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Un couple idéal

Zurich
Opernhaus
04/07/2019 -  et 10, 13, 18, 22, 26 avril, 4*, 12, 15 mai 2019
Jules Massenet : Manon
Elsa Dreisig (Manon Lescaut), Piotr Beczala (Le Chevalier des Grieux), Yuriy Yurchuk (Lescaut), Alastair Miles (Le Comte des Grieux), Eric Huchet (Guillot de Morfontaine), Marc Scoffoni (De Brétigny), Yuliia Zasimova (Poussette), Natalia Tanasii (Javotte), Deniz Uzun (Rosette), Cheyne Davidson (L’Hôtelier), Omer Kobiljak, Jamez McCorkle (Deux Gardes), Henri Bernard Guizirian (Le Portier du Séminaire, Un Sergent), Ralitza Handjieva/Caroline Fuss* (La Servante), Omer Kobiljak (Premier joueur, Un archer), Juan Etchepareborda (Deuxième joueur)
Chor der Oper Zürich, Ernst Raffelsberger (préparation), Philharmonia Zürich, Marco Armiliato (direction musicale)
Floris Visser (mise en scène), Dieuweke van Reij (décors et costumes), Alex Brok (lumières), Pim Veulings (chorégraphie), Kathrin Brunner (dramaturgie)


(© T+T Fotografie Toni Suter)


La nouvelle production de Manon à l’Opernhaus de Zurich vaut surtout pour les deux interprètes du couple d’amants infortunés, le ténor Piotr Beczala en Chevalier des Grieux et la soprano Elsa Dreisig en Manon Lescaut. Piotr Beczala maîtrise sa voix à la perfection, contrôlant chaque note, chaque inflexion et chaque souffle, n’en incarnant pas moins un Chevalier ardent et passionné, avec un chant raffiné et des aigus étincelants. Ses admirables nuances mezza voce dans l’air du rêve resteront comme un moment fort du spectacle. Le timbre juvénile et lumineux d’Elsa Dreisig convient parfaitement à Manon, rendant le personnage particulièrement émouvant, avec aussi des vocalises brillantes et un medium corsé, idéal pour la scène de Saint-Sulpice. Qui plus est, les deux voix se marient idéalement. Rien que pour ce couple idéal, la production mérite le déplacement. Dans les rôles secondaires, si Eric Huchet en Guillot de Morfontaine et Marc Scoffoni en Brétigny sont parfaitement idiomatiques, on n’en dira pas autant du Comte des Grieux d’Alastair Miles, fâché avec le français, mais sa noblesse et sa prestance font oublier sa diction.


Le metteur en scène Floris Visser voit Manon essentiellement comme une jeune femme timide, naïve et insouciante (elle n’a que seize ans selon le livret), qui cherche sa propre voie. Pendant les premières mesures de l’opéra, une petite fille en chemise de nuit sort furtivement de sa chambre pour observer le bal donné par ses parents, les yeux écarquillés de curiosité et d’admiration devant les tenues et les bijoux des dames invitées. Devant un grand miroir, elle enfile un long gant blanc qu’elle a trouvé par terre, contemplant longuement son reflet. C’est ainsi que s’explique la fascination qu’exerce le luxe sur Manon, qui n’est ici qu’une jeune femme qui se complaît dans le regard que portent les hommes sur elle, qui se laisse entraîner par les événements, sans jamais être véritablement actrice de son existence. Pour cohérent et logique qu’il soit, le traitement du personnage peut néanmoins sembler un peu limité, car l’aspect « femme fatale » est écarté. On retiendra néanmoins la magnifique scène finale, au cours de laquelle Manon agonise, observée par les invités du bal, qui tiennent chacun un morceau du grand miroir brisé. En entendant les décibels qui émanent de la fosse, on se dit que le chef Marco Armiliato a dû se tromper de partition. Sa lecture énergique, enflammée et brillante conviendrait mieux à la Manon Lescaut de Puccini ; elle est en tout cas à des années lumières du raffinement, des couleurs et du souci du détail de Massenet, sans compter que les chanteurs sont parfois couverts. Dommage, car le plateau vocal idéal aurait mérité plus d'égards.



Claudio Poloni

 

 

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