Hamilton (Marcellus, Un comédien), Liam Bonthrone, Joel Williams (Comédiens), James Crabb (Un accordéoniste), rheinstimmen ensemble
Bayerischer Staatsopernchor, Rustam Samedov (chef de chœur), Bayerisches Staatsorchester, Vladimir Jurowski (direction musicale)
Neil Armfield (mise en scène), Alice Babidge (costumes), Jon Clark (lumières), Denni Sayers (chorégraphe), Laura Schmidt (dramaturgie), Nicholas Hall (scène d’escrime)


A. Clayton (© Wilfried Hösl)


En 2021, Serge Dorny nous avait expliqué son intention de donner des œuvres qui sortiraient des sentiers battus, insistant sur la diversité du répertoire opératique. C’est dans cette logique que nous avons pu entendre des représentations d’opéras de Chostakovitch et de Prokofiev, que l’édition 2022 du festival de juillet avait ouvert avec Les Diables de Loudun de Penderecki et que celui de cette année démarre avec le Hamlet de l’Australien Brett Dean, créé en 2017 à Glyndebourne.


Brett Dean, autrefois altiste au Philharmonique de Berlin, démontre une maîtrise orchestrale stupéfiante. Avec des effets électroniques en renfort, un chœur minimaliste dans la fosse et une partie instrumentale constamment variée, son orchestre est moderne et chargé d’expressivité. On peut seulement imaginer l’effort monumental déployé pour atteindre l’excellence instrumentale requise par l’œuvre, et une fois de plus, Vladimir Jurowski, qui avait dirigé la première en 2017, impressionne par son expertise.


La distribution est de haut niveau. Allan Clayton, dans le rôle principal, offre une incarnation dynamique et saisissante de Hamlet. Les coloratures de Caroline Wettergreen sont étonnantes, et sa scène de folie pourrait bien être le moment le plus touchant et « opératique » de la soirée. Sophie Koch, en tant que Gertrude royale, excelle dans ce qui semble être un de ses meilleurs rôles récents. Patrick Terry et Christopher Lowrey, interprétant Rosenkranz et Guildenstern, apportent une dose de délectation à leurs rôles de marionnettes. Enfin, John Tomlinson, en grande forme vocale, domine toutes ses scènes, tant sur le plan dramatique que vocal.


La mise en scène de Neil Armfield est à la fois classique et variée. L’action, bien articulée, retient l’attention durant toute la soirée. L’usage des décors, notamment la transition vers la scène du cimetière, est particulièrement ingénieux. Malgré sa complexité, le duel avec Laërte est parfaitement compréhensible.


Le public, captivé, a salué avec enthousiasme les chanteurs, le metteur en scène et le compositeur. Un tel triomphe est rare dans le monde de l’opéra. Nous devons applaudir et encourager les artistes, le public et l’Opéra de Bavière à poursuivre leur modernisation du domaine opératique. Cependant, malgré le haut niveau de cette production, quelques observations méritent d’être faites.


D’abord, le texte n’est pas facile à saisir. On se surprend à regarder les sous‑titres assez souvent, malgré des chanteurs en majorité anglophones. L’orchestre, souvent fort, tend à dominer la scène. Il y a un certain manque de continuité dans la prosodie et une surenchère d’effets vocaux au détriment du lyrisme puissant de Shakespeare qui semble absent.


La seconde remarque concerne les choix dramatiques, probablement délibérés, du librettiste et du compositeur. Hamlet, dans son intégralité, dure plus de six heures. Des coupures sont nécessaires. Peter Brook, dans ses différentes interprétations de la pièce, l’avait réduite à une heure et demie à deux heures. Cependant, il avait préservé les nombreux monologues de Hamlet, respectant ainsi l’ambivalence et le doute qui caractérisent le personnage principal, ce qui est en fin de compte le cœur de la pièce. Dans cette version, Hamlet est constamment en mouvement, sautant, dansant... Ce dynamisme convient bien à un traitement musical, mais reflète‑t‑il vraiment l’intention de Shakespeare ? That is the question...


Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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