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Simon Steen-Andersen, dandy des sons

Paris
Centre Pompidou
06/01/2019 -  
Simon Steen-Andersen : Black Box Music – Run Time Error
Håkon Stene (percussion, acteur), Simon Steen-Andersen (vidéo live, électronique live), Ensemble Modern


(© DR)


«Je me considère comme un compositeur de "musique étendue", une étiquette que je choisis délibérément afin de mettre l’accent sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un art "au-delà de la musique", mais d’un art qui prend profondément racine dans la musique pour étendre sa composition aux autres médias»: ainsi Simon Steen-Andersen (né en 1976) définit-il son métier.


Les «autres médias» sont, en l’occurrence, la vidéo et un certain théâtre, que le Danois entend fondre en une unité supérieure: «J’aspire à "faire un" d’éléments appartenant à différentes catégories, plutôt que de les réunir ou de les empiler» (entretien avec Jérémie Szpirglas inclus dans les notes de programme).


Dans Run Time Error (2015-2019) pour ensemble et électronique, le compositeur-démiurge officie à la double projection vidéo à l’aide de deux joysticks tandis que les instrumentistes interagissent en direct avec eux-mêmes à l’écran. Captée dans une ancienne usine de voitures située à Rüsselsheim (près de Francfort), la vidéo les met donc en scène: on y voit Steen-Andersen, équipé d’un micro utilisé comme une antenne, sonder (avec la complicité des musiciens) le moindre objet trouvé, du clavier d’ordinateur à la portière de voiture en passant par des rouleaux adhésifs déroulés avec fracas. Si le son produit en direct revêt un caractère illustratif, l’œuvre échappe à l’ornière plate de la tautologie par le truchement de quelques distorsions: vitesse accélérée des images à laquelle l’ensemble doit riposter, soupçon de théâtre musical, séquence inopinée de free-jazz...


Black Box Music (2012) mêle la direction d’orchestre au théâtre de marionnettes. Filmées en gros plan dans un dispositif scénique où ne manquent ni les rideaux, ni les accessoires non plus que les lumières, les mains de Håkon Stene – dont la gestuelle s’apparente plus au langage des signes qu’aux codes traditionnels – incantent un Ensemble Modern des plus réactifs. Ici aussi, l’intrusion d’une dramaturgie dans le déroulement de l’œuvre vient conjurer ce que le jeu mimétique aurait pu avoir de trop prévisible, telle cette séquence où les musiciens s’accordent en lien avec l’arsenal de diapasons actionné par le «chef», quand ils ne se rebellent pas en restant sourds (ou plutôt aveugles) aux injonctions d’une paire de mains livrée sa muette chorégraphie.


On retiendra in fine un certain humour, lequel confère légèreté et primesaut à des œuvres hybrides dont le principal risque est de se voir réduites au concept présidant à leur composition. Observer Simon Steen-Andersen, affublé de sa chemise blanche, de sa cravate noire et de son micro, aller à la pêche aux sons parmi les débris d’une usine désaffectée est assez jubilatoire. Dans les pointes les plus inspirées de son art, ce dandy des sons pourrait passer pour un petit-fils nordique de Mauricio Kagel.


Le site de Simon Steen-Andersen



Jérémie Bigorie

 

 

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