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Coâ de neuf ?

Paris
Opéra National de Paris - Garnier
02/11/2002 -  13, 15, 18, 20, 22, 24, 27 février 2002
Jean-Philippe Rameau : Platée
Paul Agnew / Gilles Ragon (Platée), Mireille Delunsch (la Folie, Thalie), Valérie Gabail (Clarine, l'Amour), Doris Lamprecht (Junon), Yann Beuron (Mercure, Thespis), Laurent Naouri (Cythéron, Satire), Franck Leguérinel (Momus), Vincent Le Texier (Jupiter)
Orchestre et Choeur Les Musiciens du Louvre, Marc Minkowski (direction)
Laurent Pelly (mise en scène et costumes), Chantal Thomas (décors), Laura Scozzi (chorégraphie), Joël Adam (lumières)

Même imagination généreuse, même pertinence du décalage et de la parodie, même accomplissement de la direction d'acteurs, d'une vitalité et d'un naturel rares (sans parler des géniales chorégraphies de Laura Scozzi) : la production de Laurent Pelly demeure l'une des plus réussies dont ait bénéficié un ouvrage baroque cette dernière décennie, et recèle toujours quelque plaisir inédit à chaque nouvelle vision. La direction de Marc Minkowski a sensiblement évolué pour sa part, peut-être face aux accusations de motorisme proférées par certains ramistes collet monté - dans cette optique, les représentations bordelaises de la saison passée constituèrent une forme d'apothéose. Tempos plus larges, attaques plus rondes, assorties d'un approfondissement du travail sur les timbres et la polyphonie (les longues tenues des basses ressortent ainsi dans toute leur étrangeté harmonique, tandis que Nicolas Mazzoleni effectue un superbe travail au pupitre de premiers violons). Cette volonté d'apaisement entraînait au soir de la Première un léger divorce avec les danseurs, dont la motivation, l'élan rythmique semblait venir d'eux mêmes plutôt que de la fosse (chaconne et tambourin du troisième acte en particulier) ; lors de la représentation du 15 toutefois, Marc Minkowski semblait être parvenu à un équilibre idéal entre ces recherches plus fouillées et la vitalité qui lui est habituelle, les décalages chœur - orchestre induits par la mise en scène au troisième acte s'étant également atténués. Mireille Delunsch a suivi le chef dans cette maturation, et leur complicité scénique et musicale rend inoubliable la grande scène de la Folie. Aucune outrance, mais une force comique foudroyante et dérangeante dans ces attitudes, ces expressions et ces regards d'une extraordinaire subtilité, ces couleurs vocales pleines d'audace, ce phrasé d'un parfait raffinement (Amour, lance tes traits passera avec un peu moins de facilité), cette diction française en net progrès. On retrouve avec bonheur Yann Beuron, plus épanoui que jamais en Mercure (l'aigu paraît raffermi), et Laurent Naouri, un peu contraint le 11, plus libre de son émission le 15. Franck Leguérinel compense par la verve de son numéro la banalité de la voix, Le Texier vire à l'inécoutable, incapable de phraser et d'articuler. Nouvelle venue, Doris Lamprecht ne vaut guère mieux, mais au moins ne lui demande-t-on guère de musique et beaucoup de burlesque, ce dont elle s'acquitte à merveille. Valérie Gabail réussit en revanche de splendides débuts sur la scène de l'Opéra : le timbre brillant mais équilibré et bien ancré dans le médium, le soutien assuré nous valent un Soleil, tu luis en vain remarquable de lignes et de nuances. Jean-Paul Fouchécourt, sa totale identification au personnage, la personnalité de son timbre, la perfection de ses mots faits musique et l'alliage inimitable entre grotesque et bouleversant ont manqué à cette reprise. Mais les deux titulaires sont mieux que des doublures, et lui rendent des comptes sur plusieurs terrains où ses limites étaient patentes. Paul Agnew souffre de l'impossible jonction entre ses registres, et ne parvient pas à trouver la vraie couleur du rôle. Il arrive fatigué à l'acte final, où l'émission devient trop fixe et la ligne incertaine. Tout le début fait valoir, outre une diction soignée, une autorité virtuose et une précision des ornements qui ne souffrent guère de concurrence dans les redoutables Habitants fortunés ou Quittez, Nymphes, quittez, et le personnage, finement dessiné, est à la fois drôle et touchant. En comparaison, Gilles Ragon se prend pour Zaza Napoli dans ses deux premiers actes et affiche des manières musicales… de camionneur. Mais la voix est parfaite de volume et de projection pour cette salle, le timbre égal et large sur toute la tessiture, et le final exceptionnel, tant par sa véhémence que par une incarnation dramatique soudain juste, signant comme peu d'autres la résolution tragique de la farce.


Vincent Agrech

 

 

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