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Clair-obscur

Zurich
Opernhaus
03/05/2023 -  et 9, 14, 18, 22, 26* mars 2023
Richard Wagner : Siegfried
Klaus Florian Vogt (Siegfried), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Mime), Tomasz Konieczny (Der Wanderer), Christopher Purves (Alberich), David Leigh (Fafner), Anna Danik (Erda), Camilla Nylund (Brünnhilde), Rebeca Olvera (Das Waldvöglein)
Philharmonia Zürich, Gianandrea Noseda (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Christian Schmidt (décors), Florian Schaaf (assistant aux décors), Franck Evin (lumières), Tieni Burkhalter (vidéo), Werner Hintze, Beate Breidenbach (dramaturgie)


(© Monika Rittershaus)


Après L’Or du Rhin en mai de l’année dernière puis La Walkyrie en septembre, l’Opernhaus de Zurich a poursuivi son nouveau Ring avec Siegfried, le troisième volet de la Tétralogie wagnérienne. Si les deux premiers épisodes se déroulaient dans des décors d’un blanc lumineux, c’est le noir qui a dominé le troisième ; pour le reste, on a retrouvé exactement les mêmes ingrédients qui font le succès de la production : l’intrigue se déploie dans les différentes pièces de la demeure du Walhalla, laquelle ne cesse de tourner sur elle-même pendant tout le spectacle. Andreas Homoki, metteur en scène et par ailleurs directeur de l’Opernhaus, continue de raconter l’histoire fidèlement et simplement, sans transposition ni considération politico-philosophique, laissant aux spectateurs le soin de tirer leurs propres conclusions sur l’interprétation à donner à l’ouvrage. Il fait clairement de Siegfried une comédie, si ce n’est un conte, avec une direction d’acteurs précise et méticuleuse. Les pièces du palais sont toutes plongées dans l’obscurité ; les meubles sont renversés et les tableaux des épisodes précédents ont disparu. Au premier acte, dans ce qui sert de tanière à Mime, Siegfried, en culottes courtes, apparaît suivi d’un ours, puis c’est un immense dragon que le héros va tuer. Certains meubles sont énormes, comme la chaise sur laquelle va s’asseoir Siegfried, qui se retrouve les jambes ballantes. Se tenant juste à côté, Mime fait figure de nain. Au deuxième acte, l’Oiseau de la forêt a deux très longues ailes blanches. On voit aussi réapparaître l’immense table des réunions familiales – rappel des deux épisodes précédents – sur laquelle Siegfried va briser la lance du Wanderer/Wotan. Et, au troisième acte, c’est bien sur un énorme rocher que sommeille Brünnhilde, dans l’attente d’être réveillée par son sauveur. Tout ici est parfaitement clair et compréhensible.


Claire, c’est aussi l’adjectif qui s’applique le mieux à la direction musicale de Gianandrea Noseda. Comme dans les deux volets précédents, le maestro a opté pour une lecture transparente, faisant entendre chaque détail de l’orchestration. L’exécution se fait tour à tour frémissante, nerveuse, sourde, grondante, menaçante, débordante, elle est alternativement raffinée et rutilante, mais même dans les passages fortissimo, elle ne couvre jamais les chanteurs. Et surtout, elle se pare le plus souvent de couleurs sombres et obscures, préfigurant la tragédie qui se dénouera à l’épisode suivant. La distribution est emmenée par le Siegfried de Klaus Florian Vogt, qui transforme sa prise de rôle en coup de maître. S’il n’est pas exactement le Heldentenor que l’on associe traditionnellement au personnage, il trouve en Gianandrea Noseda un accompagnateur attentif et signe un portrait convaincant d’un héros gracieux et juvénile, extrêmement candide, à la voix claire et lumineuse. La prise de rôle de Camilla Nylund n’est, quant à elle, pas aussi réussie car on sent clairement la soprano tendue, à la limite de ses possibilités vocales, quand bien même elle incarne une Brünnhilde touchante et ardente à la fois. Wolfgang Ablinger-Sperrhacke est tout simplement un Mime idéal, sans concurrent aujourd’hui, ambigu et manipulateur à souhait, mais aussi terriblement malheureux. Wanderer au timbre noir et à la projection bien calibrée, Tomasz Konieczny a l’art de rendre son personnage humain, très convaincant dans les moments de doute ou de souffrance, notamment lorsqu’il est raillé par son petit-fils. Le Fafner de David Leigh séduit, pour sa part, par la puissance de sa voix caverneuse. Christopher Purves prête à Alberich une forte présence scénique. De même, Anna Danik est incandescente dans le rôle d’Erda, fière et hautaine. On signalera également l’Oiseau de la forêt léger et aérien de Rebeca Olvera. Le dernier épisode de cette Tétralogie qui devrait faire date, Le Crépuscule des dieux, est programmé pour novembre, alors que le cycle complet sera donné deux fois en mai 2024.



Claudio Poloni

 

 

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