About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Plongée au cœur du labyrinthe avec Berio

Paris
Centre Pompidou
06/07/2023 -  et 8 juin 2023
Carlo Gesualdo : Sixième Livre de madrigaux : « Moro, lasso, al mio duolo » & « Se la mia morte brami »
Luca Marenzio : Neuvième Livre de madrigaux : « Amor, i’hò molti »
Luciano Berio : Laborintus II

Serge Maggiani (récitant)
Augustin Muller (électronique Ircam), Jérémie Bourgogne (diffusion sonore Ircam), Ars Nova, Gregory Vajda (direction)
David Lescot (mise en scène), Alwyne de Dardel (scénographie), Serge Meyer (vidéo), Olga Karpinsky (costumes), Juliette Besançon (lumières)


Le goût de la liste et du catalogue est au cœur de la poétique de Luciano Berio (1925‑2003) en général, et de Laborintus II en particulier. L’œuvre fut composée en 1965 à l’occasion du sept centième anniversaire de la naissance de Dante. David Lescot répand un capharnaüm où s’entassent pêle‑mêle bobines, cassettes, livres, dossiers, tout un empilement d’archives dont les feuilles dépassent de cartonniers, de tiroirs, d’étagères et autres meubles de rangement. On ne saurait trouver prolongement visuel plus approprié au croisement des thèmes brassés par le génie dantesque : la mémoire, la mort, l’usure... auquel le librettiste Edoardo Sanguineti a adjoint des textes d’Ezra Pound et de T.S. Eliot.


Chanteurs et musiciens de l’ensemble Ars Nova y serpentent en tâtonnant, comme s’ils visitaient nuitamment le tombeau d’une pyramide, avant de prendre place derrière leur pupitre. Il appartient à trois madrigaux signés de Gesualdo et Marenzio d’incanter préalablement cette espace glacial et anxiogène que l’éclairage de Juliette Besançon peuple de fantômes.


L’interprétation de Serge Maggiani s’inscrit dans le sillage de celle, mythique, de Diego Masson avec Sanguineti lui‑même en récitant (Harmonia Mundi) : une sobriété un peu distante, couplée avec une prononciation très incarnée. De quoi contraster avec la profusion (verbale, langagière) dont fait preuve le collectif de chanteurs remarquablement préparé d’Ars Nova, notamment le trio féminin. La vocalité débridée, les échappées solistes et bruitistes (claquements de mains) ne se font jamais aux dépens de la justesse et de l’équilibre d’ensemble.


Le passage dévolu à la bande magnétique (conçue à l’époque avec l’assistance de François Bayle) donne lieu à une vidéo énigmatique de Serge Meyer cependant que le récitant entonne l’hymne sublime que Dante a consacré à la musique (extrait d’Il convivio). De Peter Eőtvős dont il fut l’élève, Gregory Vadja partage la gestique claire et économe dans une partition qui laisse la part belle à l’improvisation, comme en témoigne une séquence très free jazz où s’invitent les gesticulations corporelles.


C’est pourtant sur une note sombre que débutait la soirée avec la disparition, vendredi dernier, de Kaija Saariaho à l’âge de 70 ans. Frank Madlener, directeur de l’Ircam, a pris la parole pour lui dédier cette édition du festival ManiFeste et ce concert inaugural. Lichtbogen (« Arcs et arches de lumière ») sera joué le 9 juin à la Cité de la Musique par l’Ensemble intercontemporain.



Jérémie Bigorie

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com